Tayeb Saddiki est certes un grand homme de théâtre. En tant qu'artiste, il devait tenter le cinéma aussi. Ce fut le cas d'abord en qualité d'acteur, puis en 1983, il réalisa son premier et unique long métrage. Pendant longtemps, il produisit et réalisa des films de commande restés presque inédits, une manière de rester proche du cinéma sans vraiment l'investir. On retient deux dates contradictoires de la naissance de Tayeb Saddiki: le 27 décembre 1938 et le 7 janvier 1939 à Essaouira, l'ancienne Mogador, ce nom qui lui tient tant à coeur. Son père était un fquih qui enseignait le Coran, auteur d'un ouvrage sur Essaouira. Etudes primaires dans cette ville avant de rejoindre Casablanca pour y poursuivre le cycle secondaire. Là il obtient une bourse pour une formation professionnelle en France en tant qu'électricien. Après trois ans de formation, il décroche un travail aux "Postes et Télécommunications". En 1954, il participa au premier stage organisé par le ministère de la Jeunesse et des Sports. Il choisit la section "Archtecture théatrale" et rencontra une première génération de comédiens notamment Ahmed Tayeb Laâlej, Mohamed Saïd Afifi, Khadija Jamal, Larbi Doghmi, Salim Berrada et Bachir Laâlej. Le professeur André Voisin fait appel à ses compétences pour traduire les textes du français à l'arabe. La même année, il participa avec les autres stagiaires au court métrage réalisé par Jean Fléchet "Le poulet" (Djaja), une comédie burlesque autour du personnage de Joha. Ce fut sa première expérience au cinéma. Il avait à peine 15 ans. Il prend part au stage organisé par le même ministère à la Maâmora après la création de la troupe "Le Théâtre Central des Recherches Théâtrales". Un jour, il dut remplacer le comédien Larbi Doghmi qui tenait le rôle de Joha. C'est le départ d'une carrière artistique retentissante en qualité de comédien et de metteur en scène. Tayeb Saddiki est à l'origine de la création, dans les années 50, du "Théâtre ouvrier" (Al Masrah Al Oummali) à Casablanca destiné essentiellement aux dockers du port, aux ouvriers du transport et régie des tabacs. A chaque représentation était organisée une discussion ouverte entre ouvriers et comédiens. La dernière pièce date de 1959 intitulée "Le sexe faible" adaptée du "Parlement des femmes" d'Aristovan. Il crée en 1960 une troupe au sein du Théâtre Municipal de Casablanca dont il assure la direction de 1964 à 1977. Il fonde ensuite la troupe "Masrah Annass" (Le théâtre des gens) avec laquelle il monte la plupart de ses pièces. En 1970, il expérimente "Le café-théâtre" à Casablanca avant "Le théâtre ambulant" à travers tout le Maroc. Il devient membre de l'Institut International de Théâtre rattaché à l'UNESCO puis chargé de mission au ministère du Tourisme. Il assuma respectivement la direction de Théâtre Municipal puis le Théâtre National Mohammed V. C'est en qualité de comédien qu'il s'intéressa au cinéma. Très tôt, il est sollicité par des cinéastes étrangers. Après "Le poulet", c'est "Le médecin malgré lui" d'Henri Jacques puis "Le collier de beignets" du même Fléchet, ensuite "Lawrence d'Arabie de David Lean et "Tartarin de Tarascon" de Francis Blanche avant "Le message" de Mustapha Akkad et "Les enfants du soleil" de Jacques Sévérac. On ne lui connaît pas autant de rôles dans les films réalisés par les cinéastes marocains. En 1960, il incarne un jeune chômeur dans le film de commande "Pour une bouchée de pain" réalisé par Larbi Bennani. On le retrouve ensuite dans son propre rôle dans "Al Bsat" de Mohamed Ziani puis dans le même statut dans "Transes" (Al Hal) d'Ahmed Maânouni. Plus tard, il sera dirigé par Hamid Bennani dans "La prière de l'absent" puis par Omar Chraibi dans "Tissé de mains et d'étoffe" où il joue le rôle symbolique d'un bibliothécaire, le métier de son père. Tayeb Saddiki est l'auteur d'une quinzaine de films dont un long métrage "Zeft" (1983) adapté de sa propre pièce "Sidi Yassine fi tariq". Son répertoire compte des dizaines de pièces de théâtre et plusieurs téléfilms où il impliquait ses frères et soeur Saïd, Seddik et Maria. Pluridisciplinaire: acteur, metteur en scène, réalisateur, calligraphe, peintre, dramaturge et auteur, Tayeb Saddiki est un artiste complet.