Du haut de la prestigieuse tribune de la Knesset, Nicolas Sarkozy a voulu apporter les clarifications exigées par certains pays de la Méditerranée sur la présence d'Israël au sommet de Paris. Sans aucun doute, Nicolas Sarkozy vient de réussir son voyage au Proche-Orient. Nombreuses raisons expliquent cet apparent succès. Le plus évidente des preuves est que les capitales arabes les plus réticentes, les plus épidermiques à l'amitié franco-israélienne et qui surveillaient de très près les enjeux de ce déplacement n'ont pas inondé ce voyage d'invectives ni de critiques acerbes. Il faut dire que le président français marchait sur des braises fumantes : comment exprimer son indéfectible amitié pour Israël et lui dire en même temps les vérités qu'elle ne veut pas entendre. Dans son phrasé devenu reconnaissable entre mille, fait de phrases courtes et de respiration haletante et d'effets de manches appuyés, Nicolas Sarkozy lance à la face des Israéliens et des Palestiniens ses convictions : «La sécurité d'Israël ne sera véritablement assurée qu'avec la création d'un Etat palestinien, indépendant, moderne, démocratique et viable (…) Il ne peut y avoir de paix sans l'arrêt des colonisation israéliennes dans les territoires palestiniens». Nicolas Sarkozy a par ailleurs fait du règlement du problème des réfugiés «dans le respect de l'identité d'Israël» et de la reconnaissance de Jérusalem « comme capitale de deux Etats» Israël et une futur Etat palestinien, des conditions de la paix. A l'énoncé de ces quelques lignes qui recadrent l'approche française pour la paix au Proche-Orient, Nicolas Sarkozy se distingue ouvertement d'autres responsables occidentaux qui, depuis longtemps ont abandonné l'idée d'évoquer les question qui fâchent. La question de Jérusalem, de l'arrêt de la colonisation et des refugiés fait partie des ces questions que les intermédiaires européens, Tony Blair et Angela Merkel en l'occurrence et américains comme Georges Bush ou Condoleezza Rice évoquent avec des pincettes précautionneuses de peur de fâcher les Israéliens. L'auto-censure était devenue la règle de conduite. Il faut dire aussi que pendant ce voyage, Nicolas Sarkozy jouait deux grandes parties d'une extrême sensibilité. La première est le rôle que la France voudrait jouer pour marquer les esprits et l'histoire. Hasard du calendrier, la présidence française de l'Union coïncide jour pour jour avec la grande paralysie de l'administration américaine qui se prépare à des élections pour changer le locataire de la Maison-Blanche. Durant cette période, le diplomatie américaine rentre en hibernation totale. Nicolas Sarkozy voudrait profiter de cette fenêtre pour remettre l'Union européenne dans le jeu de la paix au Proche-Orient. L'Elysée qui sent venir une opportunité de marques de coups, est très enthousiaste sur le sujet : «La France veut apporter sa contribution à la paix. Elle est prête à organiser sur son sol tous les pourparlers qui pourraient y conduire, qu'il s'agisse de la négociation israélo-palestinienne, du dialogue syro-israélien ou des discussions, qui devront reprendre entre Israël et le Liban (..) Sur ces trois volets du processus de paix, la France est prête à apporter sa garantie, prête à mobiliser sa diplomatie, ses ressources, ses soldats (…) C'est dans cet esprit qu'elle exercera à partir du 1er juillet la présidence de l'Union européenne». La seconde partie extrêmement sensible à gérer est la préparation du sommet de la Méditerranée. Nicolas Sarkozy est conscient que dans une région pétrie de passions, les mots ont un pouvoir magique et peuvent soulever les montagnes. D'où son insistance à faire suivre le moindre compliment à Israël d'une exigence de justice pour les Palestiniens. Si Nicolas Sarkozy avait tant tenu à incarner le rôle de l'ami qui peut dire sans peurs ni reproches sa vérité, il l'a fait aussi en pensant à tous les pays arabes et leurs opinions qui hésitent encore à s'engager pleinement dans son projet d'Union pour la Méditerranée. Du haut de cette prestigieuse tribune de la Knesset, Nicolas Sarkozy a voulu apporter «les clarifications» exigées par certains pays de la Méditerranée sur la présence d'Israël au sommet de Paris. En redessinant avec un courage unanimement souligné par la presse israélienne et palestinienne le cadre général de la paix au Proche Orient, Nicolas Sarkozy a réussi à introduire une nouvelle petite musique d'optimisme dans cette région si souvent habituée aux bruits de canons et aux sirènes d'alertes.