La diplomatie française est consciente qu'un des obstacles les plus difficiles à surmonter pour garantir la présence de tous les pays riverains au sommet de Paris touche la très contestable politique israélienne à l'égard des Palestiniens. Subissant de plein fouet la crise de confiance provoquée par le Non irlandais au traité européen, l'Union européen s'est réveillée le lendemain au cœur d'une autre tourmente diplomatique, celle destinée à configurer le partenariat stratégique avec Israël. La bonne intention est là, mais entourée d'ultimes précautions. L'UE vient de lancer depuis le Luxembourg un cycle de négociations avec Israël avec l'objectif déclaré d'approfondir les relations comme l'a déclaré le chef de la diplomatie slovène dont le pays préside l'UE : «Nous allons approfondir nos relations, pour nous élever à un autre niveau, plus efficace et plus fructueux de coopération». L'Union européenne répondait ainsi à une proposition de partenariat renforcé formulée par Israël en novembre 2007. Cette déclaration d'intention aurait suffi au bonheur général des intéressés si les observateurs avisés n'avaient pas remarqué qu'elle était dénuée de tout calendrier d'application. Pire encore, la suite de ce processus de négociation est clairement conditionnée par des développements concrets sur le terrain de la paix et de la négociation entre Israéliens et Palestiniens. Et c'est la commissaire européenne aux Relations extérieures, Benita Ferrero- Waldner, qui s'est porté volontaire pour apporter la précision qui fâche. Elle affirme qu'il était «trop tôt pour parler des détails» de cet approfondissement dont l'évolution devra se faire «en tenant compte des intérêts des deux parties et dans le contexte de la résolution du conflit israélo-palestinien» La diplomatie israélienne a préféré ignorer cette conditionnalité européenne et choisi de ne voir dans la déclaration de l'Union européenne qu'une volonté d'aller de l'avant comme l'a résumé la ministre israélienne des Affaires étrangères Tzipi Livni : «Nous avons décidé d'améliorer nos relations encore plus, dans différents domaines, y compris politique, économique, scientifique, légal, culturel, éducation, antiterrorisme et encore plus». Il n'empêche que la positon de l'UE sur le partenariat spécifique avec Israël a vite donné lieu à d'innombrables interprétations. L'ambiguïté volontaire qui entoure son calendrier, le manque de visibilité à venir de son rythme de développement, auraient été sciemment mis en avant pour adresser un message en direction des pays arabes qui hésitent encore à s'investir dans le projet de l'Union pour la Méditerranée conçu et porté par le président français Nicolas Sarkozy. La diplomatie française qui s'apprêtent à piloter doublement et la présidence de l'Union européenne et le lancement de l'UPM est consciente qu'un des obstacles les plus difficiles à surmonter pour garantir la présence de tous les pays riverains au sommet de Paris touche la très contestable politique israélienne à l'égard des palestiniens. La présence d'Israël au sommet de Paris est l'objet de nombreuses demandes de « clarifications». Lors de nombreuses rencontres et autres forums, cette crainte avait été mise en scène avec une dramatisation plus au moins orchestrée. Le président Nicolas Sarkozy avait tenté, à sa manière, de dégonfler la polémique en affirmant que cette présence ne posait «pas de problème» à des pays arabes comme l'Egypte, la Tunisie et le Maroc. Sans grand succès. De la part des autres pays, emmenés par l'Algérie, la Libye et probablement la Syrie, qui refusent de faire des cadeaux gratuits à Israël et qui conditionnent leur participation au sommet de Paris à ces «clarifications», les craintes ont été renforcées lors de la sixième et sans doute dernière tournée au Proche-Orient de la secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice. De cette tournée, il ressort clairement que l'Etat palestinien promis par George Bush avant la fin 2008 est un vœu pieux, que profitant du changement programmé du locataire de la Maison-Blanche, les Israéliens durcissent leur politique de colonisation des territoires palestiniens qui rend impossible l'établissement d'un Etat palestinien viable et proposent de retirer le statut de Jérusalem du package des négociations avec les Palestiniens. Autant d'indicateurs qui font de l'Union Européenne le seul théâtre où il est encore possible d'exercer une quelconque pression sur Israël dans son refus de composer avec les Palestiniens.