Le rideau s'est fermé sur le Festival du film de Marrakech samedi dernier. Ahmed Boughaba, journaliste et critique du cinéma revient sur les temps forts qui ont marqué ces moments honorifiques du cinéma. Ahmed Boughaba a été directeur de nombreux ciné-clubs marocains dans les années 1970 et a travaillé pour plusieurs publications, radios et télévisions marocaines avant de publier deux ouvrages sur le 7ème art: « Tanger sur l'écran »et « Lecture et analyse des films marocains ». Il a été Président de la commission de sélection pour le Festival du court métrage méditerranéen de Tanger et directeur des Rencontres internationales du film documentaire de Fès. Al Bayane : Comment évaluez-vous la 13e édition du FIFM ? Ahmed Boughaba : Le FIFM est un très grand festival qui est entrain de se marocaniser. Au début, c'était un festival français qui se déroulait au Maroc, mais depuis cinq ou six ans il acquiert sa nationalité marocaine. On a tous constaté que cette année le président du jury de la compétition cinécoles était un marocain, en la personne de Nour-eddine Lakhrimi. Cette année, on a également remarqué avec fierté que la fiche visuelle du festival arborait les couleurs rouge-vert du Maroc. Le changement se fait de manière graduelle et je crois que Noureddine Saïl, président de la fondation du FIFM y contribue énormément, car c'est quelqu'un qui défend le cinéma marocain depuis les années 60. C'est certes un festival international, mais il ne faut tout de même pas oublier la donne marocaine. Je trouve qu'au cours de certaines éditions du festival du film de Marrakech, il y'avait des films magnifiques et d'autres, non. Comment avez-vous trouvé la programmation des films de ce festival ? Parmi les films en compétition, le film espagnol « Wishful thinkers » a retenu mon attention de même que le film américain Médeas et le film italien Ida. J'ai beaucoup apprécié ces films du fait qu'ils rompent avec les méthodes conventionnelles, au niveau du contenu et de la forme, il y'a de la recherche poussée. J'ai des réserves pour quelques films marocains programmés dans les coups de cœur que j'aurai bien aimé qu'ils soient plutôt en compétition. Toutefois, je crois que la direction artistique du festival voulait projeter au public d'ailleurs le cinéma marocain dans sa pluralité : comique, d'auteurs,... Le film du réalisateur marocain Hicham Ayouch « Fièvres » m'a beaucoup touchée. On y trouve de la recherche, on voit le jeune réalisateur qui fait des progrès. Même son premier film « fissures » est le produit d'une recherche approfondie. Au regard des films projetés durant le FIFM, que pensez-vous du cinéma marocain ? Le cinéma marocain est en progrès et ce, grâce à l'Etat. Malheureusement, au Maroc, il n'ya pas de producteurs privés, professionnels. Même les films destinés au grand public sont subventionnés par l'Etat, à travers le CCM, notamment la commission avances et recettes. Certains films réalisés ont un grand succès et d'autres non. Toutefois, je trouve que le cinéma marocain et sur la bonne voie. La nouvelle génération des réalisateurs donnent un véritable coup de main à ce cinéma. Elle casse les méthodes archaïques du cinéma. Malheureusement lorsqu'on regarde les réalisations des cinécoles, on se demande bien si c'est cette génération qui va créer le cinéma marocain. Est-ce que ce sont les étudiants qui ne disposent pas vraiment de compétences ou bien c'est la faute aux encadreurs ? S'ils reproduisent les mêmes erreurs de la compétition cinécoles du FIFM, je crois qu'on va rater le cinéma marocain. On est obligé de faire de nouveau appel aux réalisateurs marocains qui résident en Europe. C'est la génération 1995 en effet qui vient d'Europe qui a donné un plus au cinéma marocain, puisqu'en Occident, il ya plus de professionnalisme.