Entretien avec la comédienne française Marion Cotillard Al Bayane : Que représente le film « public ennemies » pour vous ? Quelles sont vos impressions ce soir par rapport à sa projection au Djemââ El Fna ? Marion Cotillard : «Public ennemies» compte beaucoup pour moi, car c'est le premier film que j'ai tourné avec un réalisateur américain. Ma rencontre avec Johnny Depp a été fabuleuse. C'est un très grand acteur, une très grande personne. Le rôle que j'ai joué dans ce film était complexe pour moi, car je devais avoir un accent parfait en anglais. Donc il y'avait un gros challenge, mais il m'a toujours soutenue. La première fois que j'étais venue au Maroc, je n'aurais jamais pu imaginer que je serai revenue au Djema El Fna, partager un film avec le public marocain. C'est très émouvant pour moi d'être là ce soir. C'est une chose émouvante de partager le cinéma, surtout dans un pays où ce n'est pas vraiment dans la culture des gens de se rendre dans une salle de cinéma. A-t-il été complexe pour vous de jouer un rôle dans une culture distincte de la vôtre ? J'ai eu la chance jusqu'à présent de tourner dans différentes cultures. J'aime explorer d'autres cultures. Forcément, on rencontre des choses complexes, mais le tout dépend de la capacité à pouvoir se pencher dans une autre culture, dans une autre manière de penser, dans une autre manière de voir les choses. La complexité compte peu, ce qui reste et importe le plus c'est l'enrichissement. Que représente pour vous le fait de faire partie des membres du jury de cette 13ème édition du FIFM, surtout aux côtés d'un vétéran du cinéma comme Martin Scorsese ? J'étais déjà venu au jury des courts métrages en 2000. Je ne sais pas si mon retour dans le jury de cette 13ème édition du festival est une réponse à ce passage en 2000. En effet, pour un festival, parler du cinéma avec Martin Scorsese, on ne peut rêver mieux. Le jury qu'il a constitué est un véritable milieu de travail, constitué d'acteurs de renom. C'est un moment rare, un moment vraiment unique en son genre d'être avec lui dans ce jury. Bio-express Marion Cotillard est une comédienne française. Elle débute sa carrière dans des séries comme Highlander. En 1994, elle joue dans « l'histoire du garçon qui voulait qu'on l'embrasse » de Philippe Harel. En 2004, son rôle de Tina Lombardi dans Un long dimanche de fiançailles de Jean-Pierre Jeunet lui permet de décrocher le César de la meilleure actrice dans un second rôle. En 2007, elle tient le rôle d'Edith Piaf dans le film d'Olivier Dahan, La Vie en Rose (La Môme). Ce qui lui permet en 2008 d'obtenir, César, un Golden Globe, un BAFTA et un Oscar. Elle entame une carrière hollywoodienne en 2009 avec le film Public Enemies, de Michael Mann, où elle partage l'affiche avec Johnny Depp. En 2000, elle fait partie du jury des courts métrages au festival international du film de Marrakech. **** Entretien avec Said Almazouari Le cinéma marocain est très marqué par sa diversité Al Bayane : Quelles sont vos impressions générales par rapport au festival ? Saïd Almazouari : C'est la 6e année consécutive que je couvre le FIFM. Comme les années précédentes, c'est une merveilleuse occasion pour rencontrer des acteurs, des amis, journalistes et nouer de nouveaux liens avec les intervenants, les réalisateurs. C'est l'occasion également de regarder de bons films, car la sélection du festival privilégie des films que l'on ne rencontre pas souvent dans d'autres manifestations. Il y a également des sections parallèles très intéressantes, notamment les masterclass qui sont le cœur du festival de Marrakech et permettent chaque année aux cinéphiles de découvrir un nouvel acteur ou réalisateur de renom qui a marqué le paysage cinématographique mondial au cours des dernières années ou un tenant, un grand nom qui est déjà consacré comme référence cinématographique. La section hommage permet également de célébrer une cinématographie mondiale marquante et nous permet de redécouvrir des chefs d'œuvre. Quel évènement vous a marqué le plus depuis le début du festival ? C'est le masterclass de James Gray que j'ai beaucoup apprécié, dans la mesure où le réalisateur américain a été sincère. On pouvait se rendre compte dans son intervention qu'il avait le désir et la volonté de partager son expérience avec le public. C'est d'ailleurs pourquoi il a demandé que le temps soit prolongé à cet égard. Les idées qu'il a évoquées dans sa manière de faire du cinéma, sa vision du cinéma américain ont également marqué les esprits. Plusieurs films ont été projetés. Lesquels ont particulièrement retenu votre attention ? Concernant les films en compétition, trois d'entre eux m'ont marqué. Le film espagnol «The Wishful thinkers » projeté tout au début du festival m'a particulièrement interessé, car ce film est axé sur une réflexion sur le cinéma par le cinéma, et par ricochet, une réflexion sur la vie à travers un esthétisme basé sur le ludisme. Le 2e film «Médéas» basé sur l'économie de récit croisé avec un esthétisme très ascétique a donné un résultat très intéressant sur le plan de la gestion du temps, les cadrages de même que le film coréen « Han Gong-Ju » qui a rompu avec l'ordre chronologique de déroulement des évènements. Le film cubain «The Swimming pool» est très particulier dans sa gestion de l'espace. Le réalisateur a traité la piscine comme un huis-clos à ciel ouvert. Cette gestion de l'espace a eu une incidence sur la gestion du temps qui est devenu fluide et ne tenait qu' en 24 heures. Le film sortait du cadre conventionnel et a suscité des réactions positives du public. Ce qui est un point positif dans la mesure où le cinéma n'est pas fait pour laisser indifférent le public. Dans le cadre de l'hommage au cinéma scandinave, deux films ont retenu mon attention, notamment de Rooyal Anderson qui est un véritable chef-d'œuvre. Par ailleurs, j'ai eu tout le plaisir à revoir la « passion de Jeanne d'arc ». C'était un véritable retour aux sources. Un mot sur le cinéma marocain ? Le cinéma marocain d'après moi commence déjà à se tracer une voie claire, irréversible qui consiste à maintenir le cap sur la production des films. C'est un aspect très important de nos jours pour les cinématographies mondiales, mais pour lequel les cinématographies africaines et arabes ont sombré. Il faut faire émerger maintenant des courants, des critiques qui peuvent donner au cinéma marocain une présence plus marquée au niveau des cinématographies mondiales. Le cinéma marocain est très marqué par sa diversité, son esthétique, ses thématiques très révélatrices sur le plan social, son cinéma d'auteur qui est présent à ce festival et qui est très apprécié au Maroc et même à l'étranger avec des réalisateurs, à l'instar de Hicham Ayouch dont les films ont été projetés au cours de ce festival, Mohammed Moustakir, et d'autres ténors du cinéma qui continuent par leurs efforts à nourrir les écrans marocains par leurs films.