Si le retour de la «vague rouge» au pouvoir au Pérou et en Bolivie a été sanctionné par un rétablissement des relations avec la «RASD», le Maroc espère toujours que l'Uruguay de Luis Lacalle Pou (centre droit) et l'Equateur de Lenin Moreno rompent avec le Polisario. Les rétablissements des relations du Pérou et de la Bolivie avec la «République arabe sahraouie démocratique (RASD)» interviennent à un moment opportun pour le Polisario. Alors que la 76e session de l'Assemblée générale des Nations unies ouvrira son débat général le 21 septembre, le Conseil de sécurité adoptera, vers la fin d'octobre, une nouvelle résolution sur la question du Sahara occidental. Six semaines capitales pour le mouvement de Brahim Ghali pour renouer le dialogue avec ses anciens et nouveaux alliés en Amérique latine. Son représentant à New York, Sidi Mohamed Omar, a déjà ouvert le bal via une réunion, tenue le 14 septembre au siège de l'ONU, avec le ministre cubain des Affaires étrangères, Bruno Rodriguez. Ces nouvelles reconnaissances de la «RASD» étaient prévisibles, notamment après le retour de la «vague rouge» au pouvoir au Pérou et en Bolivie. Le Chili pourrait bien être le prochain sur la liste, surtout si la coalition gauche-communiste parvient à remporter les élections présidentielles de novembre prochain. La «Guerre froide» dicte encore sa loi en Amérique latine En revanche, le changement de locataire au palais présidentiel en Uruguay, depuis mars 2020, ne s'est pas automatiquement traduit par un retrait ou une suspension des relations avec la «RASD» par le chef de l'Etat, Luis Lacalle Pou. Une décision qui avait été actée le 26 décembre 2005 et qui avait coïncidé avec l'arrivée au pouvoir de la coalition du gauche «Frente Amplio» (Front élargi), le 31 octobre 2004. A la cérémonie d'investiture de Luis Lacalle, le Maroc était représenté par le président de la Chambre des conseillers, Habib Benchamach. A cette occasion, le président de la République a exprimé à son invité marocain «sa volonté de hisser les relations à un niveau meilleur». Depuis, les officiels marocains attendent un geste de la part du n°1 de l'Uruguay, de centre droit, en marquant une rupture avec la ligne politique suivie par la gauche sur le dossier du Sahara ces dernières années. L'Equateur de Lenin Moreno tarde aussi à tourner la page de la reconnaissance de la «RASD». Même si le président s'est inscrit, depuis son investiture le 24 mai 2017, à liquider l'héritage de son prédécesseur et «ami», Raphael Correa (2007-2017), il n'a toujours pas procédé à la révision des relations avec le Polisario. Le virage à droite pris par Moreno avait inquiété la direction du Front. Elle avait d'ailleurs dépêché en juillet 2019 à Quito, son «ministre délégué auprès de l'Amérique latine», Omar Mansour pour rencontrer le président du Parlement équatorien, César Litardo Caicedo. Force est de constater qu'en Amérique latine, l'établissement ou la suspension de liens avec la «RASD» obéit aux aléas de la politique. Après l'offensive menée par l'ancien Premier ministre Abderrahman El Youssoufi au début des années 2000 en Amérique latine, le Costa Rica, la République dominicaine, le Honduras, le Salvador, le Nicaragua, le Paraguay et la Colombie avaient retiré leurs reconnaissances de la «RASD». Un succès qui a duré quelques années, avant qu'il ne soit enterré avec la reprise du pouvoir par les forces de gauche dans ces pays. Ainsi, en janvier 2007, après le retour de Daniel Ortega à la présidence du Nicaragua, il avait immédiatement rétabli ses relations avec la «RASD». Parfois, le changement de président dans cette région sourit au Maroc. Le Salvador en est d'ailleurs un exemple éloquent. Quelques jours après son investiture en 2019, Nayib Bukele a retiré la reconnaissance de la «RASD». En Amérique latine, ce sont les décennies de «Guerre froide» qui continuent de dicter la politique étrangère des Etats. Sur la question du Sahara, les positions se font et se défont en fonction de la couleur politique des présidents. En revanche, l'Afrique est en cours de s'affranchir progressivement de l'emprise de cette époque. D'anciens pays du bloc communiste reconnaissent la marocanité du Sahara, telle la Zambie sous la présidence d'Edgar Lungu (de gauche), alors que d'autres prennent leurs distances avec le Polisario, à l'instar de l'Angola.