L'association déplore la rareté mais aussi l'état des toilettes publiques existantes au Maroc. La journée mondiale des Toilettes est une occasion de réitérer cet appel, notamment dans le contexte de la pandémie. - La journée mondiale des Toilettes, consacrée par l'ONU, est célébrée le 19 novembre de chaque année. Participe-t-elle réellement à la sensibilisation des populations ? - Beaucoup de personnes ne savent pas que cette journée existe. Le sujet des toilettes est encore tabou chez les Marocains. Cette journée mondiale fait partie des 17 Objectifs de Développement Durable (ODD), qui doivent être atteints d'ici 2030, plus précisément de l'objectif 6 relatif à l'accès à l'eau salubre et à l'assainissement. C'est donc une journée pour sensibiliser les citoyens sur l'importance des toilettes, au moment où beaucoup de personnes font leurs besoins en plein air. Au niveau de notre association, nous plaidons en faveur de l'installation des toilettes publiques et participons à la sensibilisation des gens sur l'importance de la maintenance de ces toilettes. - Les toilettes sont-elles un vrai enjeu de santé publique ? - Les toilettes sont d'abord un enjeu pour la santé de l'être humain. Nombreuses sont les maladies transmises dans ce milieu clos. En plus de la typhoïde, du choléra, de l'hépatite et de toutes les maladies urinaires, on s'est rendu compte que la Covid-19 peut également y être transmise. Il y a donc un problème de santé, d'environnement, de pollution de la nappe phréatique de notre pays et de toute la planète. Comme vous le savez, l'eau est devenue de plus en plus rare et de plus en plus polluée. De plus, les touristes se plaignent de la carence des toilettes publiques, ou de leur état déplorable. C'est également un problème de dignité et de droits de l'Homme. Il est inadmissible qu'on ne trouve pas des toilettes qui soient propres, entretenues et sécurisées. - Dans quelle mesure la construction des toilettes publiques peutelle participer à la réduction du chômage ? - On peut effectivement lutter contre le chômage en créant des opportunités d'emploi, dont les tâches ne sont pas limitées seulement au secteur de la sécurité ou du nettoyage. Il s'agit de toute une chaîne qui commence de la construction jusqu'à l'installation de toilettes, puis le recyclage des déchets organiques en agriculture biologique. Ainsi, on aura besoin d'ingénieurs, de chimistes, de biologistes, de plombiers, de peintres... - Sur le plan national, quel bilan faites-vous sur l'état des toilettes publiques ? - Alors là, c'est bien triste ! Elles sont soit inexistantes, soit dans un état qui n'est pas digne de notre pays. Mais heureusement, depuis trois ans que nous militons dans ce champ, nous voyons beaucoup d'améliorations. Nous trouvons que les toilettes des aéroports, par exemple, sont plus propres et mieux entretenues. Casablanca a décidé de construire plus de 100 toilettes publiques, ce qui est fort appréciable. J'espère que d'autres villes s'y impliquent également. - La construction de toilettes aux normes internationales estelle possible au Maroc ou est-ce qu'on dépend toujours de l'import ? - Beaucoup de personnes pensent que c'est très cher. Il y a différents types de toilettes publiques, automatiques, solaires, sèches... On peut installer des toilettes adaptées à l'environnement et à la culture de chaque région du Royaume. Malheureusement, au niveau de notre association EWA, nous n'avons ni les compétences ni la technicité pour les construire, mais je suis persuadée qu'on peut en trouver à tous les prix. Nous avons vu qu'il y a des jeunes qui font des choses extraordinaires, en témoigne la période de confinement. Je pense que nous sommes capables d'en construire pour notre pays et pour toute l'Afrique, qui souffre également de ce problème. Je suis sûre que nos jeunes pourront créer même de nouvelles toilettes avec des nouvelles technologies. Il suffit de leur donner les moyens. Le problème chez nous est que tout le monde est responsable et personne ne l'est vraiment. Recueillis par Safaa KSAANI Portrait Discrète et sobre, mais influente sur la scène diplomatique et associative Lauréate de Droit public à l'Université de Bordeaux, en 1973, Farida Jaïdi a débuté sa carrière à l'ambassade du Maroc à Rome en 1975 en tant que Secrétaire des Affaires étrangères jusqu'en 1983. Elle a occupé le poste de Représentant Permanent Adjoint auprès de la FAO (Organisation des Nations-unies pour l'Alimentation et l'Agriculture) entre 1976 et 1982. La jeune diplomate retourne au bercail pour assurer la mission de Conseillère au ministère des Affaires étrangères et de la Coopération à Rabat. Farida Jaïdi devient ensuite Chef de Service chargé de l'Assemblée Générale de l'ONU et du Conseil de Sécurité. En 1991, elle est nommée ministre plénipotentiaire et occupe plusieurs postes de responsabilité : Chef de Service des Conférences et Organisations internationales ainsi que Chef de Division de la Coopération Economique Internationale et Régionale. En 1995, elle est propulsée à la position de Directrice de la Coopération multilatérale. Quatre ans plus tard, elle hérite du prestigieux poste de Consule générale du Maroc à Montréal puis à Stockholm, avant d'atterrir au Brésil, au Suriname et au Paraguay de février 2006 jusqu'au janvier 2009. Elle devient ensuite Conseillère du Ministre des AEC et représentante personnelle du Premier ministre à l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF). Des expériences qu'elle a pu exploiter pour devenir, depuis 2011, formatrice, consultante, et master en coaching diplomatique. Depuis 2016, elle est présidente de l'association Environmental Women Association (EWA), association à but non lucratif, apolitique et ouverte à tous, qui œuvre à la sensibilisation, à l'implication des citoyens et des pouvoirs publics à la nécessité de promouvoir l'hygiène, la propreté et le civisme. Des valeurs qu'elle a connues et vécues sous d'autres cieux. S. K. Repères Eau propre et assainissement Alors que des progrès substantiels ont été accomplis pour augmenter les services d'approvisionnement en eau potable et d'assainissement, des milliards de personnes, principalement dans les zones rurales, n'ont toujours pas accès à ces services de base. Dans le monde, une personne sur trois ne bénéficie pas d'une eau potable gérée en toute sécurité, deux personnes sur cinq ne disposent pas d'une installation de base pour se laver les mains avec de l'eau et du savon, et plus de 673 millions de personnes pratiquent encore la défécation à l'air libre, selon l'ONU. L'importance de l'assainissement démontrée par la Covid-19 Selon l'Organisation Mondiale de la Santé, se laver les mains est l'une des meilleures façons d'empêcher la propagation de maladies et de prévenir les infections, y compris le virus de la Covid-19. Pourtant, des milliards de personnes n'ont toujours pas accès à un système d'assainissement et d'eau potable. L'UNICEF lance un appel urgent de fonds et de soutien afin de mettre à la disposition d'un plus grand nombre de filles et de garçons des installations élémentaires d'approvisionnement en eau.