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TikTok : Mortels défis
Publié dans L'observateur du Maroc le 17 - 02 - 2025

Une nouvelle victime des challenges Tik Tok a trouvé la mort à Tanger, le week end dernier. Brûlé puis noyé, un jeune TikTokeur marocain a tragiquement disparu après avoir tenté un défi hautement dangereux sur la plage de Souani, dans la zone de Merkala à Tanger. Pour réaliser une vidéo Tik Tok, il a mis le feu à ses vêtements avant de se jeter à la mer pour éteindre les flammes. Malheureusement, les courants marins l'ont emporté.
Jouer avec le feu
Triste fin pour cet énième challenger Tik Tok. Un défi qui s'inscrit dans une série de défis dangereux circulant sur la plateforme chinoise où les utilisateurs se mettent en scène dans des situations périlleuses pour récolter les vues et les cadeaux. À mesure que le nombre de "likers" et des followers augmentent, l'esprit du tiktokeur s'enflamme et le pousse à reposser le plus loin possible ses limites en bravant sa peur.
Se faire brûler, ingurgiter le maximum de paracétamol et voir qui restera le plus longtemps à l'hôpital, pratiquer la « Superman dance », se jeter d'un yacht en marche, boire une énorme quantité d'alcool en une courte durée... Au delà de « l'absurdité » de ces défis, c'est leur côté dangereux qui interpelle. Pourquoi les tiktokeurs risquent-ils donc leur vie de cette manière ? Quel mécanisme psychosocial déclenche un tel comportement ? Et quel plaisir, pour le public, à regarder une personne s'exposer au danger et risquer sa vie ?
Délire collectif
« C'est ce qu'on appelle l'influence de masse qui finit par banaliser l'acte. Le fait qu'une multitude de personnes et d'influenceurs pratique un challenge donné, cela le banalise, le rend beaucoup moins "dangereux" à leurs yeux et réduit gravement le degré de prudence. Nous sommes carrément en présence d'un délire collectif car l'acte, qu'importe le degré de sa gravité, devient banal et faisable», explique à L'Observateur du Maroc et d'Afrique Dr Saâd Oukili Idrissi, psychiatre et addictologue.
Un délire collectif et même planétaire dont les résultats sont visibles sur la plateforme chinoise qui diffuse chaque jour des milliers voire des millions de « challenges ». Des vidéos à profusion qui « donnent envie » aux tiktokeurs en quête de sensations fortes, mais surtout d'applaudissements et de cadeaux de la part de leur public.
Effet foule
Mais est-ce normal docteur de risquer sa vie juste pour un like ou même un cadeau aussi importante que puisse être sa valeur matérielle ? « Dans ce cas de figure, l'individu est soumis au pouvoir de la foule, l'avis commun. Si une personne vous dit qu'une vache peut voler, vous n'allez pas la croire. Mais si tout le Maroc vous l'affirme, vous finirez par y croire. C'est justement ce qui arrive face aux challenges dangereux relevés à répétition par autrui sous les applaudissements de la foule virtuelle », analyse le psychiatre.
Le public complice et coupable
Mais au-delà de l'effet « imitation aveugle », le spécialiste note ce besoin de « paraitre », de se distinguer, un besoin de reconnaissance. « Ce fort besoin de reconnaissance est d'autant plus dangereux car doublé d'une certaine inconscience par rapport aux conséquences réelles des challenges. Les tiktokeurs se projettent dans le résultat qu'ils imaginent toujours positifs et oublient le risque et sa véritable ampleur pour leur sécurité et leur vie », note Dr Oukili Idrissi.
Public « coupable »
« Aveuglés » par le besoin de reconnaissance et alléchés par les gains qui en résultent, les tiktokeurs seraient essentiellement motivés par les dividendes de la popularité. Mais qu'en est-il du public ? Des followers qui apprécient « le spectacle », qui suivent les challenges et peuvent assister, en direct, à la mort de leur tiktokeur préféré. Une sorte de complicité « malsaine » ou un voyeurisme coupable ?
« La foule se nourrit des malheurs des autres en prenant exemple et en sa rassurant par rapport à sa propre « sagesse ». Elle se sert aussi des expériences des tiktokeurs et les considèrent comme des sujets-test », explique le thérapeute. D'après ce dernier, l'âme humaine a cette tendance à « faire du mal » et à être dans la méchanceté envers l'autre. « Qu'est ce qui nous arrête en tant qu'êtres humains pour ne pas faire du mal à autrui ? C'est le surmoi représenté par société, la tradition, les mœurs, l'éthique, la loi, la religion. Lorsqu'une communauté passe outre tous ces paramètres et qu'elle se sent hors portée de toute supervision sociétale, éthique ou légale, la cruauté humaine fait surface », tranche Dr Oukili Idrissi.
Ecrans désensibilisants
Une cruauté « naturelle » à laquelle la foule peut participer volontiers, encouragée par l'aspect collectif et « impuni ». « Pire encore, ces challenges et la popularité de ce type de spectacle dévoilent un malaise psychosocial profond. Ils démontrent que nous sommes en train d'assister à une dégradation profonde de la valeur de l'individu et des valeurs humaines », déplore le spécialiste.
Décryptage ? Le psychiatre estime en effet que les écrans ont fini par tout « virtualiser » et par conséquent tout banaliser, « même la souffrance et la mort. Car au final, on se dit que c'est juste du show. Or, il s'agit bien de personnes réelles qui se mettent vraiment en danger. Mais derrière un écran, personne ne se sens blâmable et personne ne senst obligé de porter assistance à son vis-à-vis qui est réellement en danger ! » conclut-il.
Entretien
«Les tiktokeurs croient pouvoir contrôler le danger»
Dr. Mustapha Chagdali, psychosociologue, co-auteur du livre « La société et le virtuel »
Pr Mustapha Chagdali, psychosociologue
Les tiktokeurs qui se livrent aux challenges périlleux vivent dans l'illusion du contrôle du danger. Manipulés par les algorithmes du réseau social, ils servent à accrocher et fidéliser les utilisateurs au risque d' y laisser la vie. Analyse du psychologue social Mustapha Chagdali.
L'Observateur du Maroc et d'Afrique : Les tiktokeurs se livrent volontiers à des challenges dangereux en risquant leur vie et leur sécurité. Quelle pourrait être leur motivation ? Comment expliquer un tel phénomène ?
Dr. Mustapha Chagdali : Pour comprendre un tel comportement suicidaire inhérent aux challenges dangereux dont l'objectif est de les poster sur l'interface numérique TikTok, il faut d'abord saisir le sens de ce qu'on appelle en Cyberpsychologie « la socialisation algorithmique » subie par les jeunes naviguant à outrance sur les réseaux sociaux. Cette socialisation exerce une forte influence numérique sur la perception des jeunes navigateurs quant au principe de la réalité. De ce fait, le danger pour les Tiktokeurs n'est pas « visible ». Seuls leurs actes filmés, qu'ils souhaitent exposer aux autres sur la plateforme numérique, comptent.
La motivation d'un tel acte hautement risqué relève de ce qu'on appelle « Un sentiment intra-individuel ». Un sentiment témoignant d'une forme d'illusion du contrôle du danger. Cette motivation trouve aussi ses origines dans la « logique » des plateformes numériques incitant ses usagers à la mise en visibilité des actes non familiers.
La course aux likes et à la popularité peut-elle surpasser l'instinct de conservation si fort, en principel, chez l'être humain ?
La course aux likes sur les réseaux sociaux peut expliquer le désir d'être visible et reconnu sur les écrans numériques. L'instinct de conservation n'est plus de mise quand on atteint un degré très élevé d'influence cybernétique. En fait, à l'ère du numérique, la plupart des usagers de ces réseaux pratiquent l'extimité pour se montrer et se forger une identité numérique agissante qui n'a rien à voir avec le principe de la réalité. Sur l'espace numérique, il y a une autre « réalité » basée sur la technologie transformant le réel on lui donnant une forme virtuelle.
Ces tiktokeurs seraient-ils atteints de troubles psychiques ? Qu'en est-il du public qui apprécie et encourage ces actes « suicidaires » à force de likes et de récompenses ?
En fait, beaucoup de Tik tokeurs pensent qu'ils utilisent Tik Tok, mais la réalité c'est que c'est Tik Tok qui les utilise... Par des paramètres et des logiciels conçus pour cet effet. C'est ce que j'ai appelé dans mon dernier livre « La gouvernementalité algorithmique » qui manipule les usagers du cyberespace et les guide tacitement vers ses objectifs dissimulés.
Quant au public qui encourage ses actes suicidaires, il fait partie de la logique de ses plateformes numériques incitant ses usagers à suivre l'insolite, le danger et le futile. Ce qui compte pour ces réseaux, c'est l'excitation de la foule pour suivre de tels actes et le maintien de son intérêt.


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