Le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, a utilisé ses médias officiels en donnant ses fameuses interviews préfabriquées pour s'adresser à la France. Après avoir joué le bras de fer, c'est le bras tordu que le chef d'Etat a tenté de se rapprocher de Paris en invoquant ses relations privilégiées avec son homologue français, Emmanuel Macron. Un virage à 180 degrés, après seulement quelques mois de crise diplomatique, qui révèle l'incapacité évidente du régime militaire algérien à tenir tête à Paris. Le rétropédalage du président Tebboune, est synonyme de l'effondrement de la diplomatie algérienne. Le 25 juillet dernier, l'Algérie bombait le torse, insultait le Maroc et la France et menaçait ouvertement Paris suite à sa décision d'appuyer la proposition d'autonomie marocaine au Sahara dans un soutien clair à la souveraineté du Maroc sur ledit territoire. « Le gouvernement algérien tirera toutes les conséquences qui découlent de cette décision française et dont le Gouvernement français assume seul la pleine et entière responsabilité », annonçait un communiqué de ministère des Affaires étrangères algérien qui a dit avoir reçu de la part de Paris des informations faisant étant de son intention de soutenir plus activement le Maroc dans le dossier du Sahara. Alger avait dit avoir pris connaissance avec un « grand regret » et une « profonde désapprobation » de cette décision jugée « inattendue, inopportune et contre-productive » de la France avec son soutien « sans équivoque et sans nuance » au plan d'autonomie sur le Sahara dans le cadre de la souveraineté marocaine. Dans un langage ordurier, indigne des us et coutumes diplomatiques, ciblant aussi bien la France que le Maroc, le gouvernement algérien a traité les deux pays de « puissances coloniales, anciennes et nouvelles » qui « savent se reconnaître » et se rendre des mains secourables. Depuis, la crise entre la France et l'Algérie s'est vue agrémentée de plusieurs événements dont les principaux sujets ayant fait culminer la tension : le dossier des expulsions d'Algériens en situation irrégulière, l'emprisonnement en Algérie de l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal pour ses déclarations faisant état des réelles frontières marocaines. L'Algérie, par ses canaux officiels, à savoir son ministère des Affaires étrangères, n'a pas arrêté de réagir aux actualités françaises et marocaines, notamment sur le dossier du Sahara même si Alger prétend ne pas être partie au conflit et n'être qu'un observateur. Cela s'est manifesté lors de la visite de la ministre française de la Culture, Rachida Dati, aux provinces du sud marocaines le 17 février. La venue de la ministre est « d'une gravité particulière » et est « condamnable à plus d'un titre », a tancé la diplomatie algérienne. Elle va plus loin en ajoutant que la visite « renvoie l'image détestable d'une ancienne puissance coloniale solidaire d'une nouvelle » et « le gouvernement français se disqualifie davantage et s'isole par rapport à l'action des Nations unies ». Une posture vacillante vis à vis d'Emmanuel Macron Avant son sketch télévisé pour envoyer des messages au président Macron, le président algérien, avait donné une interview au média français l'Opinion, dans laquelle il taclait son homologue français. « Nous perdons du temps avec le président Macron », avait-t-il déclaré, en affirmant que la relation de l'Algérie avec la France risquait d'atteindre un point de non-retour. Sur la question du Sahara, Tebboune a dit avoir prévenu Macron en marge du sommet du G7 à Bari le 13 juin dernier, en mettant la relation entre la France et l'Algérie sur la balance: « Il m'a alors annoncé qu'il allait faire un geste pour reconnaître la marocanité du Sahara occidental, ce que nous savions déjà. Je l'ai alors prévenu +Vous faites une grave erreur! Vous n'allez rien gagner et vous allez nous perdre+ ». Mais alors, que vaut ce nouveau virage du président algérien qui dit cette fois, 8 mois plus tard, qu'Emmanuel Macron est son « unique point de repère », occultant les déclarations virulentes des ministres du gouvernement français. « Emmanuel Macron est mon alter ego, on a eu des moments de sirocco, des moments de froid, mais c'est avec lui que je travaille », a rétropédalé Tebboune, voulant désormais calmer le jeu après avoir fait monter la pression pendant des mois, utilisé un langage ordurier, méprisant, et en procédant au rappel de son ambassadeur à Paris. « Nous, on garde comme unique point de repère le président Macron... Il y a eu un moment d'incompréhension, mais il reste le président français et tous les problèmes doivent se régler avec lui ou avec la personne qu'il délègue », a-t-il ajouté, avouant sans le dire avoir perdu la bataille, comme l'Algérie s'est résolue à faire après ses provocations envers l'Espagne pour les mêmes raisons, son appui au Maroc dans le dossier du Sahara. Ce jeu, mené contre l'Espagne et la France, bien qu'il ait duré plusieurs mois, semble se terminer une fois de plus par la capitulation de l'Algérie. Avec l'Espagne, le régime algérien avait procédé au retour de son ambassadeur et la reprise des échanges économiques, sous prétexte que Madrid aurait changé de position, selon les mensonges éhontés du ministre algérien des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, à la presse. Sauf qu'il n'en est rien. Pourquoi un rétropédalage? Etonnement, le président algérien a également changé de discours après les nombreuses attaques contre Paris et Rabat, en affirmant ne pas avoir de problème au sujet de l'amitié entre la France et le Maroc. Ce changement radical trahit des problèmes profonds de politique et de lignes directrices chez l'Algérie, un pays de contradictions, qui change de positions au gré des saisons, sauf pour le Sahara qu'elle continue de réclamer par le biais des séparatistes du polisario. S'il n'y avait pas des intérêts personnels de la plus grande importance pour la junte militaire algérienne en France, le discours aurait été différent. Les intérêts personnels, familiaux et économiques de la classe dirigeante algérienne en France se voyant menacés, c'est Tebboune qu'on envoie tenter la réconciliation après plusieurs mois d'attaques signées Alger. Ce n'est pas tant les droits des sans-papiers qui inquiète le régime algérien qui utilise ces personnes frappées d'obligations de quitter le territoire français comme outil de pression. Dans sa logique de pression face à Paris, ils sont les meilleurs moyens que l'Algérie a trouvé pour compliquer la tâche au gouvernement français qui en a fait une fixation. Au coeur des peurs du régime algérien se trouvent, les mesures de restrictions de Visas qui touchent au lieu des simples gens, la nomenklatura algérienne, composée de dignitaires, ministres, militaires, proches du régime militaire, de leurs familles, d'oligarques et autres personnes détenant des passeports diplomatiques distribués à profusion par le régime algérien. Cette suppression de ces passe-droits distribués généreusement aux membres du cercle élargi du pouvoir et qui en profitaient, car n'ayant pas à demander de Visa, a été le point fatal pour le régime algérien qui avait la possibilité, grâce à cet accord bilatéral, de faire des affaires, acheter des biens luxueux en plein cœur de Paris, installer les membres de leurs familles, ou encore se soigner en France. Il s'agirait aussi, selon Sahel Intelligence, d'une enquête concernant les biens de responsables algériens en France, notamment pour déceler s'ils ont été mal acquis, à travers du blanchiment d'argent entre autres. « Plusieurs figures influentes du gouvernement algérien, ainsi que des hauts responsables militaires et civils, sont actuellement sous enquête pour enrichissement illicite, avec des actifs et des propriétés en France qui font l'objet d'investigations », indique la même source. Au-delà des changements de discours et des manœuvres diplomatiques, la réalité reste inchangée: l'Algérie semble piégée dans un jeu de postures où ses ambitions sur le Sahara et ses intérêts personnels se heurtent à des réalités géopolitiques et économiques plus puissantes. La volte-face du président algérien, dévoile la vulnérabilité d'un régime plus soucieux de ses privilèges que de son rôle sur la scène internationale, et traduit les failles d'une diplomatie chancelante. Un régime fragile qui n'a pas les épaules pour soutenir ses menaces et qui courbe l'échine dès que les intérêts des militaires sont menacés.