Le Chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane, s'est qualifié de « juste, mais strict » en décrivant sa gestion des questions de politique générale. A la séance mensuelle de la Chambre des représentants, il a reconnu que les acquis coûtent très chers. Abdelilah Benkirane, le Chef du gouvernement. Plus de grèves, plus de manifestations, plus de violences. L'opposition dresse un constat « décevant » face à ce qu'elle appelle « le recul des libertés et des droits », accusant le gouvernement d'attiser la colère sociale et syndicale. « Êtes-vous satisfait des violences quotidiennes au point de vous épargner le souci de chercher des solutions à cette implosion ? », lance Mohamed Hanine, député du RNI, au Chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane. Interpelé, vendredi, par les députés de l'opposition à la séance des questions de politique générale à la Chambre des représentants, Benkirane a fait l'objet de critiques acerbes qui l'ont clairement irrité. « Quoi que je fasse, personne n'est content. Je ne sais plus ce que vous voulez ! » s'exclame-t-il, suscitant des éclats de rires. Culture des droits de l'Homme Abdelilah Benkirane ne se sert pas des rapports internationaux pour déterminer le baromètre de la situation des droits de l'Homme au Maroc. Il est convaincu, chiffre à l'appui, que les libertés ont connu, contrairement à ce que prétend l'opposition, un épanouissement depuis l'avènement de son gouvernement. « Le droit de manifester s'exerce en toute liberté et la dispersion des manifestants est ordonnée uniquement lorsque ces derniers troublent la circulation ou menacent l'ordre public. Cette année, et jusqu'au mois d'octobre, ce sont 17 184 manifestations qui ont été observées dans les lieux publics avec la participation de plus de 921 000 personnes », tient-il à préciser, rappelant que le respect des droits de l'Homme est « un choix irréversible » pour le Maroc. « Le but de nos efforts est avant tout de permettre au citoyen de bénéficier de ses droits et de ses libertés, mais aussi d'exercer sa citoyenneté en préservant sa dignité », insiste-t-il. De cette conviction dépend étroitement l'image du Maroc autant que la confiance de ses partenaires étrangers. « Nous avons décidé, ce vendredi, à l'occasion de la réunion du comité national pour l'amélioration du climat des affaires, de constituer un comité pour assurer le suivi de l'image du Maroc dans les différents rapports afin de la promouvoir », annonce Benkirane. Les règles de l'équilibre Le Chef du gouvernement décrit une mission périlleuse où il est appelé à jouer « l'équilibriste » dans un espace marqué de déséquilibres. « Il y a un phénomène assez étrange dans notre pays : les manifestations se terminent toujours par plus de victimes dans le rang de la sûreté nationale que dans celui des manifestants », affirme-t-il, saluant le dévouement des agents de la police dans le maintien de la stabilité. « Lorsque ces derniers sont appelés à disperser une manifestation, ils le font à contre cœur, mais l'autre partie doit comprendre qu'il y a des règles à respecter », martèle Benkirane. « Comprendre les règles », c'est la recette du chef du gouvernement pour préserver la liberté des débordements dont l'un des principaux reste, à ses yeux, le gel des activités par des grèves payées. «Nous sommes unanimes au sein du gouvernement : il est inadmissible que les grèves soient payées. Désolé, c'est impossible ! », s'insurge Benkirane, affirmant que la décision des prélèvements sur salaire n'épargne aucun secteur ni syndicat quel que soit son appartenance (allusion à l'UNTM que dirige le PJDiste Mohamed Yatim). « Nous ne reviendrons jamais sur cette décision même si le gouvernement venait à être dissout », prévient-il d'un ton virulent. Le Chef du gouvernement veut ainsi concrétiser l'équité sociale et ne récompenser que le travail productif. Tous les mêmes Pour accomplir cette mission, Benkirane reconnaît qu'il y a un prix à payer, celui de la cohésion sociale. Interpellé sur l'emploi des diplômés chômeurs et plus particulièrement les signataires de l'accord du 20 juillet 2011, il n'y a qu'une seule et même alternative pour tous : le concours. « Les signataires du PV se sont vu interdire l'accès direct à la fonction publique ainsi que la catégorie des 4 300 qui les a précédé. Et si vous voulez connaître mon avis, je suis contre toute intégration directe à la fonction publique. Tout le monde doit passer par le concours, mais il n'est pas question d'utiliser les postes budgétaires du projet de loi de finances 2013 », tranche le chef du gouvernement. Déterminé, c'est une action graduelle et une concession citoyenne que compte le plus Benkirane afin d'atteindre ses objectifs. « Pourquoi m'avez-vous contraint à baisser le taux des contributions à la cohésion sociale ? », demande-t-il aux députés, précisant que le gouvernement ne peut imposer un impôt sur la fortune de crainte de susciter la fuite des capitaux et des investisseurs dont l'impact risque d'être irrémédiable pour les fonds de l'Etat. Compensation à celui qui la mérite Cohésion sociale rime avec suppression de la caisse de compensation. Pour Abdelilah Benkirane, l'un ne va pas sans l'autre, puisqu'il se dit convaincu qu'il est temps pour l'Etat de cibler son soutien financier en le limitant aux couches sociales les plus démunies. A la séance des questions de politique générale, le chef du gouvernement l'a réitérée soulignant l'importance de cultiver la solidarité. « Le Maroc est en tête des pays des meilleurs salaires dans toute la région. En donner un peu ne risque pas de nuire (...) La classe moyenne ne se plaint pas de devoir payer 25dirhams par jour à la demande de Benkirane », déclare-t-il en réponse à l'opposition qui l'accuse d'affaiblir la classe moyenne en prévoyant une taxe sur ses revenus dès 2013. * Tweet * *