L'accord agricole est devenu le pari gagnant pour redorer le blason des dirigeants espagnols, en mal de popularité en ces temps de dépression économique. Lundi, c'était au tour du ministre local de l'Agriculture de fustiger le pacte, en considérant que cette «importante ouverture concédée par l'Union européenne aux importations marocaines et le mauvais fonctionnement des contrôles douaniers affectent «d'une manière importante» la compétitivité de la tomate canarienne. Juan Ramon Hernandez, le chargé du portefeuille de l'agriculture dans le gouvernement local canarien, a considéré que le pacte octroie «des concessions importantes au pays nord africain», au détriment des produits canariens. Le responsable a épousé la thèse du lobby espagnol réfractaire au pacte à propos de l'infraction par le Maroc des contingents stipulés par le protocole. La commission européenne pointée du doigt Hernandez a pointé du doigt le «laxisme» de la commission européenne, laquelle, selon lui ne bouge pas le petit doigt pour mettre fin aux «fraudes» commises par les importateurs marocains. Reprenant à son compte la principale requête des contestataires, à savoir la révision des droits d'entrée, il a estimé que le modèle actuel de calcul, adopté par les importateurs ouvre la voie libre aux fraudes, puisque l'importateur évite de déclarer les quantités importées. Hernandez a reproché au gouvernement central d'être «peu sensible» aux doléances des producteurs et de ne prévoir aucune mesure compensatoire, pour indemniser le secteur producteur de la tomate. Comme riposte, Hernandez a suggéré la mobilisation contre un accord «néfaste» pour les intérêts des canariens et des régions productrices espagnoles. La députée locale qui a appelée le responsable à comparaître devant le Parlement local pour s'expliquer sur les mesures adoptées par son département, a clairement dit qu'il était temps de réagir. «Avant, au moins on nous disait qu'on échangeait les tomates contre le poisson, mais aujourd'hui, il n'y a plus ni tomates ni poisson», a-t-elle déclaré. À première vue, rien de nouveau dans cette énième sortie du clan des opposants au pacte. Sauf que le timing n'est pas anodin. Le ministre local n'a pas fait ce genre de déclarations durant le débat précédant l'adoption du pacte en février dernier. Seuls les députés locaux ont exprimé un niet catégorique face aux clauses du pacte. Cette sortie a l'allure d'une rectification de tir. Après les critiques formulées à l'encontre du gouvernement local canarien, suite à la visite de son haut responsable au Maroc, le pouvoir régional veut montrer qu'il n'est pas acquis entièrement à la cause marocaine, comme certaines voix le répètent. Si quelques semaines auparavant, ils louaient, à tambour battant, les relations maroco-canariennes et les responsables appelaient à renforcer davantage les liens commerciaux entre les deux zones, cela n'empêche pas l'Archipel de tirer à boulets rouges sur les intérêts du Maroc.