«Le musée rend hommage au judaïsme amazigh et sépharade». La Vie éco : Tout d'abord, pourquoi cet intérêt que vous portez à la culture juive marocaine ? A la base, je suis anthropologue de formation puisque je suis lauréate de l'Institut national des sciences de l'archéologie et du patrimoine. J'ai par la suite intégré l'école de journalisme de Rabat. Durant ces deux parcours, j'ai choisi des sujets de mémoire ayant une relation avec le judaïsme marocain : les Juifs de Casablanca et la Hiloula (pèlerinage) de Ben Ahmed. La rencontre avec feu Simon Lévy qui était alors enseignant à la Faculté des lettres de Rabat allait être déterminante dans mes choix. J'ai compris, comme il aimait bien le répéter, que l'on ne peut pas comprendre l'histoire de ce pays sans prendre en considération sa composante juive. C'est donc tout naturellement que j'ai intégré le musée dès son ouverture en 1997 en tant que chargée de mission, puis en tant que conservatrice à partir de 2002. Quelle est la particularité du Musée du judaïsme marocain ? C'est tout d'abord le seul musée juif dans le monde arabo-musulman. Le monde arabe comptait de grandes communautés juives, mais c'est au Maroc que cet héritage, que cette mémoire juive a été mise en valeur. C'est également le seul musée juif au monde dont la conservatrice est musulmane. Il est également unique puisqu'il rend hommage au judaïsme amazigh et sépharade. Le musée est un espace ouvert à tous les Marocains et étrangers, juifs ou non juifs. A quoi sert-il exactement ? C'est avant tout un outil pédagogique pour compléter le rôle et la mission de l'école marocaine. Le musée reçoit des milliers d'écoliers, lycéens et étudiants marocains qui apprennent ainsi une partie de leur héritage. Beaucoup d'étudiants travaillent sur le sujet du judaïsme marocain, le musée leur sert ainsi de support dans leur travail. Nous organisons des journées d'études, des conférences sur le judaïsme marocain, des projections de films, des expositions. Enfin, le musée célèbre chaque année deux fêtes : l'une musulmane, Ramadan avec un grand ftour, et l'autre, la mimouna, juste après le Pessah. Qu'en est-il de la restauration des synagogues ? Le projet de réhabilitation des monuments juifs du Maroc a commencé en 1995 avec la création de la Fondation du patrimoine culturel judéo-marocain. Ces projets de restauration et de réhabilitation ont été réalisés souvent en partenariat avec le ministère de la culture ainsi qu'avec d'autres partenaires locaux ou étrangers. Parmi les lieux de culte restaurés, on retrouve la synagogue Ben Danan à Fès qui date du 17e siècle, les synagogues Toledano à Meknès, Moshé Nahon à Tanger, Rabbin Ishaq Benwalid à Tétouan, Slat Al Fassiyin à Fès. Les restaurations ont également été menées dans la région de Taroudant-Tiznit et à Errachidia.