Le nouveau patron d'Attijariwafa bank est connu pour ses qualités humaines et son humilité. Par la négociation, il a su débloquer des situations que beaucoup jugeaient perdues. Sa pugnacité lui avait, cependant, permis de tenir tête à Oudghiri qui l'avait mis au placard. Portrait. Pendant quatre mois, le monde des affaires a attendu qu'Attijariwafa bank ait enfin un patron. Trouver un remplaçant à Khalid Oudghiri a finalement été une tâche plus rude qu'il n'y paraissait. C'est d'autant invraisemblable qu'Oudghiri était donné partant depuis plus d'une année. D'abord, il était question de l'écarter en douceur en adoptant la nouvelle forme de société anonyme à directoire et conseil de surveillance. Il serait alors président du conseil de surveillance, laissant la responsabilité de la gestion opérationnelle à un président du directoire. L'idée sera abandonnée au profit d'un nouvel organigramme. Khalid Oudghiri restera. Il restera jusqu'en mai 2007 dernier avant qu'il soit enfin débarqué du navire qu'il dirigeait. Quand le choix a enfin porté sur Mohamed El Kettani, ce fut non sans surprise. Surprise parce qu'aucun pronostic n'évoquait son nom. Tantôt, c'était le nom de Driss Bencheikh, actuel Pdg de la Centrale laitière qui sortirait du chapeau et tantôt celui d'Ahmed Rahou, Pdg de Lesieur Cristal. D'autres seront également cités comme remplaçants potentiels; presque tout ce que le Maroc compte comme banquiers y est passé, pour peu qu'il y ait des affinités avec les dirigeants de l'ONA. Ces deux noms en particulier semblaient avoir le profil recherché, parce qu'ils ont de l'expérience, dans les finances marocaines. Mais le résultat de courses montre que tout ceci n'était que pure conjecture. Pourquoi donc Mohamed El Kettani ? Pourtant, il n'était ni besoin d'être dans le secret des dieux, ni céder une nouvelle fois à la conjecture pour savoir qu'il aurait pu remporter les suffrages. Son parcours au sein de la banque jouait en sa faveur. De tous les directeurs généraux, c'est celui qui cumule le plus d'expériences au sein de l'établissement. Avec l'adoption du nouvel organigramme, il y a un peu plus d'une année, c'est à lui qu'est confié le pôle «Banque de financement et de l'entreprise», domaine qu'il connaît tant pour y avoir passé près de 22 ans, pratiquement depuis son entrée au sein de l'institution. Il a alors en charge les départements dédiés respectivement à la PME et à la grande entreprise et la clientèle corporate. En effet, c'est en jeune ingénieur, fraîchement sorti de l'ENSTAT de Paris, qu'il rejoint la BCM en 1984, dans son département des crédits d'investissement. Après avoir pris, une année plus tard, la tête de ce service, ses prérogatives seront étendues aux crédits à l'export qu'il met en place. Quatre ans plus tard, il prend en charge la direction centrale du crédit et de l'ingénierie financière. Autant dire que son ascension a été très rapide et elle le sera encore plus pour le reste de la carrière. Puisqu'une dizaine d'années après être entré dans la banque, il est promu directeur général adjoint en charge des crédits et des activités parabancaires. En 2003, il devient le directeur général à qui est confié le pôle banque de financement et d'investissement, puis une année plus tard, celui de la grande clientèle et de l'international s'ajoute à sa responsabilité. Il y a donc une différence fondamentale avec Khalid Oudghiri qui lui avait fait ses armes dans un autre groupe. Et ce n'est pas la seule. En plus d'être un produit de la maison Attijariwafa bank, «Mohamed El Kettani privilégie le management participatif, là où Khalid Oudghiri se montrait autoritaire», explique l'un de ses plus proches collaborateurs. Le nouveau patron d'Attijariwafa bank privilégie les relations humaines, et «séduit surtout par son humilité et sa modestie», explique un autre de ses lieutenants, alors que son prédécesseur n'acceptait pas la contradiction. C'est d'ailleurs ce qui avait contribué à envenimer la relation avec Saâd Bendidi, le PDG de l'ONA. Les anecdotes ne manquent pas à son sujet, dans les relations qu'il entretient aussi bien avec les clients qu'avec ses collaborateurs et collègues de la banque. Il y a de cela quelques années, l'une des filiales de la banque, à savoir la société Capri, chargée de l'aménagement de Bouznikha, avait hérité d'un dossier épineux. C'est Mohamed El Kettani qui a dénoué la situation avec le client et la banque a pu récupérer pas moins de 140 hectares et débloqué ce qui est l'un des plus importants projets d'aménagement touristique du Maroc. Ayant passé toute sa carrière au sein de la banque, cet homme de 49 ans a également une autre qualité qui aurait pu servir Oudghiri. Il connaît l'ensemble des clients de la banque et les rouages de l'ensemble des filiales dont il a occupé le poste de président pour certaines et d'administrateur pour d'autres. Et à ce niveau, les banquiers sont unanimes, il n'y a de différence entre eux que la connaissance qu'ils ont de leurs propres clients. Au-delà de ces différences, cette nomination sonne comme une revanche sur l'histoire et sur son prédécesseur. Car, Khalid Oudghiri l'avait pratiquement mis au placard. «C'était même très mal vu de lui parler», explique un des directeurs généraux d'Attijariwafa bank. Mohamed El Kettani a dû faire profil bas, là où d'autres auraient jeté l'éponge, il a réussi à tenir le coup.