* Il jouit, contrairement à certaines plumes braillardes qui ont vite fait de laccuser, de la présomption dinnocence tant que sa culpabilité na pas été légalement et définitivement établie. * Oudghiri découvre, assez tardivement, que laura et limmunité que procurent le «pouvoir absolu» sont bien éphémères. Grâce. Disgrâce. On ne peut trouver mieux pour qualifier le cheminement de lex-PDG dAttijariwafa bank, Khalid Oudghiri. Sa position actuelle, il faut lavouer, nest guère enviable. En peu de temps, il aura pratiquement tout connu : une ascension fulgurante qui lui aura valu son ticket dentrée dans le cercle restreint des hommes dinfluence et incontournables du milieu des affaires; et une chute tout aussi brutale qui lui vaut dêtre cité dans une rocambolesque affaire de corruption. Nous écrivions tantôt dans ces colonnes que cest un privilège que de diriger lune des banques les plus prestigieuses du Royaume, Attijariwafa bank notamment. Ceux qui ont eu ce privilège ont trôné, lespace dun moment, sur le monde des affaires, en étant des acteurs incontournables de la vie économique. Khalid Oudghiri la été. Tout comme Bendidi lorsquil assurait la présidence de lONA. Le cas Bendidi avait déchaîné les passions et alimenté les discussions dans les salons feutrés de Casablanca. Bras droit de Othman Benjelloun alors quil occupait de hautes fonctions au sein du Groupe Finances.com, il sest subitement retrouvé numéro 1 de lONA. Belle ascension ! Mais qui naura pratiquement duré que trois ans. On ne lui laissera même pas le privilège de sortir par la petite porte. Il est sorti par la fenêtre avec un CV sali et une image ternie par des propos pour le moins humiliants : «incompétence, dissimulation dinformations stratégiques». Tout ce dont un haut cadre doit se passer pour pouvoir rebondir. Il a ainsi quitté lONA la tête basse, avec de surcroît une triple peine : la disgrâce, le discrédit et les sarcasmes. A cette époque dailleurs, on écrivait que le cas Oudghiri était moins grave. Car il a été, certes, débarqué sans les honneurs, mais ses employeurs nont, à aucun moment, justifié officiellement les motifs de son départ. Cest la raison pour laquelle, certainement, il a pu, un laps de temps, poser ses valises au sein dune banque saoudienne. Cest dire quà aucun moment ses compétences en tant que banquier nont été mises en cause. Bien au contraire. Lorsquil est arrivé de BNP Paribas pour prendre les rênes de la BCM, Oudghiri a eu droit au tapis rouge. Bénéficiant dun préjugé favorable, motivé à bloc, il entama, par la grâce des actionnaires, la restructuration du Groupe pour absorber par la suite la défunte Wafabank. Puis naquit Attijariwafa bank, premier groupe bancaire privé du Royaume. Oudghiri a surtout été le père du désormais concept populaire «champions nationaux». Cest-à-dire, faire de toutes les filiales du groupe des leaders dans leur domaine dactivité. Et il a réussi son pari, tout en initiant une ambitieuse et audacieuse politique de croissance externe qui poussa le Groupe bancaire à être fortement présent en Afrique subsaharienne. Les éloges fusaient alors de toutes parts. Attijariwafa bank (au même titre dailleurs que BMCE Bank) était même citée comme modèle dans le cadre du développement de la coopération sud-sud. Puis vint subitement la disgrâce, avec pour corollaire une sortie par la petite porte. Motif officieux : sa mésentente avec sa hiérarchie. «Oudghiri est, certes, bon banquier, mais cest une forte tête qui a voulu jouer au bras de fer avec sa hiérarchie. Et à ce jeu, il navait aucune chance de gagner», confie un cadre dAttijariwafa bank pour qui «il y a des règles auxquelles il faut se soumettre lorsquon fait partie du Groupe ONA». La cabale continue A la différence dun Bendidi qui, au même titre que lui, a connu la disgrâce, Oudghiri nest pas tombé dans lanonymat bien longtemps. Le voilà, aujourdhui, cité dans une affaire pour «complicité de corruption». Une affaire qui date de plusieurs années, mais qui natterrit quaujourdhui sur la table de la Justice, et dont les informations contradictoires distillées ici et là imposent la retenue et plus dintelligence dans lanalyse. Car, alors même que laffaire est en cours dinstruction, voilà quune certaine presse se substitue à la Justice pour discréditer Oudghiri et en faire un coupable idéal. Pourtant, il est «présumé innocent» tant qu'il n'est pas déclaré coupable, conformément à la loi, par un tribunal indépendant et impartial à l'issue d'un procès public et équitable. Autrement dit, il est présumé innocent jusquà preuve du contraire. Mais il faut dire que ce qui semble être une cabale contre lancien homme fort dAttijariwafa bank a commencé depuis bien longtemps. Lorsquun hebdomadaire de la place a consacré, il y a 4 mois, quatre de ses numéros à ternir son image, sans le bénéfice du doute, dans ce qui ressemblait fort à un règlement de comptes. Au point quil semble logique de se demander qui veut la peau de Oudghiri. Qua-t-il fait pour être lynché médiatiquement ? En tout cas, il ne pourra sortir indemne de toutes ces épreuves quil traverse actuellement. Quand bien même la Justice le blanchit. Car, dans la conscience populaire, le doute subsistera toujours, comme pour confirmer le célèbre dicton «il ny a pas de fumée sans feu». Aujourdhui hors du pays, il essaie de trouver, avec certainement beaucoup de rancur, ceux qui, dans lanonymat, contribuent à son lynchage médiatique et qui, jadis, rampaient à ses pieds pour sattirer ses faveurs. Et constate avec dégoût que ses prétendus amis dhier ont retourné leur veste dès lors quil est tombé de son piédestal. Oudghiri découvre ainsi dautres facettes du monde des affaires. Un monde où la morale est souvent sacrifiée sur lautel des intérêts personnels. Un monde où le business et largent font et défont les amitiés de circonstance. Un monde où, finalement, laura et limmunité que procurent le pouvoir absolu sont bien éphémères. Ce que, malheureusement, lui et bien dautres nont pas saisi à temps.