* Ils peuvent, du jour au lendemain, être démis de leur fonction. * Dans le privé, les désillusions peuvent être tout autant cruelles. * A la grandeur, succède alors la décadence. L a nouvelle a fait grand bruit. A limage de linstitution et de la personne concernées. Le «limogeage» de Mustapha Bakkoury est, en effet, de ces faits qui ne peuvent laisser lopinion publique indifférente. Cétait surprenant. Comme la été le communiqué au contenu pour le moins frugal qui a été porté sur la place publique pour annoncer la nomination de Anas Alami en tant que DG de la CDG. Fin de la liaison Bakkoury CDG après 8 ans dune union dont nous dressions le bilan positif il y a juste une semaine ! Nul besoin de faire dinutiles supputations sur le pourquoi du comment. Dailleurs, bien malin qui saura dire les raisons exactes de cette révocation-surprise. Quoique certaines plumes braillardes se croyant habitées par lesprit devin se laissent aller à des hypothèses à la limite risibles avec un peu de recul. Le «limogeage» de Bakkoury suscite plutôt une question de fond : faut-il se réjouir dès lors quon est nommé à la tête dun établissement public ? Les réponses ne sont pas tranchées. Selon cet observateur, «il nest pas du tout facile de répondre à cette interrogation, dautant plus quil faut tenir compte de plusieurs paramètres : la nature et la dimension de létablissement public, le poste occupé auparavant, les ambitions personnelles Il faut surtout savoir que lorsquil sagit dune nomination royale, cest un signe de confiance et un privilège qui peuvent, plus tard, être le sésame pour accéder à des responsabilités beaucoup plus importantes». Pour un autre, «cest assez délicat. La notoriété et les avantages en terme dimage que peuvent donner une nomination royale nont pas de prix. Cest pourquoi beaucoup de hauts cadres nhésitent pas à passer du privé au public tout en sachant quils vont être rémunérés 2, 3, voire 4 fois moins. Cela peut toutefois ouvrir dautres portes plus intéressantes en terme dévolution de carrière. Le seul hic, cest lorsquon est brutalement remercié sans les honneurs». Cest là tout le problème. Si certains hauts commis de lEtat ont pu passer détablissement à établissement après avoir parfois déambulé dans les couloirs austères de plusieurs ministères, et continué à jouir des privilèges que leur confère leur rang, dautres, par contre, ont très tôt fait de passer de la lumière à lombre. Ce nest pas lancien DG de lONE, Younes Mamaâr, qui nous contredira. Encore moins lex-DG de lODEP, Mustapha Barroug (ODEP) ou, à un degré moindre, lex-Directeur général du CDVM, Dounia Taarji. Quand les projecteurs séteignent Sauf à être désigné pour dautres fonctions, le limogeage de hauts cadres, quils soient du public ou du privé, laisse toujours de profondes séquelles. Car, lorsque les projecteurs séteignent, ces élites rappellent cruellement des ombres chinoises à la recherche dune aura perdue. Ainsi, plusieurs de ces acteurs économiques qui trônaient hier sur les grands groupes nationaux et qui étaient courtisés par les milieux daffaires, ont aujourdhui sombré dans un cruel oubli. Nous lécrivions tantôt dans ces colonnes : au sommet de la pyramide, on ne peut monter plus haut. On y reste ou on descend. Descendre certes, mais surtout avec la manière. Car si lon vous pousse, la réception risque dêtre douloureuse. Cest ce qui est arrivé à Khalid Oudghiri, lex-PDG dAttijariwafa bank. A lancien président de lONA également, Saâd Bendidi Où atterrir après avoir dirigé les plus prestigieuses structures du Maroc ? Surtout, où déposer ses valises lorsquà la place du tapis rouge déroulé pour vous accueillir dans le cercle restreint des élites de confiance du pays, on vous contraint à sortir par une porte dérobée, si toutefois on échappe à la défenestration ? Cest le principal problème auquel ils sont tous confrontés. Et leur choix est parfois à limage de leur désillusion : lexil. Même si certains, dans leur plan de carrière, avaient, fibre patriotique chevillée au corps, décidé de ranger leur bâton de pèlerin pour rentrer au bercail et participer modestement à lédification dun Maroc moderne. Mais voilà, ils repartent pour la plupart à létranger sans bénéficier de la présomption dinnocence de la part dune presse qui, hier, les encensait. Ils repartent en se rendant compte que, comme le disait si bien Bob Marley, «tes meilleurs amis peuvent devenir tes pires ennemis». Ils repartent, traînant dans leur baluchon, outre leur CV, le poids de la disgrâce et des sarcasmes En attendant de se faire oublier. Serait-ce trop cher payé ? «Le monde des affaires a cette logique qui veut que plus la fonction occupée est importante, plus la rémunération lest et les exigences de résultats également. Quand les résultats ne suivent pas ou lorsquil y a des fautes de gestion, les sanctions tombent et sont à la mesure des faits constatés. Et, bien entendu, un limogeage fera dautant plus de bruit que létablissement concerné est important. Lorsquon occupe une haute fonction, il faut savoir saccommoder des privilèges, mais aussi des inconvénients. Et parmi les inconvénients, il y a justement le risque dêtre, plus tard, discrédité. Cest comme cela partout dans le monde», nous confie un haut cadre bancaire. Des postes donc pleins de privilèges, mais à haut risque. Autrement dit, des sièges éjectables sur lesquels mieux vaut sasseoir parachute à portée de main. Car nul ne semble être à labri dune éjection-surprise.