Le président français Emmanuel Macron a invité vendredi à Montpellier, dans le sud de la France, des centaines de jeunes de la "société civile" africaine, pour participer à un sommet franco-africain inédit visant à "rétablir" la relation, mais certains intellectuels africains l'ont critiqué. Ce sommet se tient à un moment où l'influence de la France dans son ancienne sphère d'influence est de plus en plus contestée, notamment par la Russie, et les relations de Paris avec le Mali et l'Algérie traversent une crise ouverte. Pour la première fois depuis 1979, date du début des sommets franco-africains, aucun chef d'Etat africain n'a été invité. Cette nouvelle formule est censée permettre, selon la présidence française, « d'écouter la jeunesse africaine » et de « sortir des vieilles formules et réseaux ». Autrement dit, ce sommet permettra de rompre avec l'ancienne politique de la France envers l'Afrique, ses pratiques opaques et ses réseaux d'influence. Ainsi, de jeunes entrepreneurs, artistes et sportifs africains rencontreront des Français et des Africains issus des mêmes domaines pour échanger sur des enjeux économiques, politiques et culturels. Puis, dans l'après-midi, le président Macron recevra un groupe de 12 jeunes Africains du Mali, de Côte d'Ivoire, de Tunisie, d'Afrique du Sud et du Kenya. Ce groupe a été choisi à l'issue des dialogues qu'il a donnés pendant des mois sur le continent, au penseur camerounais Achille Mbembe, qui était chargé d'organiser le sommet. Dans un rapport qu'il a remis mardi au président français, Mbembe a notamment affirmé que la France est très éloignée de la réalité des "nouveaux mouvements et expériences politiques et culturelles" portées par la jeunesse africaine. Il a également noté que de toutes les controverses "il n'y a pas de plus grand mal que le soutien supposé de la France à la tyrannie sur le continent". Par exemple, ce qui s'est passé récemment au Tchad, lorsque le président français a immédiatement soutenu le conseil militaire mis en place par le fils d'Idriss Deby après l'assassinat de son père en avril dernier. L'Elysée a souligné que "tous les sujets qui provoquent l'indignation seront mis sur la table", des interventions militaires françaises à la souveraineté, la gouvernance et la démocratie, reconnaissant que "l'environnement politique actuel rend les discussions sensibles". Jeudi, Mbembe a confirmé sur France Inter que l'Afrique est portée par un pouvoir d'innovation : le pouvoir d'innovation et le pouvoir de fermeture, c'est-à-dire le pouvoir de mort. La principale question que les jeunes poseront à Macron est : d'où venez-vous ? Et le penseur Mbembe a été sévèrement critiqué par les intellectuels africains parce qu'il a accepté de diriger le sommet. L'écrivain sénégalais Boubacar Boris Diop a estimé dans un article publié jeudi sur senegalactu.info que « le face-à-face entre Macron et la société civile africaine sera plus fiable voire fructueux, si l'on sent au moins dans la réalité qu'il y a des indices tangibles. de son intention de changer. De leur côté, les penseurs du groupe africain « CORA » ont estimé que la société civile qui participera au sommet de Montpellier est « sur mesure » et ont critiqué « l'Afrique, qui réussit à faire illusion » aux gens que la France « est à l'écoute des peuples et des penseurs d'Afrique ». . " En plus des enjeux politiques, le sommet donne beaucoup d'espace aux acteurs économiques. Elle a été précédée de deux jours de rencontres à Paris avec 350 entrepreneurs africains. Une autre table ronde sera consacrée aux questions de rapatriement des biens culturels, l'un des domaines dans lesquels Macron, selon les penseurs les plus critiques, a fait de gros progrès. Le philosophe canado-guinéen Amadou Sadjo Barry soutient que « depuis le discours de Ouagadougou, les lignes ont bougé symboliquement et il y a eu des signaux importants » tels que le retour des pièces pillées du Bénin, la proclamation de la fin du franc CFA et la reconnaissance de la « tombe de la France ». responsabilités » pour le génocide des Tutsi au Rwanda en 1994. A l'issue du sommet, le président français, candidat probable à une réélection après sept mois, pourrait faire des annonces publiques sur la base des propositions de Mbembe, notamment la création d'un fonds dédié au soutien des initiatives de promotion de la démocratie, des programmes permettant une plus grande mobilité étudiante et la création d'un « Forum euro-africain sur les migrations ».