Les cours du pétrole sont écrasés par les stocks américains. L'équivalent de 468 millions de barils s'entassent dans les cuves de Cushing et les autres terminaux des États-Unis, un record de tous les temps. Le gouvernement américain a même proposé d'acheter 5 millions de barils pour ses réserves stratégiques, histoire d'alléger un peu le fardeau. Ces énormes stocks, on les doit à une moindre activité des raffineries, qui entrent en saison de maintenance et qui, aux États-Unis, sont dissuadées par la faiblesse des marges et l'abondance de produits pétroliers. Or pendant ce temps, les puits de pétrole américains continuent de produire toujours plus de barils : 12,6 millions par jour aujourd'hui, près d'un million de plus que l'an dernier. La diminution du nombre de forages, qui avait un peu soutenu les cours mondiaux le mois dernier, tarde à se traduire en baisse effective de la production américaine. Les quantités de brut américain qui s'accumulent pourraient même défier les capacités maximum de stockage du pays et entraîner les prix du pétrole encore plus bas. Ce sont les avertissements de l'Agence internationale de l'énergie, qui n'attend pas de baisse de la production américaine avant l'été. C'est ce qui a fait vivement réagir les cours du baril de pétrole la semaine dernière. Ils ont chuté de 9 % pour finir sous la barre des 55 dollars à Londres et des 45 dollars à New York. Les marchés continuent d'ignorer le déclin des productions libyenne et plus récemment irakienne de pétrole. Ils ne voient que le surplus mondial causé par les Etats-Unis et qui pourrait être aggravé par le retour du pétrole iranien sur le marché, si un accord préliminaire sur le nucléaire était conclu d'ici la fin du mois, puis un accord global d'ici le mois de juin, ce qui délivrerait Téhéran des sanctions. En refusant de réduire sa production en novembre dernier, ce qui aurait fait remonter les cours, l'Arabie saoudite, premier exportateur mondial, espérait contraindre les États-Unis à fermer en nombre leurs puits devenus trop coûteux. Cette décision avait accéléré la chute des cours, déjà entamée depuis le mois de juin. Les Saoudiens préfèrent maintenir leur part du marché mondial, quitte à réduire leurs recettes. Certes, le nombre de forages destinés à ouvrir de nouveaux puits aux États-Unis diminue depuis treize semaines consécutives, selon le recensement de la société parapétrolière Baker Hughes, qui fait autorité en la matière. Mais la production de pétrole, emmenée par les gisements d'huile de schiste, devrait continuer de progresser sur l'ensemble de l'année 2015 même si c'est à un rythme moindre que ces deux dernières années. La production pétrolière américaine pourrait commencer à fléchir avant la fin de l'année en raison du bas niveau des prix, estime l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) dans son rapport mensuel publié lundi 16 mars. Cette remarque donne à penser que le cartel attendra sa prochaine réunion ministérielle, prévue en juin, pour voir si sa stratégie visant à défendre ses parts de marché met effectivement à mal le boom du pétrole de schiste aux États-Unis. La baisse de moitié des cours du brut depuis l'été 2014 à amené les compagnies pétrolières à réduire leurs investissements et les forages aux États-Unis ont diminué en conséquence, laissant présager une baisse de la production de pétrole hors Opep. Dans son rapport mensuel, l'Opep maintient toutefois sa prévision pour l'offre non Opep cette année et note que la production de pétrole de schiste aux États-Unis pourrait commencer à reculer en fin d'année seulement, quand des puits actuellement exploités auront cessé de produire et ne seront pas remplacés par d'autres. La baisse des cours du brut, amorcée en juin 2014, quand le baril de Brent valait 115 euros, s'est accélérée en novembre lorsque l'Opep a refusé de réduire sa production, cherchant ainsi à mettre en difficulté les États-Unis et d'autres pays tiers dont le brut coûte plus cher à extraire. La prochaine réunion de l'Opep est prévue en juin et les observateurs s'attendent à ce que le cartel ne modifie en rien sa stratégie. Pour l'heure, l'organisation ne prévoit pas de nouvelle hausse de la demande pour son brut en 2015 et a même légèrement réduit sa prévision à 29,19 millions de barils par jour (bpj), tout en maintenant son estimation d'une croissance de la demande mondiale cette année. Dans le rapport mensuel de février, l'Opep avait revu en forte hausse la prévision de demande pour son pétrole en raison d'estimations revues en baisse pour l'offre non-Opep. Avec une production de l'Opep estimée à 30,02 millions de bpj en février, l'offre excédentaire devrait se chiffrer à 830.000 bpj en 2015 et à deux millions de bpj au premier semestre, soit moins qu'en janvier, selon le document publié lundi. L'Arabie saoudite, principal membre de l'Opep, a vu sa production diminuer de 40.000 bpj le mois dernier à 9,64 millions.