Après la fuite du président tunisien Ben Ali en Arabie saoudite, ses comptes et son patrimoine commencent à être examinés. Actifs bancaires, propriétés immobilières, la fortune du chef d'Etat déchu est immense. Une vaste opération de contrôle de ces avoirs a commencé. Deux ONG anticorruption s'apprêtent à porter plainte à Paris. Banques, transport, immobilier la liste des biens de la famille Ben Ali est immense. En vingt-trois ans de règne, l'ex-président aurait amassé une fortune personnelle estimée à 5 milliards de dollars, selon le magazine américain Forbes. Des banques privées, plusieurs compagnies aériennes, comme Karthago Airlines ou Nouvel Air, une société de production audiovisuelle Cactus, des hôtels 5 étoiles en Tunisie, des biens immobiliers en Argentine ou au Brésil, la liste des biens du clan Ben Ali et de sa belle-famille Trabelsi est difficile à dresser. Les Ben Ali-Trabelsi disposeraient de plusieurs centaines de millions d'euros sur des comptes bancaires en Suisse, à Dubaï et à Malte, ainsi que des avoirs dans plusieurs banques françaises. Le clan détiendrait également des appartements à Paris, des propriétés en Ile-de-France, un chalet à Courchevel et des villas sur la Côte d'Azur. Le site internet du journal Le Monde, s'appuyant sur des sources à l'Elysée, croit savoir que la famille du président se serait enfuie de Tunisie avec 1,5 tonne de lingots d'or, soit l'équivalent de 45 millions d'euros. Une information démentie par la Banque centrale de Tunisie. Blocage des avoirs A la demande de l'Elysée, une vaste opération de contrôle de ces avoirs a commencé. Une instruction a ainsi été donnée à Tracfin, l'organisme chargé de lutter contre le trafic des capitaux rattaché à Bercy, d'informer les banques françaises pour qu'elles exercent «une vigilance renforcée sur tous les mouvements financiers» pouvant concerner «les avoirs de la famille et l'entourage de l'ancien président Ben Ali». Concrètement, il s'agit d'empêcher la famille Ben Ali d'avoir accès à des avoirs se trouvant dans des banques en France. La ministre de l'Economie, Christine Lagarde a précisé, lundi 17 janvier 2011, que les banques doivent «en cas de mouvement anormal, curieux, par leur montant, leur destination, alerter Tracfin» mais qu'il n'y a pas de «gel des avoirs car cela nécessite une décision judiciaire». Même procédure pour les biens immobiliers, «les notaires français sont sous la même contrainte que les banquiers. Ils doivent soumettre à Tracfin tout mouvement possible sur l'immobilier», a précisé Christine Lagarde. Plainte de deux ONG anticorruption Pour William Bourdon, président de l'association Sherpa et avocat de Transparence Internationale France, «c'est une façon de reconnaître que la restitution de l'argent détourné est centrale pour les Tunisiens». Rappelons que la France fut l'un des premiers pays à ratifier la convention des Nations unies sur la restitution des biens mal acquis. Cette convention dite de Merida pose le principe d'une coopération internationale en matière de blocage et de restitution d'avoirs volés dans le cadre d'actes de corruption par les dirigeants politiques ou d'entreprises. Mais pour agir, la France doit être saisie par la Tunisie. L'association Sherpa et Transparence International France s'apprêtent à déposer ces prochains jours, à Paris, une plainte contre X pour «corruption, blanchiment et recel d'abus de biens sociaux», contre Ben Ali et son entourage familial, sur le modèle des plaintes déposées contre trois chefs d'Etats africains.