Face au déficit criant en moyens humains et matériels dans les centres hospitaliers, les délais d'attente pour subir un simple examen deviennent un vrai calvaire, mettant en danger la santé des patients. Pour remédier à cette situation déplorable, le ministère de la Santé compte s'appuyer sur les synergies public-privé. Dans plusieurs hôpitaux publics, la réalité laisse à désirer, si elle ne prend pas une tournure gravissime. Les patients attendent des rendez-vous improbables. Pour faire une consultation médicale, le temps d'attente pourrait aller jusqu'à des semaines. Pour un examen radiologique, l'affaire peu tourner au cauchemar, car les patients attendent des mois. Chose qui risque d'aggraver leur état de santé ou même mettre en danger leur vie. Les médecins, pour leur part, sont dépassés par la charge de travail. Pour eux, si le Royaume avait suffisamment de ressources humaines, le système se porterait bien mieux et les patients auraient eu accès aux soins facilement et à temps. Ainsi, le manque de médecins, techniciens et infirmiers est à l'origine des maux du système. La crise s'intensifie suite au tsunami de départ de ces blouses blanches vers le privé ou à l'étranger. Selon la Fondation des médecins-enseignants libéraux (FMEL), presque 100% des médecins spécialistes du secteur public refusent de prolonger leur activité dans le secteur après la fin de leur contrat. Et pour cause, les conditions de travail morales et matérielles sont jugées « catastrophiques ». Ce même constat a été affirmé à plusieurs reprises par le ministre de la Santé et de la Protection sociale, Khalid Ait Taleb. Selon lui, l'insuffisance des cadres médicaux et la-non disponibilité de certains d'autres dans les hôpitaux publics retardent la prise en charge des patients. Un délai moyen de 52 jours pour effectuer un scanner Intervenant devant les députés, lundi 19 juin, à la Chambre des Représentants lors de la séance plénière de questions orales, le ministre Khalid Ait Taleb a reconnu que « le processus d'accès aux soins de santé publique reste en deçà des attentes », soulignant toutefois que « la réalité au Maroc est meilleure que celle prévalant dans plusieurs autres pays ». Dans ce sens, le ministre a indiqué que la durée d'attente pour effectuer un scanner par exemple, est de 52 jours et non pas six mois, sachant que cette moyenne est plus basse que celle enregistrée au niveau mondial. « On aurait aimé donner un rendez-vous instantanément, mais ceci est difficile en raison de l'insuffisance de professionnels de la Santé », a-t-il regretté. Il a de même rassuré sur l'effort d'augmentation du budget du ministère de la Santé en 2023, qui passe à un montant de 28,12 milliards de dirhams (MMDH) contre 23,54 MMDH en 2022, ce qui permettra d'améliorer les services de santé dans les centres publics, relevant que 80 % des investissements dans le secteur de la Santé sont alloués au secteur public.
La couverture sociale, parade au retard des rendez-vous ? A la Chambre des Représentants, Khalid Ait Taleb a indiqué que la couverture sociale pourrait s'avérer un mécanisme clé pour mieux maîtriser les rendez-vous. Ainsi, en étant couvert d'une assurance maladie, les cas urgents pourront s'adresser directement au secteur privé, sans besoin d'attendre longtemps. Ceci permettra, selon le ministre, de sauver des vies, réduire la pression sur les hôpitaux publics, stimuler la concurrence, mais aussi renforcer l'attraction du secteur privé. La coopération entre le secteur public et privé donne ainsi des résultats concluants. Selon le ministre, « la liste d'attente des patients souffrant d'insuffisance rénale est de zéro, car tous les patients qui attendaient leur tour se sont dirigés vers le secteur privé pour recevoir les soins adaptés à leurs besoins ». S'agissant de la mise en place du chantier de la protection sociale, le ministre a salué l'arsenal juridique mis en place à cet égard, notant toutefois que le transfert des bénéficiaires du système « RAMED » vers le système d'assurance maladie obligatoire avait connu une perturbation qui sera bientôt surmontée, et qu'il s'agit d'une phase transitoire et temporaire. Un rendez-vous sur trois pris sur Mawiidi Lancée en 2015 par le ministère de la Santé pour mieux accueillir les patients, la plateforme Mawiidi de gestion des rendez-vous au niveau des hôpitaux publics est parfaitement opérationnelle, a dit le ministre. Ce service conçu pour réduire le nombre des déplacements permet aux patients de prendre rendez-vous par internet ou par téléphone. Selon les données du ministre Khalid Ait Taleb, un total de 1,9 million de rendez-vous a été accordé dans les hôpitaux publics en 2022 via la plateforme numérique «Mawiidi». Ces rendez-vous constituent 34% du nombre total accordé. Le matériel, est-ce suffisant ? Outre le manque de ressources humaines, les observateurs attentifs au secteur expliquent les longs délais dans les centres hospitaliers et les hôpitaux par l'insuffisance de matériel et équipements. « Comment peut-on répondre aux besoins du flux important de patients alors que l'hôpital ne dispose que d'un seul scanner ? C'est presque impossible. Même si les ressources humaines avaient été suffisantes, il aurait fallu avoir à disposition le matériel nécessaire pour faire plusieurs examens à la fois, afin d'éviter aux patients d'attendre pendant des mois », fait observer un médecin du secteur public, soulignant la nécessité d'investir dans l'achat et l'acquisition de matériels. « Avant de créer plus de centres de santé, il faut doter les centres existants de matériel nécessaire tel que c'est le cas dans les centres privés. Ces derniers disposent de matériel de dernière génération, d'où leur capacité à maîtriser la demande croissante en matière d'examens de radiologie », relève-t-il. Notre interlocuteur a de même souligné la nécessité d'accélérer la mise en œuvre des dispositions du projet de loi relatif à la création des groupements territoriaux de santé qui a été voté au Parlement. L'objectif de ce texte est l'intégration des centres hospitaliers universitaires et l'ensemble des unités hospitalières régionales en un seul établissement autonome. Selon notre interlocuteur, la mise en œuvre de ce texte permettrait une meilleure gestion de l'offre en matière de soins de santé.