Gazprom annonce une réduction de moitié de ses livraisons de gaz via le gazoduc Nord Stream 1. Ce qui laisserait l'Europe à court de gaz avant l'hiver. Le flux, qui ne fonctionnait qu'à 40% de ses capacités maximales depuis le 21 juillet, passera ainsi à 20% (33 millions de mètres cubes de gaz), à partir de mercredi. "Une décision qui risque de laisser le continent à court de ressources essentielles avant l'hiver", s'inquiète le Financial Times. Et qui dans l'immédiat a fait grimper le prix du gaz de 12%, à 183 dollars (179 euros) le mégawatt/ heure. La raison invoquée est, comme lors de la précédente interruption, "le besoin de maintenance des turbines", rapporte le quotidien économique anglais. Sur les six turbines qui font fonctionner la station de compression de Portovaya, une seule serait en état de marche, selon le gazier russe, tandis qu'une autre, récemment réparée au Canada, n'est toujours pas revenue, "à cause des sanctions", accuse Moscou. Interrogé par le quotidien économique allemand Handelsblatt, le fabricant explique de son côté qu'il est prêt à l'expédier à Gazprom, mais qu'il lui manque "des documents douaniers nécessaires pour importer en Russie", qui ne peuvent "qu'être fournis par le client". Cet imbroglio technico-douanier ne convainc, cependant, aucun observateur. Toujours dans les pages de Handelsblatt, des experts de l'industrie gazière affirment qu'"une seule turbine n'est pas responsable du fonctionnement de l'ensemble d'un pipeline". "Vous installez toujours plusieurs turbines et vous avez des remplacements pour assurer le débit de gaz à tout moment", assurent-ils. Réduire la consommation de l'UE Quant à la probabilité que quatre turbines soient tombées en panne en même temps, elle est très faible, surtout "compte tenu de la fiabilité antérieure des flux de Nord Stream et des opérations de Gazprom en général", précise Stefan Ulrich, analyste chez Bloomberg. "Cela conforte donc ceux qui affirment que les réductions de flux sont purement politiques", conclut-il. C'est l'avis du ministre de l'Economie allemand, Robert Habeck, rapporté par le quotidien Süddeutsche Zeitung : "La Russie rompt les traités et blâme les autres". Selon Habeck, la stratégie de Poutine est transparente : "affaiblir le large soutien [européen] à l'Ukraine et diviser notre société". Pour répondre à cette menace, défend le journal munichois, il faudra "de l'unité et une action concentrée". Parmi les mesures envisagées : "la construction très rapide d'infrastructures de gaz naturel liquéfié, le remplissage des installations de stockage et la réduction de la consommation". Cette situation avait été anticipée par la Commission européenne, qui a proposé la semaine dernière une législation visant à réduire la consommation des Etats membres de 15%. Kiev met en garde contre un chantage russe "La Russie joue ici un jeu stratégique", explique au Wall Street Journal Simone Tagliapietra, chargé de mission au groupe de réflexion économique Bruegel, qui a son siège à Bruxelles. "Faire fluctuer un flux déjà faible est préférable à une coupure totale. Cela permet de manipuler le marché et d'optimiser les répercussions géopolitiques", analyse-t-il. Mais cette stratégie n'est pas sans risque pour Moscou, constate le quotidien financier américain, "car les exportations de gaz, contrairement à celles de pétrole, sont limitées par l'infrastructure des gazoducs, dont la plupart sont dirigés vers l'Europe". Et il sera encore plus complexe pour la Russie de vendre son gaz à d'autres clients que pour l'Europe de lui substituer de nouveaux fournisseurs. Pendant que l'Union européenne discute de la meilleure stratégie à adopter, l'Ukraine, par la voix de Kyiv Independant, met en garde ses voisins occidentaux contre le "chantage" russe. Le journal en ligne rappelait le 22 juillet que le président Volodymyr Zelensky avait imploré le Canada de ne pas y céder, en refusant de renvoyer la turbine réclamée début juillet par la Russie. Ottawa l'a tout de même fait, ce qui a, selon le média ukrainien, "envoyé un message dangereux à Moscou : le chantage marche". Trois jours plus tard : Moscou a utilisé son principal pipeline de gaz "comme une arme".
Les Etats-Unis passent en tête des pays exportateur de gaz liquéfié
La guerre en Ukraine et les sanctions occidentales imposées à la Russie ont chamboulé l'ancien classement des exportateurs de gaz. Les Etats-Unis sont devenus le plus grand pays exportateur de gaz naturel liquéfié au monde, coiffant au poteau, le Qatar et l'Australie qui se disputaient le titre de premier exportateur mondial de gaz naturel liquéfié. L'agence américaine Energy Information Administration (EIA) a déclaré que les Etats-Unis sont devenus le plus grand pays exportateur de gaz naturel liquéfié au monde, au cours du premier semestre 2022, en raison des répercussions de la guerre menée par la Russie contre l'Ukraine. L'EIA (gouvernementale) a déclaré dans un rapport, rendu public lundi soir, que les exportations américaines de gaz naturel liquéfié ont augmenté de 12%, sur une base annuelle, au cours du premier semestre de cette année, pour atteindre les 11,2 milliards de pieds cube par jour. Les pays d'Europe et le Royaume-Uni comptent parmi les principaux importateurs de gaz naturel liquéfié américain, dans le cadre d'une stratégie pour se défaire de la dépendance aux sources d'énergie russes.