L'Expert international en planification urbaine et développement territorial nous parle de son ouvrage « Rabat, un printemps confiné » édité avec le concours de Cités et Gouvernements Locaux Unis d'Afrique - CGLU». Une « promenade urbaine » dans la ville lumière du Royaume et capitale africaine de la culturequ'on découvre ou redécouvre pendant la période de confinement à travers une lecture de son histoire et de sa mémoire, de son présent et des espaces de vie de ses habitants. Préfacépar Jean-Pierre Elong Mbassi, président du CGLUA qui se déclare « Rbati d'adoption » et grand amoureux de la capitale, l'ouvrage de 180 pages présenté ce samedi 27 février 2021 à Rabat, se veut d'abord « un hommage à la ville de Rabat, à ses habitants, à ses femmes et ses hommes et à sa jeunesse », selon Monceyf Fadil, qui nous confie que la description de la capitale pendant le confinement était d'abord un « défi ». Le secrétaire général de CGLU-Afrique, Jean Pierre Elong Mbassi, a indiqué pour sa part que Monceyf Fadili a permis aux lecteurs de « pénétrer dans l'ensemble des quartiers de Rabat, cœur battant du Royaume et la déambulation à laquelle il nous invite à travers la ville montre à quel point, à chaque moment, Rabat peut combiner authenticité et modernité ». Inscrite depuis 2012 au patrimoine mondial de l'Unesco, Rabat, ville lumière et capitale marocaine de la culture sur instructions royales depuis 2014 a été retenue lors du sommet Africités 8 (Marrakech-2018) comme capitale africaine de la Culture pour la période 2020-2021. Monceyf Fadili, ancien représentant au Maroc de l'ONU-Habitat estime que « les générations qui viendront devraient continuer à célébrer la capitale du Royaume comme celles qui l'ont précédées ».
Votre livre est un bel hommage à la ville de Rabat en temps de pandémie ? Oui, l'inspiration m'est venue de cette crise sanitaire. Nous nous sommes retrouvés dans une ville à l'arrêt, toute la dynamique de la ville s'est trouvée stoppée net, avec un très grand sens du civisme. Tous les indicateurs mondiaux ont fait ressortir les bonnes pratiques du Maroc, aussi bien en termes de la gestion de la pandémie qu'en post pandémie (taux de vaccination, manière dont l'opération est organisée...). En tant que spécialiste de l'urbain et gestionnaire de la ville, je voulais rendre un hommage à la ville de Rabat, à ses organisateurs et aux autorités locales. L'ouvrage est aussi un hommage à ses habitants, à ses femmes, à ses jeunes, à ses enfants, mais aussi un hommage à un ami sénégalais qui nous a quitté récemment, emporté par la Covid, le Dr. Alioune Badiane, un amoureux de Rabat et du Maroc et un des défenseurs les plus influents du Nouvel Agenda Urbain en Afrique, et avec qui j'ai mis en œuvre le Programme contre la pauvreté urbaine au Maroc. C'est un peu une lecture que j'ouvre sur l'Afrique, une manière de dire que la vie continue, la vie est plus forte que tout, et aujourd'hui, l'entité qui porte les espoirs, c'est représenté par la ville de Rabat elle-même.
Vous dites que c'est une « promenade urbaine » dans la ville à travers sa mémoire ?
En regardant cette ville qui est aussi ma ville, puisque j'y vis depuis plus de 30 ans, je me suis dit qu'il y a quelque chose qui se passe et qu'il faut traduire en termes de ressenti. Ma formation d'architecte et d'urbaniste m'a beaucoup aidé pour décliner ce ressenti en promenade urbaine, une espèce de déambulation urbaine, d'itinérance éducative, où on retrouve la mémoire, le présent et le passé. Rabat est la ville qui détient le plus grand nombre de monuments en termes d'ancienneté, depuis l'époque romaine en passant par les Almoahades, les Mérinides, et toutes les dynasties Alaouites, jusqu'aujourd'hui. C'est aussi une ville qui se projette sur l'avenir : nous avons aujourd'hui le grand théâtre de Rabat, qui est une œuvre futuriste signée Feu l'architecte anglo-irakienne Nezha Hadid, avec la grande tour Mohammed VI. C'est une ville qui bouge, une ville des ambitions : Rabat est une somme d'activités et d'intelligences collectives par ses habitants, hommes, femmes et jeunes ; je voulais traduire cela de manière accessible en partageant cette passion que j'ai pour la ville, en n'omettant aucun quartier. Cette itinérance n'a pas été uniquement culturelle, elle s'est faite y compris dans les quartiers dont on ne parle pas très souvent : les deux grands quartiers Yaacoub Mansour et Youssoufia qui représentent à eux seuls les 2/3 de la population et qui sont à travers leur jeunesse, leurs femmes, leurs enfants et leurs inspirations, le futur de la ville. C'est vers eux qu'il faut se trouver aujourd'hui parce que la pandémie nous a appris que nous sommes dans une démarche de solidarité et cette démarche d'inclusion et de partage doit inclure tout le monde, sans exclure qui que ce soit, ce qui rejoint l'engagement fort du Maroc vis-à-vis des Nations Unies, de ne laisser personne pour compte. Rabat est aussi une ville aussi de sens par rapport à l'appropriation à l'espace et à l'identification aujourd'hui. Ce livre montre que nous sommes dans une démarche commune, unifiée et c'est ce que je voulais partager en toute simplicité.
Vous avez écrit votre livre pendant la période de confinement. Est-ce que la démarche pour son écriture était différente ? J'ai fait un aller-retour entre une ville qui est confinée tout en traduisant les endroits de confinement dans leur vie. C'est-à-dire que je j'ai fait un aller-retour entre le confinement et le déconfinement. C'était une double lecture et une double écriture, celle du moment présent, au moment où nous sommes privés de cette liberté de circulation, que j'ai appelé « un temps arrêté », et en même temps, « un temps mobile, dynamique ». Chaque espace a été traité en confinement et en déconfinement pour mieux prendre la valeur de ce qu'il est. En ces temps difficiles où la culture a été lourdement impactée par la crise sanitaire, l'écriture a été pour moi un moyen de rapprocher les personnes qui étaient confinées et je suis très optimiste pour l'avenir.
Pour vous, Rabat et Salé sont deux villes indissociables ? Oui, c'est un tandem historique qui remonte (Salé vient de Chellah qui est un mot phénicien qui représente un peu le toponyme), ... ce sont des vocations qui sont une, le pont et le tramway le symbolisent très bien, moi-même, j'ai des origines de la ville de Salé, et je me sens très bien à Rabat et n'oublions pas que Salé est une ville qui a 12 siècles d'existence, qui est un creuset d'histoire, Rabat est la capitale mais pour moi, je crois que c'est un tout et je dirais que l'avenir de la capitale c'est Rabat-Salé et son agglomération.