L'employeur ne peut modifier certains éléments du contrat de travail sans l'accord du salarié. C'est le cas du changement de poste. La qualification de poste est un élément substantiel du contrat, qui ne peut être modifié sans l'accord du salarié. M. Abdelaziz refuse de rejoindre son nouveau poste et ce malgré l'insistance de son chef de rang. L'origine de ce conflit remonte au mois dernier. Les clients de l'Hôtel ont adressé plusieurs réclamations concernant le comportement de M. Abdelaziz. Celui-ci travaille comme serveur au sein du restaurant de l'hôtel, très connu pour la qualité de son service et sa clientèle hautement distinguée. Il ressort de ces réclamations que M. Abdelaziz agit de manière peu courtoise et dépasse souvent son statut de serveur en s'insérant dans les affaires des autres. La direction n'a évidemment pas admis ce comportement irresponsable. Le 27 juillet 2012, le salarié introduit une réclamation chez l'inspecteur du travail par laquelle il expose qu'il était au service de l'Hôtel depuis le premier octobre 2010 au 26 juillet 2012 date à laquelle il a été abusivement licencié, sous prétexte qu'il a refusé de passer d'un poste de serveur à celui de plongeur. L'employeur estime pour sa part que face à la gravité d'une faute commise par le salarié, la loi lui permet de le réaffecter à autre poste. le salarié voit les choses sous un autre ongle. Il considère que ce nouveau poste (plongeur) n'est pas compatible avec ses compétences et surtout qu'il ne correspond pas à ses aptitudes professionnelles (diplômé en hôtellerie avec 10 ans d'expérience). Où se trouve la frontière entre ce que l'employeur peut changer et ce que les salariés sont en droit de refuser ? Les éléments essentiels d'un contrat. En vertu de l'Article 723 du dahir des obligations et des contrats : le contrat du travail (oral ou écrit) est le contrat par lequel le salarié s'engage moyennant un salaire que l'autre partie s'oblige à lui payer, à fournir à cette dernière ses services personnels pour un certain temps ou à accomplir un fait déterminé. Il s'organise autour de deux types de conditions, à savoir les conditions essentielles et les conditions non essentielles. Pour le premier type de condition, la jurisprudence ne permet pas de les modifier sans le consentement des parties, concernant le second groupe, il est possible à l'employeur de les modifier unilatéralement. En principe toute clause précise et claire du contrat de travail constitue un élément essentiel de celui-ci. La jurisprudence permet d'identifier les éléments essentiels de contrat à savoir la rémunération, la qualification, le poste, le grade, les responsabilités, les attributions, la durée du travail, le type de contrat de travail et le lieu de travail (en l'absence d'une clause de mobilité ). En dehors de ces éléments, le Code du travail reconnaît à l'employeur un pouvoir de direction et de gestion, par lequel il peut imposer aux salariés certains changements et ce afin de permettre à l'entreprise d'évoluer et de s'adapter aux changements économiques et technologiques. La position de la Cour de Cassation La qualification de poste est un élément substantiel du contrat, qui ne peut être modifié sans l'accord du salarié, notamment si elle entraîne l'exécution de tâches différentes, la perte ou la réduction de la responsabilité du salarié. Il est en droit de refuser cette modification, même lorsque la rémunération et une partie des attributions antérieures sont maintenues. Il va sans dire que l'adjonction de tâches correspondant à la qualification du salarié, ne constitue pas une modification du contrat, mais un simple changement de ses conditions non essentielles. Dans une affaire similaire au cas précité, la cour de cassation approuve la décision des juges de fond en accordant au salarié le paiement de l'indemnité de congé annuel d'un montant de 1312,60 dirhams , des dommages et intérêts d'un montant de 90 417,60 dirhams et la somme de 51681 dirhams pour le préavis. (voir arrêt N°429 dossier n° 827/5/1/2008) La cour de cassation a estimé que le contrat du travail s'inscrit dans les principes généraux encadrant les obligations et les contrats et ce en dépit de la subordination du salarié à son employeur. Elle s'est basée ainsi sur l'article 230 qui prévoit que « Les obligations contractuelles valablement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel ou dans les cas prévus par la loi. » La cour a en outre précisé qu' : « Etant donnée que la carte de travail du salarié détermine sa qualification d'emploi en tant que serveur, l'employeur qui a changé cette qualification en demandant au salarié d'occuper le poste de plongeur sans son consentement, a violé les dispositions contractuelles ce qui le rend responsable de la rupture du contrat et ce malgré l'abandon du salarié de son poste d'emploi. » . * Tweet * *