L'UNTM négocie un nouveau virage. C'est du moins ce qui ressort d'une plateforme de débat que le SG Mohamed Yatime compte soumettre au prochain congrès (les 10 et 11 avril). A la veille de son cinquième congrès, la centrale syndicale, tient, en effet, à clarifier d'abord ses liens avec le PJD et adopter un nouveau positionnement social. Pour commencer, le syndicat islamiste entend troquer les manifestations de contestation contre la force de proposition. Le syndicat qui est de toutes les grèves que le pays a connues ces dernières années estime que, finalement, ce mode d'action n'est pas prioritaire. Il fait désormais sienne la culture du dialogue et les «méthodes pacifiques de règlement des différends». Or, estime Abdellah Attache, conseiller UNTM à la deuxième Chambre, «la grève est une arme de persuasion importante et fondamentale». Pour sa part, «le Maroc est-il prêt pour un tel changement de méthode de travail ? Les concepts de la participation et de la proposition peuvent-ils faire avancer les revendications des syndicats ?», s'interroge le politologue et membre du Conseil national du PJD, Abdelali Hamieddine. «Un tel changement dans le mode d'action syndicale exige, en effet, un changement du contexte actuel du pays», explique le politologue. «La grève reste encore une méthode efficace pour résoudre les problèmes sociaux», ajoute-t-il. Bref, la question sera tranchée dans dix jours. Mohamed Yatime a de fortes chances de succéder à lui-même. Outre ce point, l'UNTM tient également à clarifier ses liens avec le PJD. L'UNTM, créée par feu Abdel Karim Kharg en 1973, entend marquer un point de rupture avec le parti. «L'UNTM est un cadre organisationnel indépendant du PJD. Ses instances dirigeantes prennent leurs décisions et adoptent des positions en fonction d'une analyse objective de l'action du gouvernement et selon le positionnement politique du PJD». Cette prise de distance inscrite dans la plateforme qui est soumise au congrès devrait être toutefois débattue avant d'être validée définitivement. Sauf que dans le même document, le syndicat estime qu'il existe une «relation dialectique entre le politique et le social, entre la démocratie politique et la démocratie sociale». Cela d'autant que son SG est également membre du secrétariat national du PJD. Le document proposé pour le prochain congrès, lui est clair sur ce point : «l'UNTM ne cache pas l'existence de points d'intersections, entre ses structures et celles du PJD à différents niveaux. Mais l'UNTM n'est pas un syndicat du PJD». Ce qui est une contradiction en soi. «Il peut y avoir des points de rencontre entre les décisions du syndicat et du parti, certes. Mais il nous arrive aussi de prendre des décisions contraires aux orientations du parti», explique Abdellah Attache. Par ailleurs, les deux parties ont veillé à sceller ces liens dans le cadre d'un accord de partenariat signé l'année dernière. Quid du MUR ? Il y a quelques mois, à la veille des élections communales du 12 juin dernier, des membres de l'UNTM ont claqué la porte du syndicat avec fracas. Motif : l'ingérence du Mouvement Unicité et Réforme dans les affaires de la centrale. «Les liens entre l'UNTM et le MUR ont été coupés il y a très longtemps», explique Abdelali Hamieddine. «Le MUR disposait d'une commission syndicale, mais après la refonte de l'UNTM, cette commission a été dissoute dans le syndicat», explique ce professeur de sciences politiques. Autre fait qui présage d'un changement dans la manière de faire du syndicat, son intention de renouveler complètement tous ses organes. Or, renouvellement des organes ne veut pas dire forcément changement de personnes. Abdelali Hamieddine estime que la centrale «vient de sortir d'une période transitoire». Et si changement il y a, il ne devrait pas toucher plus de 40% de la direction actuelle de la centrale. Sauf grande surprise, l'actuel SG Mohamed Yatime a de fortes chances de succéder à lui-même. PositionnemenNi pour, ni contre le gouvernement Une position pour le moins incongrue. «Nous ne sommes pas un syndicat d'opposition au gouvernement. Nous ne le soutenons pas non plus». Ni pour, ni contre donc. Mais cela n'empêche pas la centrale islamiste d'accuser le gouvernement de manquer de sérieux pour avancer dans le dialogue social et de ne chercher qu'à gagner du temps. Le syndicat fait, par ailleurs, remarquer que l'ordre du jour des réunions entre syndicats et gouvernements pour les années 2010, 2011 et 2012 «revient essentiellement sur des points que les deux parties ont déjà tranché lors des dernières rencontres». Il reproche au gouvernement de ne pas aborder les points cruciaux tels que l'augmentation des salaires, le réaménagement des impôts sur le revenu ou encore de la promotion et de la réforme du système salarial des fonctionnaires.