Et si demain, l'emploi se mettait «au vert» ? Avec 200.000 emplois à créer à l'horizon 2025, l'économie verte constitue en effet l'un des plus importants segments générateurs d'emplois futurs sur le long terme. Le Maroc, où l'emploi s'inscrit parmi les plus grandes problématiques sociales, pourrait en effet faire d'une pierre deux coups, dès lors que ses ambitions dans l'économie verte, notamment les énergies renouvelables, seront concrétisées. D'un côté, l'économie verte est incontestablement une niche de croissance à développer pour l'avenir au vu des contraintes écologiques grandissantes. De l'autre côté, il s'agit aujourd'hui pour les jeunes, étudiants soient-ils, en formation ou même en poste, d'une alternative intéressante pour leur carrière. À ce titre, le Conseil économique et social (CES), s'est récemment penché sur la question, afin de déterminer le potentiel de l'économie verte en matière de création d'emploi. Il s'avère ainsi que «le potentiel d'emplois que peuvent générer les filières des énergies renouvelables au Maroc est estimé à plus de 23.000 emplois à l'horizon 2020». L'éolien et le solaire en «bipôle» Ceci dit, la concrétisation du potentiel d'emplois du secteur des énergies renouvelables est conditionnée par un niveau important d'intégration des diverses filières industrielles, comme le confirme une récente étude du ministère de l'Energie, des mines, de l'eau et de l'environnement. Le CES note que dans l'éolien, par exemple, une «intégration industrielle maximaliste» de la chaîne de valeurs du secteur générera près de quatre fois plus d'emplois que l'option «intégration faible», soit plus de 7.400 postes, dont plus de 5.700 dans l'instalation et le reliquat dans l'exploitation. Pour ce qui est du solaire, l'Agence MASEN prévoit d'ores et déjà dans sa stratégie d'introduire la notion d'intégration industrielle dans le processus de développement de l'ensemble de ses projets. Dans ce contexte, et selon les estimations produites par la tutelle, l'atteinte de taux de 67% de puissance issue du CSP (Concentrated Solar Power) permettrait à la filière de générer près de 7.400 emplois. Ils concerneront principalement le génie Civil, l'opérationnel, l'installation des collecteurs et la maintenance. Notons à ce titre que le plan de développement de MASEN prévoit d'apporter des réponses en termes de formation de compétences, en adéquation avec les besoins en profils métiers, et un développement économique et social local des régions où l'opérateur est présent. En attendant, il y a lieu de souligner que de toutes les filières des énergies renouvelables, c'est le photovoltaïque qui présente le plus grand potentiel de création d'emplois. En effet, selon les données rapportées par le CES, la filière pourrait avoir besoin de plus de 12.200 postes d'emplois dans l'installation et l'exploitation, dans le cas où le plan solaire marocain est concrétisé de manière à ce que les deux tiers des énergies créées proviennent du photovoltaïque. «Comme pour l'éolien, la méthodologie utilisée pour le chiffrage des emplois générés par le plan solaire montre que le potentiel d'emploi de ce secteur dépend en grande partie du niveau d'intégration mis en place sur le territoire national», résume le CES. L'option «67% de photovoltaïque» représente en effet le potentiel d'emploi le plus élevé à l'horizon 2025. Il convient cependant de signaler que l'étude ne prend pas en compte les nouvelles technologies de conversion photovoltaïque, qui ont aujourd'hui atteint un niveau de maturité industrielle suffisant et qui offrent une compétitivité intéressante du coût du kW, pour justifier un déploiement technologique au Maroc, au moins via l'installation de sites pilotes de faible puissance dans un premier temps. Les reco' du CES Sur un autre registre, force est de constater qu'autant de potentiel ne saurait se concrétiser sans une attention particulièrement orientée vers la déclinaison du programme d'intégration des filières de l'éolien, du photovoltaïque, du solaire thermique à concentration (CSP), et de la biomasse dans la politique industrielle du Maroc et au niveau des régions. En outre, la création d'un cadre d'insertion des industries nationales dans les grands projets nationaux est un facteur indispensable. Pour ce faire, il s'agit, selon le CES, de lancer des actions de remise à niveau et de préférence nationale. Le Conseil recommande par ailleurs de mettre en place un instrument de suivi et de mesure périodique du niveau d'intégration atteint par la politique nationale de déploiement des énergies renouvelables,ainsi que de développer les filières précitées, par la mise en place de dispositif d'incitation, de remise à niveau, de normalisation et d'accompagnement des acteurs économiques. Ces derniers devront en effet être incités à investir dans les maillons de la chaîne de valeur des énergies renouvelables et l'émergence d'un savoir-faire technologique et industriel marocain. Quid de la biomasse ? La biomasse, selon le CES, peut être qualifiée de source d'énergie renouvelable encore non exploitée au Maroc. Dans le scénario présenté par le Conseil, «les sous-filières de biocarburant et de biogaz constituent à elles seules un gisement d'emplois équivalent à celui des autres énergies renouvelables cumulées, soit plus de 5 millions d'emplois dans le monde à l'horizon 2050». Les perspectives de croissance dans le segment de la biomasse au Maroc ne sont pas négligeables et prévoient la création d'emplois dont le nombre dépend des différents scénarios du mix énergétique. Le scénario le moins optimiste, dit «à moindre coût», prévoit la création de prés de 1.300 emplois. Plus du triple pourrait être créé dans un scénario plus optimiste, dont 40% seraient des opérateurs et agents de maintenance. Il convient donc, selon le Conseil, d'accorder à la biomasse plus d'attention dans le cadre du développement régional et notamment par la promotion des petites et moyennes puissances énergétiques à travers tout le territoire.