Droit de grève : les Conseillers adoptent à la majorité le projet de loi en commission    Rabat: La jeunesse, acteur clé du développement dans la zone euro-méditerranéenne (réunion de la jeunesse du PPE)    Après sa visite en Algérie, la Rapporteuse spéciale de l'ONU exprime son mécontentement face à la persistance du régime algérien à arrêter et criminaliser les défenseurs des droits de l'Homme    El Ktiri : "Le soulèvement du 31 janvier 1944, symbole de la mobilisation nationale pour la dignité"    Marché des changes : le dirham quasi stable face à l'euro et au dollar    MRE : les transferts grimpent à plus de 117,7 MMDH en 2024    Marché des capitaux : près de 106,7 MMDH de levées en 2024    Mezzour : "Le recours au financement boursier stimule l'émergence de nouvelles industries"    Ziyech : Ma première participation avec Al-Duhail est une étape importante et une expérience idéale au Qatar    Le Maroc relève le défi et impressionne le monde... Des stades de classe mondiale réalisés en un temps record par des mains marocaines    Médecine de sport et antidopage: Dr Abouali Fatima citée en exemple sur le Continent    PL. J24: Les Reds en déplacement pour assurer et rassurer !    Tanger: trois individus arrêtés pour piratage d'appels téléphoniques    Chutes de neige et fortes pluies localement orageuses dans plusieurs provinces    Un fonctionnaire de la prison locale El Arjat 2 se suicide avec son arme de service (DGAPR)    Akhannouch : "Le gouvernement poursuit la réforme de l'enseignement dans le cadre des Hautes Directives Royales"    Un homme poignarde son père en pleine rue à Agadir : Sévérité de la peine et cadre juridique du parricide    Dans l'intimité d'un collectionneur : Yves Saint Laurent vu par Hamish Bowles    Essaouira : Inscriptions ouvertes pour la 2e édition de « Berklee at Gnaoua and World Music Festival »    CAN 2025 au Maroc : Le calendrier complet des matchs    Washington confirme l'entrée en vigueur samedi de droits de douanes contre la Chine, le Canada et le Mexique    Missing Moroccan students in London found, police confirm    USA: Plusieurs blessés dans le crash d'un petit avion près d'un centre commercial à Philadelphie    Nasser Bourita réitère la position constante du Maroc soutenant le Conseil de direction présidentiel en tant qu'autorité légitime au Yémen    Diaspo #374 : Mohamed Bouzia, une migration au Pays-Bas à travers le journalisme    81 % des Français favorables à des sanctions économiques contre l'Algérie si elle ne reprend pas ses ressortissants    Le PI déterminé à conquérir la présidence du prochain gouvernement    Au Pakistan, vaste purge au sein de l'Agence fédérale d'investigation après le naufrage meurtrier de migrants au Maroc    Mort de Horst Köhler, ancien envoyé personnel des Nations unies pour le Sahara marocain (2017-2019)    Maroc-Bavière : Mezzour et Gotthardt explorent les possibilités d'une coopération stratégique    Marrakech-Safi : des initiatives pour renforcer l'entrepreneuriat féminin    Un homme interpellé à Mechra Bel Ksiri en possession de 922 comprimés psychotropes    L'Oriental fait le point du projet de développement régional doté de 250 M$    Recettes voyages : un record de 112,5 MMDH en 2024    Liga : L'Athletic Bilbao recrute l'attaquant marocain Maroan Sannadi    Le Cinéma marocain à l'honneur au Festival International du Film de Dublin    Le Musée du Football Marocain ouvre ses portes : un voyage au cœur de la passion nationale    Lekjaa : La CAN 2025, une étape clé vers le Mondial 2030, avec un Maroc-Argentine en ligne de mire    Le journaliste Ayoub Errimi n'est plus, le monde médiatique en deuil    Les défis des PME au centre de la 166e session ordinaire de l'assemblée générale du CESE    Omar Hilale élu à l'unanimité vice-président de la Commission de consolidation de la paix des Nations Unies pour l'année 2025 : Le Maroc continue de renforcer son rôle dans l'instauration de la paix mondiale    SM le Roi adresse un message de condoléances à Donad Trump suite à l'accident aérien à Washington    Le Turc Baykar implantera «uniquement» une infrastructure de maintenance pour ses aéronefs vendus au Maroc    Ouverture des inscriptions pour la 2e édition du programme « Berklee at Gnaoua and World Music Festival »    Cinéma : Brady Corbet impose son talent avec "The Brutalist"    Exposition : "Reconversion" à la galerie Dar D'art de Tanger    La cellule de Had Soualem liée à Daech illustre le danger de l'enrôlement en ligne    Le Président de la Transition en Syrie : Nous travaillons pour l'unité du pays et la paix civile    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Comme tout le monde
Publié dans La Vie éco le 30 - 03 - 2020

Tu sais, comme tu me connais, que j'aurais préféré passer par la poste, écrire à la main sur du bon papier et rester fidèle à cette vielle habitude qu'on a perdue. Après tout, la main est le premier outil de l'homme. Mais parce que nous sommes passés, sans coup férir, à l'ère numérique, aux mails et autres messageries, on s'est mis à cultiver l'oubli et la paresse.
Cher ami. Voici bien longtemps qu'on ne s'est pas écrit et tout aussi longtemps qu'on ne s'est pas vu. On se connaît depuis le début de notre jeunesse, résidant dans le même quartier et fréquentant les mêmes lieux dans notre ville natale. Et puis un jour, après l'obtention du bac, tu as quitté la ville et le pays, alors que moi je ne me suis éloigné que de la première. J'ai juste traversé le Bouregreg, comme je te disais. Chacun a fait sa vie là où il est et avec les moyens dont il disposait : Toi dans un petit pays d'Europe riche et prospère, et moi dans un pays du Sud, en développement qui aspire à la richesse et à la prospérité. Mais ce n'est pas de ces comparaisons et parcours parallèles que je voudrais te parler aujourd'hui dans cette lettre. Peut-être plus tard, dans une autre correspondance, si tu es d'accord et si tu réponds. Mais peut-être ne répondras-tu pas, comment le saurais-je maintenant que j'écris ces lignes ? Tu sais, comme tu me connais, que j'aurais préféré passer par la poste, écrire à la main sur du bon papier et rester fidèle à cette vielle habitude qu'on a perdue. Après tout, la main est le premier outil de l'homme. Mais parce que nous sommes passés, sans coup férir, à l'ère numérique, aux mails et autres messageries, on s'est mis à cultiver l'oubli et la paresse. L'oubli, parce qu'on écrit vite et la paresse du fait de l'encombrement décourageant de nos boîtes de ce trop-plein de mots et d'images, la plupart inutiles. Alors on répond, lorsqu'on répond, vite, mal et on passe à autres choses. Pas le temps.
Ah le temps, voilà qu'on en dispose désormais à profusion, et tu en as mis du temps pour m'envoyer un court message afin de savoir comment je vais et comment va le pays qui t'a vu naître en ces temps de confinement généralisé. A vrai dire, je m'y attendais un peu, car j'ai reçu d'autres messages d'amis et de proches qui se sont enquis comme toi de la mienne situation et celle de la famille. Sans compter ceux qui vous encombrent de faits et gestes et de soi-disant « bonnes infos » hyper anxiogènes sur la situation, infos qu'ils ont eux-mêmes reçues et transmises viralement. Mais c'est là certainement le cas de tout le monde. Non ? Ah, cette expression « tout le monde !». Jamais elle n'aura été utilisée à bon escient. « Comment vas-tu ? Comme tout le monde » Mais est-ce que tout le monde, à travers le monde, va comme tout le monde ? Et comment va le monde tel qu'il ne va pas bien ? Vaste sujet à discuter ou peut-être pas. Tu me diras, car tu as toujours aimé discuter de ce qui ne va pas bien dans le pays et dans le monde. A partir de là-bas, dans ton petit et riche pays d'adoption. Nous n'avions pas toujours la même perception des choses. Toi à partir de ta lecture de la vie ici vie de là-bas et de tes « lectures » surtout, parfois justes et bien argumentées ; et moi en partant de mon vécu, de la réalité, du bitume et de la terre sur laquelle je marche. A propos de bitume, je ne sais pas si tu t'en souviens. Moi si. La première fois que tu es retourné au pays et au quartier, après un long exil volontaire, c'était jour de fête et jour de pluie. Fête du mouton je crois. On avait marché dans les rues boueuses de notre Jeunesse rabougrie et impécunieuse. Mais au moment où je m'attendais à une éruption soudaine d'une nostalgie pour le temps de jadis, tu m'as dit, en slalomant entre les flaques d'eau et les peaux de mouton étalées sur ce qui n'était pas encore une chaussée à l'époque : « Dis-moi, il est très sale notre quartier !» Je dois t'avouer aujourd'hui que le « notre quartier » m'avait rassuré. Venant d'un pays qui a fait de l'hygié­nisme une religion, riche contrée feutrée où tu as fait ta vie depuis plus de quatre décennies, je m'attendais à un reniement fait de dégoût ou de désolation, sinon de mansuétude. En fait, tu as retrouvé le folklore habituel de l'Aïd, fait de peaux, de coutelas sanguinolents, de cornes et d'odeurs mêlées de rires d'enfants et d'engueulades entre adultes. Mais pendant notre marche, tu es resté silencieux et je te sentais un peu triste, peut-être même inquiet. Il faut dire qu'à cette époque la situation politique et économique du pays n'était pas rose. Ton retour avait coïncidé avec les premières pluies, («bienfaitrices» comme on disait à la météo de la télé, chaîne unique et en noir et blanc, en ce temps) après près de quatre années consécutives de sécheresse. Comme tu avais fait de hautes études d'économie là-bas, tu m'avais longuement parlé de ce fameux programme d'ajustement structurel (PAS) imposé à notre pays par le FMI et la Banque mondiale. Euphémisme pour dire qu'il fallait se serrer la ceinture et serrer les dents. Moi j'ai ri du ton sérieux, docte et solennel, que tu as pris pour me présenter et expliquer les mesures coercitives auxquelles peuple et responsables devraient faire face... Non, je ne fais aucun rapprochement entre hier et aujourd'hui. La mémoire, c'est juste la mémoire qui navigue et qui s'égare... «Mon beau navire, Ô ma mémoire...», disait le poète... Cher ami. Tu vas peut-être trouver que j'ai été un peu long dans mes évocations et penser que je fais trop confiance à ma mémoire pour me rappeler tous ces petits détails. Tu auras raison dans les deux cas, et c'est pour cela que je m'en vais conclure cette missive en souhaitant à nous et à tout le monde un bon, doux et fécond confinement.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.