* Les déductions pour charges de famille sont quasiment absentes. Elles datent de lindépendance. * La cherté du coût de la vie incite à revoir le système fiscal actuel dans sa composante «famille». La hausse du coût de la vie durant ces derniers temps a mis à nu certaines défaillances. Cette hausse résulte de celle des différents prix des matières premières à léchelle internationale, de la flambée du prix du pétrole, de la sécheresse, de lapparition de grands géants industriels autant de facteurs qui ont contribué, dune manière ou dune autre, à un tel état de fait. Cette hausse est dautant plus ressentie dans un contexte où la fiscalité appropriée à la famille fait défaut. Nombreux sont ceux qui prétendent que dans un futur proche, on commencera à parler de rébellions. Lexemple de la ville de Sefrou est un cas qui incite à moult réflexions. Les dernières recommandations du Patronat portent toutes sur les entreprises dans sa composante IS (voir www.financesnews.ma) et rien na été prévu pour la famille. Idem pour les différents programmes élaborés par les partis politiques à loccasion des élections législatives 2007. Sur le plan fiscal, la réduction de lIS a été le point nodal de leurs fameux programmes. Tout ceci laisse entrevoir quune fiscalité dédiée à la famille demeure reléguée à un rang inférieur. Et donc les familles continueront de subir la cherté de la vie comme une épée de Damoclès. A en croire les analystes, la spirale inflationniste nen est quà ses débuts. Daprès Youssef Obouali, fiscaliste, «je crois que les déductions pour charge de famille sont très dérisoires pour ne pas dire inexistantes, soit 180 DH/an, équivalant à 15 DH/mois voire 5DH/jour. Pis encore, depuis lindépendance, le Maroc na jamais actualisé les allocations familiales et les économies fiscales pour les enfants à charge». Il ajoute que dans un pays comme la France, plus le nombre denfants est élevé, plus lassiette fiscale se rétrécit. Certes, le but est dencourager les naissances, ce qui nest pas le cas pour le Maroc, mais encore faut-il reconnaître quune fiscalité adaptée à la famille aurait des incidences positives. Par exemple, si lon prend le cas de lenseignement, on pourrait instaurer des mesures de déductions fiscales sur les frais de scolarité pour répondre à lobjectif que le secteur privé est amené à jouer dans lenseignement, soit 20% contre 5% actuellement. Équité, neutralité voire efficacité ! A loccasion de chaque Loi de Finances, le Directeur général des impôts met laccent sur les trois critères : équité, neutralité et efficacité. Des termes qui demeurent encore un vu pieux dans un système comme le nôtre. En se centrant sur lindividu, notre régime dimposition ne peut assurer adéquatement léquité entre les familles. Cest ce qui explique les distorsions qui existent actuellement. Daucuns estiment que lenfant na pas de «personnalité fiscale» jusquà lâge adulte et que le fait davoir des enfants est un choix libre qui incombe aux parents. A cette problématique, notre fiscaliste répond : «même si les enfants sont un choix libre des parents, lEtat ne doit pas démissionner de ses obligations. Autrement dit, cest lorsque lenfant est petit quil doit être pris en charge par ses parents; cest à cet âge quil doit ouvrir le droit à des déductions fiscales. Lorsquun enfant devient adulte, il devient lui-même un contribuable et donc peut parfaitement participer au financement du Budget de lEtat. Donc, cest une raison pour laquelle il faut considérer lenfant en tant quun problème fiscal comme pour linvestissement». La prise en considération des enfants dans les déductions fiscales implique une équité entre les familles. Léquité revêt une importance fondamentale pour donner à tout régime fiscal une facture de crédibilité. La crédibilité dun système est un facteur important dans la décision de tout citoyen de se conformer à la demande des pouvoirs publics et daccepter quune partie de ses revenus soit prélevée pour le bien commun. Si lon poursuit notre examen des objectifs du régime fiscal, on en vient aux critères de neutralité et defficacité qui préoccupent davantage, en général, lEtat que le citoyen. La neutralité sème aussi le doute lorsque lon veut la contrer à légard de lenfant : de façon générale, lenfant na pas de personnalité «fiscale» avant lâge adulte. Cest une personne à charge dépendante de ses parents, une réalité qui vient affecter la capacité de payer des contribuables. En jargon fiscal, lenfant jouit de peu de considération comme entité propre. Par ailleurs, lefficacité, critère important pour tout régime fiscal, fait encore défaut. Un régime fiscal doit donc préserver les effets positifs des incitations économiques. Or, il ne faut surtout pas oublier que dans le cas où une famille ayant des enfants à charge bénéficie dune fiscalité appropriée, ces enfants sont les agents productifs de demain. Au risque de ne pas voir ces enfants élevés nimporte comment, une fiscalité adaptée simpose. Dans un pays comme la France, le Conseil de la famille et de lenfance estime quil est primordial de poursuivre dans un régime fiscal des objectifs déquité et defficacité. Léquité dabord, pour que le moins de familles possible ne soient confinées dans la pauvreté. Léquité aussi, pour que toutes les familles, quels que soient leur nature et le nombre de leurs membres, puissent avoir droit à un traitement équivalent. Une chose est sûre et une évidence simpose : si privée soit-elle, la décision prise par des individus de faire des enfants doit être assumée par lensemble de la collectivité. Il ne faut pas oublier quil sagit dinvestir dans un capital humain appelé à devenir un futur électeur, un futur contribuable, un futur agent de production, un futur consommateur et un futur parent. Nos responsables ont-ils dans le pipeline un projet dans ce sens ? Une absence de vision totale. Cette situation risque-t-elle de perdurer ? Ce nest pas aussi sûr dans un contexte aussi hostile. On a encore fraîche dans les mémoires la réduction du taux de lIGR dans la Loi de Finances 2007. Il sagissait ici plus dune mesure fiscale que dune réforme, puisque sa mise en place a été décidée au lendemain du renchérissement du coût de la vie. Le remplacement de lIGR a été accompagné du réaménagement des tranches et des taux avec pour principal dessein de faire face à la valse des prix. Interrogés par nos soins, le Secrétariat dEtat chargé de la Famille, de lEnfance et des Handicapés reconnaît quà leur niveau, ils se contentent de mettre en place des projets, voire des actions concrètes pour améliorer le bien-être de la famille. Des mesures dune telle nature sont de lapanage du ministère des Finances et bien entendu de la Direction des Impôts. Le livre des procédures fiscales na rien prévu à cet effet, encore moins le CGI. Les pouvoirs publics doivent sengager à mettre au point une formule qui tient compte, le plus tôt possible, des besoins personnels et essentiels de la famille. Ils doivent mettre en place des mesures fiscales qui atténueront certainement le coût de la vie. On verra jusquoù la nouvelle équipe gouvernementale acceptera de mettre en jeu sa popularité.