Le coup est dur et la dragée haute. Occuper un pays, le réduire à néant, asservir ses populations, y dicter des lois liberticides au nom de la «liberté» made in Occident, y instaurer une Pax Americana dans le sang et le bruit des déflagrations, le piller, y faire prospérer tous les trafics, avec toutes ces compagnies de sous-traitance et ces autres sociétés de mercenaires, y faire fructifier un argent fou, détruire ce qui y restait comme infrastructures, y imposer la faim et la soif, l'inculture et l'exacerbation des haines tribales, pour au final, déguerpir et laisser une terre brûlée. Les images des Afghans accrochés aux tarmacs des avions, ou encore d'une maman qui se sépare de son bébé et supplie les soldats de l'emporter hors des frontières Afghanes. Voici exactement le schéma de ce que les Etats-Unis d'Amérique et leurs alliés ont fait de l'Afghanistan. 20 ans sans le moindre signe positif de stabilité retrouvée dans un pays en guerre depuis plus de 60 ans, avec une foultitude de coups d'Etat et de renversements des pouvoirs en place passant d'un royaume à un Emirat, puis à une république opiomane. Voici le bilan désastreux de l'invasion américaine au nom de la «justice et de la démocratie» pour chasser un certain Oussama Ben Laden et un certain Mollah Omar ainsi que leurs cohortes de Talibans enturbannés et assoiffés d'en découdre avec tout le monde. On connaît la suite : une traque pour débusquer le numéro 1 de la défunte Al Qaïda, avec ce scénario de fictions, d'exécution nocturne au Pakistan avec le largage d'un corps dans l'océan, la fuite jusqu'à nouvel ordre de l'homme à l'œil unique sur sa mobylette, l'assassinat d'un grand chef militaire, Ahmed Shah Massoud, comme par hasard, la veille des attentats de New York et l'embourbement des Marines dans une zone montagneuse qui a déjà réglé leurs comptes aux Soviétiques entre 1979 et 1989. Guerre inutile ? Loin de là. Avec le front irakien, ces deux guerres ont assuré aux USA des profits qui se chiffrent en centaines de milliards de dollars. On le sait, la guerre fait de grandes recettes. En l'occurrence dans un pays de haschich, d'opium et d'émeraude sans parler des terres rares qui doivent être exploitées dans le pays. D'où le positionnement aujourd'hui de la Chine qui voit dans son voisin du Sud-Ouest un bon allié pour faire des affaires. Avec ce constat sans appel : les grandes puissances peuvent livrer la guerre là où elles veulent, en toute impunité, et peuvent quitter le pays ravagé sans rendre des comptes à personne. Camouflet terrible pour cette moribonde Nations unies, qui n'a plus que le langage des communiqués en guise de réaction. Quant à l'Union européenne, le moins que l'on puisse dire, c'est quel pragmatisme et quel je-m'en-foutisme ! La France pense à ses ressortissants et à ses collaborateurs, idem pour l'Allemagne et pour les autres pays jadis en coalition pour rétablir l'ordre dans un pays livré aujourd'hui au chaos. La fuite de toute cette bande ou plutôt alliance, le chaos est plus profond, plus criard et impossible à gérer. Moralité de cette débâcle : «nous sommes venus remplir une mission, nous en avons fini avec vous, démerdez-vous, maintenant». Le message est clair. Alors où en sommes-nous aujourd'hui après le retour total des forces talibanes ? Le pays est toujours à feu et à sang. Le chaos s'installe plus profondément au dépens d'une population dévastée par le désespoir. Dans cette ambiance, les règlements de compte ont déjà commencé malgré les discours soporifiques des chefs des Talibans qui disent avoir passé l'éponge et pardonné à tout le monde. Le Pakistan, une des sources actives de ce conflit afghan sans fin, positionne ses pions. L'Inde s'active pour damer le pion à son ennemi pakistanais, l'Iran finance les Chiites du centre du pays, la Chine va lancer un gros chantier de reconstruction du pays, ce qui le plongera sous le joug communiste d'avant la guerre de 1979. Qui va bénéficier de la manne du lithium, du cuivre, de l'or et des terres rares du sous-sol afghan ? Les réponses à ces questions nous aideraient à définir l'avenir de ce pays.