◆ Jamais les conditions de financement n'ont été aussi accommodantes. ◆ Suite à la crise liée au coronavirus, Bank Al-Maghrib a troqué ses critères habituels d'injection de liquidité par une ouverture inconditionnelle des vannes. Pari réussi ?
Par A. Hlimi
A en croire les résultats de la dernière enquête de Bank Al-Maghrib sur les taux débiteurs, réalisée au 3ème trimestre 2020, le taux moyen pondéré global d'endettement des agents économiques a baissé de 28 pbs à 4,30% contre 4,58% au 2ème trimestre. La plus forte baisse de taux a concerné les prêts à la consommation, qui ont reculé de 62 pbs à 6,47%. Les taux ont rétrogradé de 44 pbs à 3,97% pour les facilités de trésorerie et de 43 pbs à 4,79% pour les crédits immobiliers. En revanche, les taux ont progressé de 16 pbs à 4,37% pour les crédits à l'équipement. Par secteur institutionnel, les taux appliqués aux crédits aux particuliers ont accusé un repli de 38 pbs à 5,15%. Selon ces chiffres, si votre dossier de crédit personnel ou celui de votre entreprise est solide, alors vous avez dû bénéficier de bonnes conditions de crédit malgré la montée apparente de l'insatisfaction de la clientèle des banques, qui se trouve en réalité amplifiée par la portée des témoignages sur les réseaux sociaux. Cette amélioration des conditions de crédit a été rendue possible par les baisses successives du taux directeur en 2020 et par un accès plus accommodant des banques aux liquidités de la Banque centrale. Ouverture totale des vannes Les banques ont continué à emprunter à des taux proches du taux directeur sur le marché interbancaire malgré la crise économique sans précédent induite par la pandémie. Pour ce faire, Bank Al-Maghrib a réduit le coût de l'argent, le ramenant à 1,5%, libéré intégralement la réserve obligatoire des banques, injectant directement 12 Mds de dirhams dans l'économie et sert chaque semaine autant de liquidités que demandées par les banques. Autant de facilités qui faisaient dire à la mission du FMI au Maroc début janvier que le Banque centrale disposait de moins en moins de marge de manœuvre. Comment se fait le refinancement des banques auprès de BAM Depuis 2020, et cela se poursuit en ces premières semaines de janvier, Bank Al-Maghrib fait tout pour maintenir le système bancaire suffisamment liquide. Le dispositif en place nous a été expliqué par la Banque centrale. Ces aspects ne sont pas régis par une circulaire, ils sont formalisés dans une procédure opérationnelle portée à la connaissance des banques. Selon Bank Al-Maghrib, «le dispositif actuel prévoit une répartition des demandes d'avances sur la base de 3 critères équipondérés, à savoir : • la variation en glissement annuel de l'encours des crédits aux ménages et aux entreprises non financières; • la part des crédits aux ménages et aux entreprises non financières dans le total des emplois des banques; • la variation en glissement annuel des taux débiteurs appliqués par les banques aux ménages et aux entreprises non financières». En choisissant ces critères, Bank Al-Maghrib s'assure que la transmission de la politique monétaire est bien effectuée par les banques, évitant de la sorte que les baisses du taux directeur viennent nourrir leurs marges. Mais, actuellement, la Banque centrale ne se réfère plus à ces critères. Malgré cela, les banques jouent le jeu et répercutent la baisse du taux directeur sur la clientèle. En effet, poursuit Bank Al-Maghrib, «dans le contexte actuel, ces critères de pondération n'ont aucun impact sur les adjudications, puisque Bank Al-Maghrib sert la totalité des demandes de financement exprimées par les banques de la place». Aidé par le Trésor, Bank Al-Maghrib force l'équilibre sur le marché monétaire Alors que certaines économies voisines vivent des crises de liquidité sans précédent, les dernières semaines de 2020 ont été caractérisées par un équilibre général du marché monétaire. «Bank Al-Maghrib maintient l'harmonie du système bancaire à travers ses injections de liquidité», résume Attijari Global Research dans une note. Résultat : les taux interbancaires demeurent en ligne avec le taux directeur à 1,50%, ce qui est synonyme d'absence de tensions. Ceci alors que le Trésor profite lui aussi d'une situation confortable, qui lui permet de racheter de la dette au lieu d'en émettre et soulager par la même occasion son calendrier de remboursement à court terme. Le Trésor opère également en plaçant ses excédents de trésorerie. A titre d'exemple, il a placé plus de 55 Mds de dirhams en deux semaines entre décembre et janvier. Un procédé qui, lui aussi, contribue à cette «harmonie du système bancaire».