Les pièces confidentielles, consultées par des sources journalistiques autorisées, dévoilent un écart abyssal entre les émoluments réellement perçus par ces praticiens et les revenus officiellement déclarés à l'organisme de sécurité sociale. Certaines déclarations mensuelles ne dépasseraient pas 2 000 dirhams, un montant inférieur au salaire minimum légal en vigueur dans le secteur privé, établi à 3 266 dirhams. Une fuite documentaire d'une densité accablante, émanant des archives internes de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), fait vaciller le vernis de respectabilité dont se prévalaient certaines élites professionnelles. Médecins, architectes, ingénieurs et autres titulaires de professions libérales — souvent perçus comme des figures de référence dans l'espace public — se retrouvent désormais exposés à des soupçons étayés de fraude organisée et de dissimulation systématique de leurs revenus réels. Les éléments obtenus, selon des sources informées ayant requis l'anonymat, font état de déclarations de revenus mensuels notoirement inférieures à la réalité économique de ces domaines. Plusieurs praticiens, opérant dans des cabinets établis et bénéficiant d'une clientèle solvable, auraient consigné des montants ne dépassant guère les 2 000 dirhams — une somme inférieure au seuil légal du SMIG (3 266 dirhams) applicable dans le secteur privé. D'autres, exerçant dans des disciplines tout aussi lucratives, auraient déclaré des fourchettes tout aussi incohérentes — entre 2 600 et 6 000 dirhams — alors même que les prestations qu'ils facturent s'élèvent souvent à plusieurs dizaines de milliers de dirhams mensuels. Cette asymétrie flagrante entre les gains effectifs et les sommes soumises à cotisation sociale n'a pu, selon des observateurs avisés, se perpétuer qu'en raison d'un entrelacs de laxismes administratifs, de complaisances sectorielles voire d'une tolérance tacite érigée au fil des ans en norme implicite. Ce régime de faveur, à rebours du principe d'équité contributive, aurait engendré une érosion significative des recettes de l'Etat, au détriment du financement des prestations sociales et de la soutenabilité du régime lui-même. Les répercussions de cette fuite, dont l'authenticité ne semble souffrir d'aucune contestation dans les milieux autorisés, pourraient s'avérer d'une portée considérable. La Direction générale des impôts (DGI) serait déjà en train de compiler des dossiers préliminaires en vue de procéder à des recoupements comptables, d'engager des redressements ciblés, et, le cas échéant, de transmettre les cas les plus graves à l'autorité judiciaire compétente. À l'heure où le discours officiel invoque régulièrement l'impératif de justice fiscale et l'élargissement de l'assiette contributive, cette affaire pourrait constituer un point de bascule. Elle révèle la persistance d'un système à deux vitesses où certains s'abritent derrière la complexité de leurs structures juridiques pour se soustraire à l'effort collectif, tandis que d'autres — notamment les salariés — s'y conforment sans marge de manœuvre. Ni la CNSS ni les ordres professionnels concernés n'ont à ce jour formulé de prise de position publique. Mais l'onde de choc provoquée par ces révélations ne manquera pas de résonner durablement dans les cercles institutionnels et au sein d'une opinion publique de plus en plus sensible à l'exigence de transparence, de redevabilité et de rigueur dans la gestion des affaires fiscales.