Pendant le même jour, le syndicat de Mahjoub Benseddik a mobilisé aux abords de la CNSS une foule d'ouvriers agricoles, déclenché une grève du personnel de la Caisse et provoqué le même mouvement dans les rangs des inspecteurs du travail. À quoi rime cette soudaine surchauffe syndicale ? Ça chauffe sur le front syndical. Cette fois-ci, c'est l'Union marocaine du travail (UMT) qui est montée au créneau. Ce syndicat semble avoir engagé des manœuvres autour de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) à un moment où celle-ci tenait son conseil d'administration, mardi 27 juin à Casablanca pour discuter de certains détails de l'Assurance maladie obligatoire (AMO). Timing bien choisi ou hasard du calendrier ? En tout cas, ce jour-là, la centrale de Mahjoub Benseddik a décidé de mener trois actions parallèles: un sit-in spectaculaire organisé aux abords du siège de la Caisse par la Fédération nationale du secteur agricole (FNSA-UMT), une grève de 24 heures observée par le personnel de la CNSS et un débrayage de deux jours des inspecteurs du travail qui n'en sont pas à leur première protestation. Le premier mouvement a pour objectif de dénoncer "la privation des ouvriers agricoles des allocations familiales". Le second vient, quant à lui, en protestation "contre le non–respect par la direction générale de la CNSS des accords signés avec la fédération". Le troisième est justifié par "le refus du gouvernement d'engager un dialogue sur les revendications des inspecteurs du travail". Voilà les raisons, telles qu'elles sont expliquées en substance dans les communiqués officiels relatifs à ces trois opérations. «Certes, l'UMT a pour mission de défendre les droits de ses affiliés, indique un membre du conseil d'administration de la CNSS, mais ces actions ressemblent à un chantage qui a comme enjeu principal la CNSS». Faut-il donc voir dans le comportement de l'UMT un message politique musclé en direction des responsables ? Le directeur actuel de l'établissement, Saïd Ahmidouch, ne serait pas en phase avec les attentes de l'UMT. Selon une source à l'intérieur de la CNSS, le syndicat de Mahjoub Benseddik veut, à travers la grève à la CNSS, exhiber ses muscles. Et montrer qu'il demeure le seul syndicat représentatif au sein de cet établissement et partant entend défendre sa position par rapport aux centrales syndicales rivales de toujours, la CDT et l'UGTM. D'ailleurs, la nouvelle direction du syndicat istiqlalien trouve que le timing des actions de l'UMT a été mal choisi. Après une accalmie de quelques années, voilà donc la CNSS au-devant de la scène et de nouveau au cœur d'une bataille où les arrière-pensées et les non-dits ne manquent pas. Le cas des inspecteurs du travail L'affaire des inspecteurs du travail pourrait être une des clés pour comprendre la tension syndicale actuelle. Les intéressés, au nombre de 400, ont obtenu récemment un statut à part (qui permettra à leurs salaires de passer de 6.000 à 10.000 DH). Il semble toutefois que certains syndicats n'aient pas apprécié le fait que le ministère de tutelle ait adressé le nouveau statut à l'association des inspecteurs du travail et non pas à eux. Autre problème de fond, les membres de l'association sont tous syndiqués. Ce qui va à l'encontre des conventions internationales en la matière qui stipulent qu'un inspecteur du travail doit être neutre. Condition sine qua non pour qu'il puisse s'acquitter de sa mission de manière objective. Et puis, le ministère de l'Emploi a exigé des inspecteurs du travail de procéder désormais à leurs inspections dans les entreprises selon un planning qui doit lui être communiqué au préalable. Objectif : permettre un suivi rigoureux de leurs actions. Cette mesure n'a pas été non plus du goût des intéressés qui veulent continuer à travailler selon les méthodes du passé. «Là où nous voulons réformer pour moderniser l'action syndicale, nous sommes à chaque fois en butte à des résistances», déclare un cadre du ministère de l'Emploi. • A.C