Des intégristes, le coran en bandoulière, qui promettent des lendemains qui chantent où on rasera gratis d'anciens laquais qui, sur le tard, ont non seulement découvert le révolutionnarisme branché mais s'empressent d'en user pour régler des comptes. On attendait un pays qui bouge, on se découvre avec un pays qui s'agite. Non pas qui agit mais qui s'agite. Cela va dans tous les sens. Des drapeaux qui brûlent. Des sahraouis qui grondent. Une pasionarias de Dieu qui s'engouffre dans la permissivité ambiante pour muter en ange exterminateur. Une presse qui pilonne à tue-tête et qui crie au feu en soufflant sur les braises. La haine de soi prospère. L'autodénigrement, d'usage cantonné dans la vélocité de la blague marocaine, est désormais professé, chaque semaine que dieu fait, avec la répétitivité d'un instituteur maniacodépressif. Il s'édite comme une rengaine monologuant dans des éditoriaux proches du brûlot. C'est même devenu l'estampille de certains directeurs de conscience que de, chaque semaine, nous injecter une dose de texte toxique. La politique dans le pays tourne au grotesque. La société vit comme un énorme exorcisme. Avec des chasseurs de démons stupéfiants. Ils sont d'abord hétéroclites et chimiquement impurs. On y trouve du tout venant : les modernistes qui veulent secouer la société quitte à assujettir la modernité à la mondanité. Quand ce n'est pas à la démagogie. Des intégristes, le coran en bandoulière, qui promettent des lendemains qui chantent où on rasera gratis d'anciens laquais qui, sur le tard, ont non seulement découvert le révolutionnarisme branché mais s'empressent d'en user pour régler des comptes. Des populistes de tout poil qui s'ingénient, parce que justement trop poilus, à dissimuler leurs vrais visages et desseins. Certains sont un vrai péril pour le pays. D'autres n'exposent qu'à une menace marginale. Mis à côte à côte, ils provoquent une atmosphère d'hallali. Ils partagent, toutefois, la hargne contre la constitution. Ils dénoncent, comme un seul homme, le caractère frelaté des institutions. Ils n'hésiteraient pas, pour se faire entendre, à sataniser les symboles. Ils ont le même penchant pour le thème de la décadence. Ils ont le même goût pour la diatribe qui sied à l'anathème mieux qu'au thème. Une grande partie, parmi eux, a une approche esthétique de la politique. Ceci rend la classe politique non seulement, à leurs yeux, veule mais exaspérante. D'autres aspirent au pouvoir et seraient prêts non seulement au compromis mais aussi aux compromissions. Chez les uns et les autres, on revendique généralement une lignée. Une descendance. La France qui adore rigoler d'elle-même a inventé le beaufisme. Au Maroc, où on ne rigole plus du tout, on est en train d'engendrer le «benflamise». Bent flane à dit, ouled flane a écrit…Si Cabu, dessinateur de génie, a résumé le beauf comme un français moyen, grande gueule, un peu lourd aussi bien physiquement qu'intellectuellement. Il manque encore, au Maroc, un génie qui, d'un coup de plume, pourrait résumer les traits de cette nouvelle caste qui cherche, chaque jour, à nous démasquer. « Ayant à démasquer et à dénoncer, je pensais qu'il était juste que je commençasse par moi-même » faisait dire Drieu de La Rochelle à son double, dans son roman GILLES. Pour ceux qui l'ignorent, Drieu de La Rochelle a fini par sombrer dans le fascisme.