« La violence des rêves » est le titre d'un recueil qui traite la vie du couple. Son auteur, Sabine Wollbrecht, y raconte des fictions qui ont un dénominateur commun : l'impossible entente entre la femme et l'homme. L'impossible vie de couple. L'irréalisable entente. Les désillusions. Les petits riens de la vie qui empoisonnent, rendent inenvisageable, la communication entre deux partenaires. Les grandes et petites tromperies qui sont autant de négations de l'autre. Les moments de distraction aux cris de détresse de l'autre. Les divergences d'idées, de vues, de rêves et de désirs du corps. C'est de cela qu'il est question dans le recueil de douze nouvelles intitulé « La violence des rêves ». Son auteur, Sabine Wollbrecht, traque, sans trémolo, ni sensiblerie les détails qui sont autant de démentis à un amour romantique, total et exclusif. Les épigraphes dont elle coiffe ses nouvelles sont très significatives. Ainsi celle de Bernard Shaw : « Dans la vie, il y a deux tragédies : l'une est de ne pas obtenir ce que le cœur désire, l'autre est de l'obtenir ». Et justement, l'un des personnages féminins du livre arrive à ses fins après une longue entreprise de séduction. Elle se marie pour constater que l'autre ne lui appartient pas pour autant ! « Lorsque nos corps s'enlaçaient, je n'avais pas le sentiment que nous étions ensemble, que c'était moi le sujet de l'acharnement érotique ». L'acte de possession par excellence, le moment que l'on cite comme l'exemple d'une communion totale entre un homme et une femme, est donc un partage avec d'autres. Les preuves qui attestent que chacun est confiné dans son monde sont multiples. Les rares moments d'entente sont seulement une question d'enthousiasme qui dure peu. D'ailleurs, s'il faut chercher une vérité dans le titre du livre, le mot “rêves” renvoie à un mouvement prospectif, à une tendre projection de l'imagination qui épouse, l'espace d'un moment, un cours moins cruel à l'entente du couple. La réalité reprend toujours le dessus. Dès que l'un des personnages cherche à saisir quelqu'un, ou à se faire entendre sans fard, un trait noir lui barre le chemin et le renvoie à lui-même. Dans cette irréconciliable déchirure du couple, Sabine Wollbrecht accable plus l'homme que la femme. Elle écrit dans ce sens : «La femme, la femme méditerranéenne du moins, donne son corps à l'homme ; ce corps devient sa possession, son bien, le lieu de sa semence et de sa récolte. L'homme doit donner du plaisir sexuel à la femme, mais son corps, il ne le donne pas. Son corps lui appartient. A lui seul. Avec un tel déséquilibre du don, peut-il y avoir un vrai couple ? Je ne le pense pas». Par ailleurs, « La violence des rêves » est écrit dans une langue claire et précise. Outre la connaissance approfondie qu'a son auteur des choses du couple, le livre présente des qualités littéraires. La principale réserve qu'on peut émettre sur le bouquin a trait à l'une des composantes qui font sa force. En traquant les détails de la vie les plus insignifiants, l'auteur s'est complu dans un mouvement qui déploie trop le récit. Ce déploiement porte, par moments, préjudice au rythme de l'histoire. Certaines nouvelles manquent à cet égard de nerf. Cette réserve n'enlève toutefois rien à la qualité d'un livre. Il surprendra plus d'un lecteur qui voudra en apprendre plus sur son auteur. Dans le communiqué de presse qui fait part de la parution du livre, on lit : « Sabine Wollbrecht, mariée à un Marocain, vit à Rabat depuis 1976 ». Le Marocain en question est le grand écrivain Abdelfattah Kilito.