Le traitement théologique fait par le journal Attajdid, proche du PJD, du tsunami a provoqué la réaction de l'Organisation marocaine de lutte contre le racisme et la haine. Le paysage médiatique a vécu une novelle bataille dans la guerre idéologique que se livrent, depuis longtemps d'ailleurs, les "islamistes marocains" d'un côté et les "forces progressistes" d'un autre. Cette fois, les vagues du Tsunami qui ont ravagé l'Asie du Sud-Est ont atteint le Maroc. Le quotidien "Attajdid", organe officielle du Mouvement Attawhid Wal Islah, véritable think-tank du PJD, a estimé, dans un de ses numéros, que la catastrophe naturelle qui a frappé plusieurs pays d'Asie du Sud-Est (dont certains sont connus pour le tourisme sexuel) devrait sérieusement faire réfléchir les Marocains. Ces derniers "ne devraient pas croire que les catastrophes n'arrivent qu'aux autres". En d'autres termes, la dépravation morale et l'éloignement de la société marocaine des valeurs sacrées risquent de déclencher une colère divine inédite. Attajdid s'est, encore une fois, placé dans la position de donneur de leçons de morale à la société marocaine. Ce n'est pas la première fois. C'est même l'une des missions que le Mouvement Attawhid Wal Islah s'est fixée dès sa création. Au même titre que Greenpeace, qui défend la mère nature contre les excès de l'industrialisation aveugle, ou la SPA qui veille à la protection des animaux contre l'insouciance des hommes, Attajdid montre, régulièrement, le droit chemin aux brebis égarées. Et c'est toujours dans cette même logique que des ONGs, comme l'Organisation marocaine de lutte contre la haine et le racisme, présidée par notre confrère Jamal Berraoui, tire à boulets rouges sur tout ce qui est à même de remettre en cause "les choix d'ouverture de l'ensemble de la société marocaine". En fait, jusque-là, rien de bien méchant n'est à signaler. Chacun défendant légitimement son point de vue. Tant que les propos des uns et des autres ne tombent pas sous le coup de la loi, auquel cas la Justice pourra aisément intervenir et se prononcer, c'est aux citoyens marocains de juger de la pertinence (et surtout la séduction) des propos des uns et des autres. En réalité, le traitement fait par la deuxième chaîne mérite qu'on s'y arrête. C'est pratiquement la première fois, dans l'histoire de cette télévision, qu'un journaliste de 2M prend clairement position pour une partie, qualifiant les idées développées par Attajdid "d'obscurantistes qui portent atteinte à l'image du Maroc". Notre confrère Taoufik Debbab, auteur du reportage (cela faisait longtemps qu'on ne l'avait plus entendu), est allé plus loin en affirmant que les idées développées sur les colonnes d'Attajdid sont semblables à celles qui ont conduit aux attentats du 16 mai. C'est à peine si Debbab n'a pas ouvertement exhorté les autorités marocaines à poursuivre en Justice, et dans le cadre de la loi antiterroriste, les responsables et les journalistes d'Attajdid. Par ailleurs, le reportage de 2M n'a accordé à Hassan Serrat (secrétaire de rédaction d'Attajdid) qu'un peu moins de 16 secondes sur un total de plus de 6 minutes. Or, Jamal Berraoui a eu droit à plus de 53 secondes et Mohamed Brini a parlé pendant environ 52 secondes. Sans compter les 86 secondes de Taoufik Debbab. C'est d'ailleurs, l'attitude de la deuxième chaîne, beaucoup plus que les idées de Jamal Berraoui ou Mohamed Brini (directeur d'Al Ahdath Al Maghribiya), qui a suscité l'indignation des journalistes d'Attajdid. Ces derniers ont publié un communiqué dans lequel ils affirmaient qu'ils se réservent le droit de défendre leurs droits et leur dignité par tous les moyens légaux disponibles. Cela pose la question de savoir comment une chaîne nationale, comme 2M, peut-elle traiter des sujets aussi sensibles que celui de l'islamisme. Surtout que les journalistes d'Attajdid n'ont pas oublié à le rappeler: "la deuxième chaîne appartient à tous les Marocains".