Nouvel exemple de l'engrenage vain de la violence, cette nouvelle opération Kamikaze montre l'échec de la répression israélienne et les limites de la politique sécuritaire d'Ariel Sharon. Un militant palestinien s'est fait exploser à une station de bus à Tel-Aviv, tuant une passagère et blessant une quinzaine d'autres. L'attentat suicide s'est produit sur une voie express reliant deux localités au sud de cette ville. Il survient après les massacres de Gaza constitutifs à des raids israéliens contre des civils à Khan Younès, qui ont fait une vingtaine de morts. Les activistes palestiniens avaient promis de venger leurs morts, victimes innocentes de la barbarie d'Ariel Sharon. Sur le terrain, l'armée israélienne utilise contre les civils palestiniens tous les moyens de répression -blindés, hélicoptères de combat et même des F-16-- et maintient un blocus sévère dans une tentative de génocide contre le peuple palestinien. L'élimination de l'Autorité palestinienne semble être le but stratégique d'Ariel Sharon qui, de manière ouverte, récuse le Président Yasser Arafat comme partenaire. Le Premier ministre israélien ne cesse de dire d'ailleurs que les accords d'Oslo sont la plus grande catastrophe qui soit arrivée à Israël et qu'ils sont désormais lettres mortes et n'engagent plus son gouvernement. L'arrogance de Sharon trouve aussi son origine dans la complaisance jamais démentie de l'administration américaine, du silence de l'Europe, mais aussi de la passivité des régimes arabes. La révolution palestinienne répond par l'Intifada qui dure depuis 2000 avec une revendication bien simple : le départ des forces d'occupation israéliennes de Cisjordanie, de Gaza et de Jérusalem-Est et la création d'un Etat palestinien souverain sur ces territoires, aux côtés d'Israël. Chaque fois qu'un accord semblait se dessiner, Sharon recourait à la provocation pour faire capoter tout compromis. Elie Barnavi, qui vient de quitter ses fonctions d'ambassadeur d'Israël en France, pense que seule une intervention internationale peut désormais contribuer à une solution politique au Proche-Orient. «Le seul moyen de régler le problème est l'instauration d'un mandat international sur les territoires palestiniens», a-t-il déclaré jeudi au cours d'une rencontre avec la presse. Elie Barnavi estime toutefois que les Américains ne pourront imposer «une solution de type Kosovo ou Timor orientale dans les territoires palestiniens qu'après le règlement de la crise irakienne». Pour lui, une solution sera imposée de l'extérieur car «les Israéliens ne savent pas ce qu'ils veulent». L'ancien ambassadeur d'Israël en France constate «qu'il n'y a plus maintenant d'autorité palestinienne» et que le chaos actuel est «dans l'intérêt des hommes politiques de tout bord qui ne veulent pas d'Etat palestinien». Elie Barnavi affirme que le gouvernement israélien «n'en a plus que pour quelques mois». En attendant un changement de gouvernement en Israël, les dossiers en suspens (statut final et frontières, colonies, Jérusalem et statut des lieux saints, droit au retour des 3,6 millions de réfugiés palestiniens, eau) sont au point mort, comme l'a montré l'échec des négociations entre Barak et Arafat en 1999-2000. Depuis la région a sombré dans des affrontements sans fin, avec le terrible prix payé par le peuple palestinien spolié de ses droits les plus élémentaires. Une page est sur le point d'être tourné au Proche-Orient, dans une nouvelle logique de guerre, conséquence de l'effondrement du processus enclenché à Madrid et ensuite à Oslo. Le dernier attentat de Tel-Aviv est un nouvel exemple d'engrenage vain de violence. Rien ne sera obtenu par la force, car la crise israélo-palestinienne n'a de solution ni militaire ni sécuritaire. La relance immédiate du processus politique est la seule solution à même de faire taire les armes et redonner l'espoir aux populations palestinienne et israélienne, meurtries par plusieurs années de conflits armés.