L'Association des ingénieurs de l'Ecole Mohammédia (EMI) lance une vaste campagne de sensibilisation pour doter leur établissement des moyens nécessaires pour en faire réellement "une école d'élite". Le ministère de l'Enseignement supérieur est en train de préparer une grande réforme qui touchera bon nombre d'établissements universitaires et des écoles d'ingénieurs. Il s'agit de la création d'une nouvelle Université Technologique. Ce projet consistera à regrouper les différentes facultés des sciences et technologies (FST) et d'autres écoles nationales dont le ministère de l'Enseignement détient la tutelle. C'est le cas l'ENSA, les EST ainsi que l'Ecole Mohammédia des Ingénieurs (EMI). L'objectif est de créer cette structure unique qu'est l'Université Technologique qui délivrera à ses lauréats un diplôme d'ingénieur national. Ce projet, toujours en préparation dans le département de Khalid Alioua, a provoqué une certaine inquiétude de la part de l'Association des Ingénieurs de l'Ecole Mohammédia, une structure qui regroupe tous les lauréats de l'EMI depuis qu'elle fut créée au lendemain de l'indépendance. Cette inquiétude s'est transformée ces derniers jours en véritable indignation. Pour le président de l'association des lauréats de l'EMI, Mehdi Daoudi, "cette réforme aura des conséquences néfastes sur le prestige de l'EMI et son devenir". Et d'ajouter que "la formation de masse que le ministère compte mettre en place ne rendrait pas service à l'EMI et encore moins à l'enseignement au Maroc". Pour M. Daoudi, l'Ecole Mohammédia a besoin de moyens supplémentaires pour rehausser son niveau pour la rendre compétitive par rapport aux grandes écoles d'ingénieurs, françaises (polytechnique…) ou américaines (MIT…). Aujourd'hui, la situation devient de plus en plus urgente. La mobilisation de l'Association des lauréats de l'EMI a commencé avant même l'annonce du projet de réforme d'Alioua. En fait, depuis la nouvelle organisation de l'enseignement, l'EMI s'est retrouvée sous la coupole de l'Université Mohammed V de Rabat au même titre que les facultés des sciences ou des lettres. L'EMI a donc perdu son autonomie financière et administrative. "Nous avons constaté la réduction flagrante des moyens de l'EMI et de son pouvoir d'engagement", souligne Mehdi Daoudi. Pour ce qui est des moyens, il faut rappeler que c'est le conseil de la présidence de l'Université qui attribue le budget de l'Ecole. Aujourd'hui, les laboratoires sont sous-équipés et l'infrastructure très mal entretenue. Ce manque de moyens financiers s'est répercuté d'abord sur les conditions de vie des étudiants. Dans les années 70, les élèves étaient deux par chambre et bénéficiaient d'une très bonne qualité de la restauration. Ils organisaient régulièrement des activités culturelles et sportives. Et suivaient annuellement des stages de formations dans les pays européens. Le lauréat de l'EMI avait toutes les chances d'être épanoui. Aujourd'hui, ce n'est plus la même chose. Les élèves sont entassés quatre par chambre. Par manque de places dans l'internat, une centaine d'entre eux logent à la cité universitaire de Soussi. "Même la qualité de la restauration laisse à désirer", poursuit M. Daoudi. En somme, le budget alloué à la restauration et l'hébergement des étudiants de l'EMI est deux à trois fois moins important que celui des autres écoles d'ingénieurs, comme l'Ecole Hassania ou l'INPT. Sans parler des 400 DH, une misère, en guise de bourse pour les élèves de l'EMI. Notons que le Maroc et la France octroient 150 bourses d'études par an aux meilleurs élèves des classes «prépa» d'une valeur de 8.000 DH pour poursuivre leurs études en France. Une bonne partie de ces élèves ne reviennent jamais au Maroc. "Ces bourses sont une dévalorisation de toutes les écoles nationales", lance M. Daoudi. Pour ce qui est du pouvoir d'engagement, signalons que l'EMI était capable d'engager et de recevoir de l'argent car elle jouissait de la personnalité morale. Ce qui n'est plus aussi facile aujourd'hui car tout doit passer par la présidence de l'Université. "Ce manque de moyens commence à démotiver même les professeurs chercheurs qui ont du mal à travailler dans ces conditions", souligne M. Daoudi. En fait, celui-ci milite pour que l'EMI soit une école d'élite capable d'accompagner le développement économique du pays. La réforme d'Alioua ne va pas dans ce sens. C'est la raison pour laquelle M. Daoudi appelle tous les étudiants et les professeurs de l'EMI à participer une manifestation sur le devenir de l'EMI qui sera organisée le samedi 18 octobre prochain. Cette rencontre sera la première action d'une vaste campagne de sensibilisation pour le sauvetage de l'EMI.