France. La droite a réussi son pari dimanche soir en obtenant la majorité absolue lors des élections législatives. Une victoire, certes, mais placée sous le signe de l'urgence pour le gouvernement Raffarin très attendu sur les réformes. Depuis dimanche la France est absolument de droite. Avec 370 députés contre 178 pour la gauche, l'Union pour la majorité présidentielle (RPR et alliés UDF, DL) est désormais majoritaire au sein de l'Assemblée Nationale. Avec le Sénat, le Conseil constitutionnel et le gouvernement sous son contrôle, la droite obtient donc les pleins pouvoirs : exécutif, législatif et consultatif. Une «marée bleue» dont le Parti socialiste fait directement les frais puisqu'il se retrouve dans l'opposition (140 sièges contre 248 au cours du précédent mandat), accompagné dans sa chute par les Verts (3 députés) et les communistes (21 députés). Cette victoire du président Chirac et de son Premier ministre - reconduit dans ses fonctions lundi – est certes incontestable, mais elle laisse tout de même entrevoir quelques brèches. Il y a tout d'abord l'importance des abstentionnistes (entre 37 et 39 %) qui pourraient représenter à eux seuls le premier parti de France, celui de la lassitude. Invités à se rendre quatre fois aux urnes en moins de deux mois, les électeurs ne se sont mobilisés que pour un seul scrutin, celui du second tour de la présidentielle qui avait mis face à face Jacques Chirac et Jean-Marie Le Pen, le leader d'extrême droite. Ce quatrième tour n'avait lui rien de très mobilisateur puisque la droite était largement donnée vainqueur. Sans compter l'absence de débat droite-gauche et le flou sur les programmes électoraux occultés par les appels au barrage contre le Front national. Un pari réussi, mode de scrutin aidant, même s'il ne signifie en rien l'abandon des idées xénophobes par une partie des Français. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien si la question sécuritaire a dominé l'actualité politique comme médiatique au lendemain du 21 avril. Cheval de bataille de l'extrême droite, l'insécurité a été largement reprise par la droite, à l'image du «super» ministère de l'Intérieur offert à Nicolas Sarkozy. Une stratégie opportuniste qui a convaincu les Français. 59 % d'entre eux estiment que la lutte contre la délinquance doit être la priorité du nouveau gouvernement, selon un sondage CSA paru lundi. Loin derrière arrivent la baisse des impôts (22 %) ou encore l'intégration des personnes issues de l'immigration (15 %)… Par ailleurs, restaurer l'ordre public n'est qu'un des engagements pris par la droite. Elle a aussi promis de relancer le dialogue social, de revoir le dossier de la justice et de dynamiser l'économie. « Nous sommes face à de grandes responsabilités. Nous assumerons notre devoir d'action », a assuré M. Raffarin dimanche soir. « Nous ferons en sorte que l'ensemble de notre programme soit appliqué ». Reste que le nouvel exécutif dispose d'une marge budgétaire étroite pour ouvrir ces grands chantiers. Sans compter la fragilité du milieu social. Il devra aussi affronter ses partenaires européens, Paris n'étant plus en mesure de tenir l'objectif du retour à l'équilibre des finances publiques prévu pour 2004. Enfin, reste la question de la composition du nouveau gouvernement qui devrait subir quelques retouches. Si les principaux ministres devraient être reconduits, d'autres, comme Renaud Donnedieu de Vabres aux Affaires européennes (mis en examen pour blanchiment d'argent et financement illicite de l'ex-parti républicain), pourraient se voir remerciés. La droite a d'autres affaires à mener.