L'enquête se poursuit avec les membres du réseau subversif arrêtés à Casablanca. Les puissances étrangères et les pays voisins se réjouissent de ce coup de filet magistral. Les médias étrangers accordent un intérêt particulier à cette opération. Les enquêteurs s'intéressent de très près aux activistes marocains acquis aux idées de Ben Laden. Le Maroc l'a échappé belle. Il s'en est fallu de peu pour que le pays soit victime des réseaux d'Al Qaïda (La Base) d'Oussama Ben Laden dont une cellule s'est implantée à l'insu des autorités sur le sol national avant qu'elle ne soit démantelée. Les membres de cette cellule, formée de 3 ressortissants Saoudiens et de leurs femmes, furent arrêtés et mis hors d'État de nuire. Le pire a été ainsi évité. Tout a commencé par une alerte lancée par la CIA (Central Intelligence Agency) à la DST marocaine ( Direction de la surveillance du Territoire). Le renseignement est d'une extrême gravité : des éléments d'Al Qaïda sont en train de planifier des attentats contre des intérêts américains. L'agence de Langley ne dira pas plus. Par contre, elle demande à ses interlocuteurs d'envoyer immédiatement une délégation de haut rang à Washington. La fébrilité bat son plein au siège de la DST, à Rabat. Une fois dans la capitale américaine et après un “briefing“ sur la nature de la situation d'urgence, la mission américaine et marocaine s'envolent pour une autre destination : Guantanamo Bay, à Cuba. Ici sont détenus depuis des mois près de 300 prisonniers d'Al Qaïda dont 14 Marocains. C'est suite aux multiples interrogatoires subis vers fin février que ces derniers ont avoué, l'effroyable qui donne froid dans le dos : un membre d'Al Qaïda, une sorte de sergent-recruteur, se trouverait au Maroc dont il compte faire une plate-forme pour organiser des attentats-suicides à l'extérieur. Précisément à partir des enclaves marocaines de Ceuta et Mélilia. La cible : des navires de guerre américains ou de l'Otan dans le Détroit de Gibraltar qui seraient percutés par des zodiacs bourrés d'explosifs conduits par des kamikazes. Le même scénario macabre portant la signature Al Qaïda s'est déjà passé, le 12 octobre 2000, dans le port d'Aden, au Yémen. L'explosion du petit bateau qui guidait le destroyer lance-missiles USS Cole, a fait 17 victimes américaines. La même opération risque donc de se reproduire au large du Détroit. Il s'agit aujourd'hui d'empêcher par tous les moyens que l'irréparable ne se reproduise. C'est pour cela que les agents de la DST furent mis à contribution. Ils sont donc face aux hommes marocains de Ben Laden. C'est à eux désormais de prendre le relais en arabe dialectal pour en savoir plus sur ce bonhomme. Ces taulards d'un autre genre donnent le signalement du personnage. Au fur et à mesure qu'ils décrivent les traits de son visage, les hommes de la CIA s'emploient avec une extrême précision à brosser son portrait-robot. Mission accomplie. Maintenant, l'enquête peut commencer au Maroc où les services marocains, mobilisés jour et nuit, remuent ciel et terre pour repérer la planque du fameux lieutenant de Ben Laden dont le portrait-robot sera distribué aux agents de la DST à travers l'ensemble du territoire. L'opération, à laquelle était associée également la gendarmerie royale, est menée de main de maître, dans la discrétion totale. Il ne fallait surtout pas ébruiter l'information pour ne pas éveiller les soupçons du terroriste saoudien. En un mot, l'oiseau ne doit pas s'envoler. Les recherches sont orientées en direction des citoyens saoudiens installés au Maroc. Les fiches de police concernant les passagers étrangers ayant débarqué au Maroc au cours des derniers mois furent passées toutes au peigne fin. Les hôtels de tout le pays n'ont pas échappé non plus à cette action de vérification d'identité des clients. Un véritable travail de fourmi. Parallèlement à cela, les descentes sur le terrain ont commencé pour repérer les suspects. Au cours du mois de mai, ces derniers, la trentaine, qui sont accompagnés de leur épouse, seront identifiés en deux temps. Il s'agit de Hilal Jaber Aouad Alassiri, Zuher Hilam Mohamed Al Tbaiti et M'Sefer Ali Al Ghamdi. Les trois comparses, installés chacun dans une ville (Casablanca, Rabat et Marrakech) disposent d'une couverture officielle, se faisant passer pour des hommes d'affaires venus au Maroc pour prospecter les opportunités commerciales. L'un d'eux a même eu le temps d'ouvrir une agence de recrutement, tandis qu'un autre prétend être un investisseur dans le secteur touristique. Cette triplette s'est attachée des services de complices locaux-certainement des groupuscules se réclamant de la Salafia Jihadia prônée par Ben Laden- pour ouvrir des comptes bancaires sur place. Malgré le fait qu'ils soient identifiés, les terroristes ne seront pas arrêtés tout de suite. En attendant, ils seront soumis à leur insu à un jeu de filature et de surveillance très serré de leurs moindres faits et gestes. La consigne était de les laisser faire tout en ne baissant pas la garde afin de collecter le maximum de renseignements sur les intentions du réseau et de mettre à jour des complicités éventuelles. Pour leurs communications, la triplette à la solde de Ben Laden avait recours, prudence oblige, aux téléphones portables et à l'Internet dans les cybercafés. Mais là aussi, les services marocains ont fait des efforts énormes pour ne rien rater des conversations et des échanges des correspondances électroniques de leurs trois cibles. Les services marocains, équipés d'un logiciel d'espionnage des messages qui transitent par la toile, intercepteront en effet un é-mail de détresse envoyé par un des Saoudiens à un de ses correspondants à l'étranger. L'expéditeur, qui calait apparemment sur le mécanisme d'un détonateur, demandait de l'aide à ce sujet. Les affidés du milliardaire saoudien envisageaient-ils de préparer aussi des attaques terroristes au cœur du Maroc ? Une chose est sûre : si cette cellule dormante n'est pas passée à l'acte tout de suite c'est qu'elle attendait certainement du renfort de ses commanditaires à l'étranger : financier, logistique et humain. Un deuxième commando était prévu pour prendre le relais : l'exécution de la mission terroriste. C'est ce retard qui a été fatal à cette équipe de “reconnaissance“ et permis de neutraliser le réseau. Les jeunes saoudiens à la solde d'Al Qaïda seraient toujours sous haute surveillance si un des leurs complices n'avait pas eu l'idée de quitter avec sa femme le territoire national vers l'Arabie Saoudite via l'aéroport Mohammed V, à Casablanca. Il fallait alors agir pour coffrer le couple et consorts. Détenue dans un lieu gardé secret, la bande à Ben Laden est soumise à un interrogatoire poussé avant d'être certainement transféré vers la baie de Guantanamo où les Américains se chargeront de cuisiner ces militants de la terreur.