Après le RNI, l'onde de choc du dernier remaniement ministériel a maintenant atteint l'Union démocratique, formation présidée par Bouazza Ikken. Le parti est aujourd'hui scindé en deux groupes: les pros et les anti-Ikken. La légitimité des uns et des autres sera certainement déterminée par les tribunaux. Décidément, une sorte de malédiction semble s'être abattue sur la famille de la mouvance populaire. Après les multiples scissions et putschs dans le Mouvement populaire, puis dans le Mouvement national populaire (MNP), c'est au tour de l'Union Démocratique (UD) de vivre les affres de la rébellion. En effet, vendredi dernier, plusieurs députés, conseillers et simples militants de l'Union démocratique se sont réunis à Rabat pour, carrément, destituer le président Bouazza Ikken. Le comité central et le bureau politique ont été ainsi totalement renouvelés. Toutefois, le nouveau président n'a pas été désigné. Il a été décidé de créer une commission provisoire de gestion composée de cinq membres: Dermoumi Belhaj, président du groupe des conseillers, Mohamed Benzeroual, parlementaire de Sidi Kacem, Mohamed Fadili, vice-président de la Chambre des conseillers, Dr. Chakib Bourkia et Abdelkader Tatou. «Cette commission provisoire de gestion aura pour rôle de gérer les affaires courantes du parti en attendant l'élection d'un nouveau président », souligne Ahmed Moussaoui, ancien ministre de la Jeunesse et des Sports et député de Nador. La réaction de Bouazza Ikken ne s'est pas fait attendre. Il organisa, chez lui à Rabat, le lendemain samedi 10 juillet, une réunion du conseil national. Quelque 384 personnes étaient présentes. Parmi eux, figurent 18 parlementaires (12 députés et 6 conseillers) sur les 52 parlementaires que compte le parti dans les deux Chambres. D'autres parlementaires étaient également acquis à la cause d'Ikken, mais semblent-ils, n'ont pas réussi à se rendre à la rencontre du samedi. C'est le cas de Zahra Cheggaf, députée et épouse de Sidi Bouya Maelaïnaïn, lequel était présent à la réunion du samedi. A noter que le président du groupe des représentants, Lahcen Hasnaoui, a répondu présent aux deux convocations : celle du vendredi et celle du samedi. Une manière peut-être d'assurer ses arrières. En tout cas, devant un parterre de journalistes, Bouazza Ikken a donné sa version des choses. Pourquoi cette crise au sein de l'UD ? En fait, ce que les mécontents reprochent à Bouazza Ikken c'est d'avoir pas su négocier l'entrée du parti au sein du gouvernement. En effet, après plusieurs mois d'attente, les Udéistes n'allaient récolter que le fauteuil du secrétariat d'Etat aux Nouvelles technologies de l'information. Sur ce point, Ikken est clair: il assure que le Premier ministre, Driss Jettou, a refusé tous les noms proposés et a réclamé un ingénieur en télécommunication. «Nous n'avons pas d'ingénieur en Telecom dans nos rangs», affirme Iklken. «Faux!», rétorque Ahmed Moussaoui. «L'UD compte, parmi ses cadres, des ingénieurs, des économistes, des juristes…». La vérité est que Ikken voulait à tout prix placer un de ses hommes, en l'occurrence Hussein Jamaï, un pharmacien de Khémisset. Par ailleurs, Ikken a souligné que les «putschistes» ont utilisé de faux statuts pour renouveler le comité central, menaçant ainsi de porter plainte contre Fadili et Bourkia. Pour sa part, Moussaoui assure que ce nouveau comité central s'est réuni en respect total des statuts: «86 membres sur les 155 que compte le comité central étaient présents». En outre, Ikken a accusé ses adversaires d'occuper illégalement le siège du parti, situé dans une villa dans boulevard Kennedy à Rabat. Cette villa appartient bel et bien à Bouazza Ikken. Sur cette question, ses opposants souhaitent attendre les résultats d'un audit des finances du parti, qui sera réalisé par un cabinet privé. En somme, le bras de fer entre les deux parties ne fait que commencer. Demain, mardi, «chaque groupe parlementaire va se réunir pour examiner la situation et prendre la décision adéquate», affirme Moussaoui. En attendant, Bouazza Ikken espère résoudre cet incident dans le cadre du parti, sinon il menace de faire appel à la Justice. Mais pas question de laisser-tomber. «Ma vie est dernière moi», dit-il. Avant de quitter le MNP, Ikken affirme avoir envoyé une lettre à SM le Roi, demandant l'autorisation de créer un parti politique. Quatre jours plus tard, Driss Jettou, à l'époque ministre de l'Intérieur, l'a convoqué pour lui donné le feu vert. C'est la raison pour laquelle il estime que l'UD est son parti et qu'il ne sera pas éjecté aussi facilement. La bataille se poursuivra certainement dans le terrain judiciaire.