Aujourd'hui, parmi la trentaine de partis politiques qui forment le tissu national, seules deux femmes ont pu arracher la qualité de secrétaire générale. Il s'agit de Nabila Mounib du Parti socialiste unifié (PSU) et Zhour Chekkafi qui est à la tête du Parti de la société démocratique (PSD), une petite formation créée en 2007. Quant au monde syndical, il est à croire que c'est une chasse gardée masculine. Aucune femme n'a pu à ce jour diriger un quelconque groupement syndical. Pourquoi les Marocaines ont-elle toujours du mal à prendre les commandes et qui les freinent? A l'approche des Communales de 2015, s'arrêter sur cette question est plus qu'opportun. Si l'on fait le diagnostic de la mouvance féminine au Maroc, il n'est nul besoin d'être connaisseur pour se rendre compte que, quand il s'agit de leur implication dans la société civile, les femmes tirent les ficelles et demeurent les plus actives. Seulement voilà, sur le plan politique, la question de la représentativité des femmes aux postes de décision et dans les fonctions électives est un véritable problème. «J'ai été élue pour la première fois dans les années 80 lors des élections municipales de Marrakech. A l'époque, nous étions deux femmes et une cinquantaine d'hommes. Je peux vous dire qu'il était tout sauf facile pour une femme de se faire une place», nous confie Milouda Hazib, aujourd'hui députée et présidente du groupe parlementaire du Parti authenticité et modernité (PAM). Cette dernière regrette qu'après l'élan qu'a connu la participation féminine dans tous les secteurs, celle-ci soit freinée à cause de la non-mise en œuvre des prérogatives de la Constitution de 2011 et qui disposent clairement que le principe de parité doit être établi. Selon une de ses publications, le juriste et politologue Mohamed Mouaqit estime que «l'absence d'une stratégie politique de l'Etat est de nature à ne pas favoriser le leadership politique féminin. La volonté de l'Etat en matière de renforcement de la représentation politique des femmes obéit davantage à l'incitation et à la demande féminine/féministe qu'à un programme et à un tableau de bord définissant des objectifs à terme». Il est à rappeler dans ce même sens qu'une forte pression féminine a pu imposer en 2009 une mesure de quota dans l'objectif d'arriver à instaurer une réelle parité politique, ce qui n'est toujours pas le cas. Ce quota établi à 12% pour les listes ordinaires des communales est jugé insuffisant pour certains et ne fait que consacrer davantage une perception de la femme comme citoyen de seconde zone. Outre cela, ce principe n'a pas été sans démontrer ses failles et la liste des femmes proposées est souvent jugée «élitiste» . Toutefois, il y a lieu de préciser que ce système de quota a permis une meilleure représentativité féminine. Au sein de l'institution parlementaire à titre d'exemple, la Chambre des représentants compte 16,7% de femmes élues. Ce taux est à une moyenne de 10% dans le monde arabe. Depuis son instauration, la liste nationale a été en mesure d'augmenter le nombre de femmes élues au sein de la Chambre des représentants et qui a atteint, selon le Mouvement pour la démocratisation de la parité, «60 au lieu de 30 qui étaient réservés tacitement aux femmes lors des élections précédentes». A cela s'ajoutent «30 élus de sexe masculin parmi les jeunes dont l'âge ne dépasse pas 40 ans». Il y a un peu plus d'une semaine, des députées ainsi que l'association MPDP ont interpellé le ministère de l'intérieur au sujet des lois électorales. Une commission parlementaire aurait même été créée à cette fin et discutera des possibilités d'assurer une plus grande représentativité féminine dans les conseils des communes issus du scrutin de 2015. Il sera également question de revenir sur la loi organique 59.11. Le groupe du progrès démocratique vient de préparer une proposition de loi amendant le projet de loi 59-11 relative à l'élection des membres des Conseils des collectivités territoriales qui, si elle est prise en considération, donnerait un vrai champ d'ouverture pour une participation politique paritaire. Ceci n'étant pas encore fait, Milouda Hazib demeure inquiète: «Je reste très préoccupée par les résultats des prochaines communales», dit-elle en expliquant qu'il y a une grande probabilité de régression de la part des femmes pour ce scrutin. Législatives : Quel rôle a joué la liste nationale ? L'instauration de la liste nationale en 2002 a donné un réel élan à la participation politique féminine. Au cours de cette année, 35 femmes avaient accédé à l'institution parlementaire. Cette discrimination positive qui, pour une raison ou une autre, est aujourd'hui critiquée, avait tout de même permis à 30 femmes de se faire une place car à l'époque, seules cinq candidates avaient été élues au scrutin direct. Il en serait de même pour les Législatives de 2007 où 30 femmes ont percé grâce au système de quota tandis que quatre seulement ont su remporter les élections sans devoir passer par un modèle de discrimination positive. Cette ascension en chiffres continue. En 2011, elles étaient 67 à s'être trouvées une place au Parlement. Toutefois, il y a lieu de dire que si dans le monde arabe, le Maroc est plus ou moins bien placé grâce à ce pourcentage de 17% de femmes parlementaires, il reste largement dépassé par d'autres pays du continent africain. Dates clés de l'évolution de la participation politique féminine - 2002 : Passage du mode scrutin de listes au mode de scrutin majoritaire uninominal dans les élections législatives. Aussi, depuis l'amendement de la loi organique relative aux communales, on procède à un mode de scrutin composé d'une représentation majoritaire et d'une autre proportionnelle. Si la commune compte une population inférieure à 35.000 habitants, il sera procédé à un scrutin uninominal à la majorité simple. Dans le cas contraire, c'est un scrutin de liste à la représentation proportionnelle qui aura lieu. - 2009 : Instauration d'un système de quota de 12%. Ce qui a permis de faire passer le nombre de sièges réservés aux femmes à plus de 3300 sièges (12,3%). Ce taux s'était établi à 0,56 % pour les communales de 2003. S'ajoute à cela la création d'un système d'incitations financières à la représentation féminine lors des élections communales générales. Ce qui, comparé avec les élus de sexe masculin, multipliera par 5 le montant réservé aux partis politiques pour chaque siège remporté par une candidate. -2009: Amendement de la charte communale, la création d'une commission de l'égalité et l'égalité des chances à caractère consultatif et l'intégration de la dimension genre dans le plan de développement local.