« Complot », « crime », « absurdité… »… La proposition d'enseignement en darija a été mise à mort par les députés, ce mardi 12 novembre au parlement, en présence du ministre de l'éducation. Un débat houleux, sur fond de polémique, qui aura duré pas moins de six heures, faisant passer au second plan le débat autour du budget du ministère de Rachid Belmokhtar. Les membres de la commission de l'enseignement, de la culture et de la communication au parlement étaient unanimes. PJD, Istiqlal, USFP, PPS…Une fois n'est pas coutume, opposition et majorité ont fait front commun contre la recommandation formulée à l'issue d'un colloque international sur l'éducation organisé récemment à Casablanca par le publicitaire et militant associatif Noureddine Ayouch. « Il s'agit d'une bêtise, d'une banalité, aussi bien au niveau de sa valeur que de son contenu. Mais les gens qui en sont auteurs ne sont pas si banals. Ils sont très influents », s'est insurgé sur un ton virulent Moqri Abouzayd député PJD, ajoutant qu' «il faudra passer sur nos corps avant qu'une telle proposition ne se réalise ». La polémique amplifiée, ce député a même clamé qu'une «une officialisation de la Darija serait un grand crime.» Offrant au ministre un ouvrage académique de 300 pages sur la darija, le député PJD a martelé « c'est un complot colonialiste qui vise à détruire les fondements de la nation et notre enseignement et qui a pour principal cible l'islam ». Abdellah Bakali, membre du comité exécutif de l'Istiqlal abonde dans le même sens. Citant les propos du poète marocain Salah Boussrif, il a déclaré que « l'anomalie ne réside pas dans la langue arabe, mais dans le regard porté sur cette langue ». Et de poursuivre : « Ceux qui appellent à la substitution de la langue arabe par le dialectal sont des ignorants qui n'ont aucun rapport avec la langue arabe. D'ailleurs, ils ne connaissent même pas la langue dialectale, la langue du peuple. Ils ne sont pas issus du peuple. Ils ne l'ont pas côtoyé le peuple. Ils ont vécu en dehors de la nation, linguistiquement, culturellement et de part leur formation. Et c'est ce qui les pousse à inciter leurs enfants à apprendre toutes les langues étrangères sauf l'arabe, qu'ils ont considéré comme une langue secondaire ou une langue morte ». Et M.Bakali de souligner « Je n'ai rien contre la francophonie, mais je tiens à préserver avec fierté mon identité arabe, amazigh musulmane ». Pour sa part, Rachida Benmassoud, député USFP a interpelé le ministre de l'enseignement, l'appelant à prendre position vis-à-vis de cet appel à la Darija « dépassé historiquement, sans fondement scientifique », allant même jusqu'à le qualifier d' « erreur mortelle ». Selon Mme Benmassoud, l'enseignement de la darija est un faux débat. « Nous avons plusieurs variantes de la Darija ; avec laquelle enseigner sans créer des clivages ? Cette langue n'a pas de grammaire établie, alors quelles normes utiliser ? » s'est –elle interrogée faisant remarquer qu'il y a déjà du pain sur la planche avec l'amazigh dont il va falloir faire évoluer l'enseignement. Elle a ainsi appelé M. Belmokhtar à prendre des mesures : trancher avec la question de la politique linguiste, promulguer une loi pour la défense de la langue arabe, encourager la traduction vers l'arabe quasi absente, mais aussi penser sérieusement à l'enseignement des langues étrangères. De sont coté Rachid Roukban, président du groupe parlementaire du PPS a déclaré « je ne crois pas qu'on puisse utiliser un autre mode d'enseignement dans nos établissements éducatifs autre que l'arabe en tant que langue principale et l'amazigh, celles-ci étant les deux langues officielles du pays. Sans oublier bien sur l'ouverture sur les autres langues vivantes ».