Horrifiés par les exactions imputées aux forces russes en Ukraine, les ministres des Affaires étrangères de l'UE ont commencé lundi à discuter d'un sixième paquet de sanctions contre la Russie, mais le consensus devient de plus en plus difficile à trouver. « Discuter de l'Ukraine signifie discuter de l'efficacité de nos sanctions. Certaines ont déjà été décidées. Et les ministres discuteront certainement des prochaines étapes », a déclaré le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell à son arrivée à Luxembourg. La plupart des ministres ont plaidé pour « une approche maximaliste » face à Moscou avec l'arrêt des achats de pétrole et de gaz russes dont les Européens sont très dépendants (respectivement environ 25% et 45% des importations totales pour ces deux sources d'énergie). Mais ils ont insisté, comme le Danois Jeppe Kofod et le Néerlandais Wopke Hoekstra, sur la nécessité de « maintenir le consensus sur les sanctions » et « l'unité au sein de l'Union européenne ». Les cinq paquets de sanctions européennes, dont un embargo sur le charbon russe, ont tous été adoptés à l'unanimité des 27, mais le Premier ministre hongrois Viktor Orban, proche du président russe Vladimir Poutine, refuse d'aller plus loin. « Nous savons que c'est très difficile pour certains Etats membres », a reconnu le chef de la diplomatie irlandaise Simon Coveney. L'Allemagne, dont 55% du gaz vient de Russie, l'Autriche, l'Italie, la Hongrie sont encore très dépendantes de leurs achats de gaz à la Russie pour faire tourner leurs économies. « Mais l'Union européenne dépense des centaines de millions d'euros pour importer du pétrole de Russie, ce qui contribue certainement à financer cette guerre. Nous devons mettre un terme à ce financement, même si cela crée d'énormes défis et problèmes », a-t-il insisté. Leur homologue allemande Annalena Baerbock ne dit pas non, mais demande une concertation pour faciliter l'adoption de ces mesures. « Nous avons déjà clairement indiqué, en tant que gouvernement fédéral allemand, qu'il y aura un retrait complet de l'énergie fossile. En commençant par le charbon, puis le pétrole et le gaz, et afin de mettre cela en oeuvre ensemble, nous avons besoin d'un plan convenu conjointement pour éliminer complètement les énergies fossiles dans l'Union européenne », a-t-elle expliqué. L'adoption d'un 6e paquet de sanctions n'est pas pour lundi. « Aucune proposition n'est sur la table », a expliqué un haut responsable européen. Mais les ministres devraient demander à la Commission de soumettre rapidement des propositions. Certains ministres ne cachent plus leur mécontentement face aux réserves de leurs partenaires. « Qu'est-ce qui doit se passer pour que l'UE décide un embargo sur le pétrole, le gaz et d'autres produits de base ? », a demandé le ministre tchèque Jan Lipavsky, partisan de sanctions « plus sévères ». « Il faut se rendre à Boutcha pour comprendre pourquoi nous devons imposer des sanctions », a lancé son homologue lituanien Gabrielius Landsbergis, dont le pays a cessé d'acheter du gaz à la Russie. Localité proche de Kiev, Boutcha, où près de 300 personnes ont été enterrées dans des fosses communes, est devenue le symbole des atrocités de la guerre en Ukraine. « Je me réjouis que nous commencions à travailler sur un sixième paquet avec des options pétrolières. Cela signifie que le travail a déjà commencé pour réunir le consensus. Et j'espère que cette fois-ci, ça marchera », a-t-il ajouté. Les ministres doivent par ailleurs valider lundi le déblocage de 500 millions d'euros supplémentaires pour financer et livrer de nouvelles armes à Kiev alors qu'une offensive russe, massive et meurtrière, est redoutée dans l'est de l'Ukraine. Cette somme s'ajoutera au milliard d'euros déjà approuvé par les Vingt-Sept.