Le poète turc Turgul Tanyol a réussi à magnétiser les pèlerins du 18ème Salon international de l'édition et du livre (SIEL) par sa présence et son talent. Avec un regard confiant, les gestes dans l'air et un français très correct, Tanyol a salué le public venu vendredi soir à Casablanca pour jouir des lectures de poètes venus de Malte, Macédoine, Colombie et d'Italie. Sobriété, musicalité et image sont les ingrédients qui font la magie des poèmes de Tanyol à la voix forte et résonnante, un peu à l'image de son pays. Je cherche toujours la simplicité pour que mes poèmes soient compris. Pour écrire des poèmes, il faut avoir un certain âge et pour les comprendre, il faut attendre un certain âge, dit ce passionné de la littérature française. Les éléments de la nature sont omniprésents dans les vers de ce poète romantique qui se veut l'un des promoteurs de la poésie turque des années 80. Ainsi, eau, rivières, pluies, mers, montagnes et ciel sont des maîtres mots de ces poèmes qui expriment ses états d'âme et de cœur, ses extases, ses dépressions et son exaltation. Je n'insiste pas pour écrire la poésie. Je l'attends, avoue-t-il, citant des propos de Charles Baudelaire le premier vers vient du Dieu et le reste vient de vous. Venant de l'Anatolie, pays qui a donné naissance aux meilleurs poètes : Mohamed Fouzoûlî au 16ème siècle, Nazim Hikmet et Yahya Kemal au 20ème siècle, Tanyol confie à la MAP qu'il ne choisit pas un thème précis pour ses poèmes. Son dernier recueil Tout n'est qu'une saison, qu'il préfère le plus, fait l'exception à la règle puisqu'il parle de sa vie, son enfant et de sa mère décédée il y a deux mois. Le poète turc estime s'exprimer en poésie mieux qu'en prose, précisant qu'il peut écrire ses poèmes en 15 minutes comme il peut les écrire pendant des années. Mes poèmes viennent d'une idée, indique ce sociologue qui avait préparé une thèse de doctorat très marxiste et qui enseigne actuellement la sociologie à l'Université de Marmara à Istanbul. Il regrette que ses poèmes ne soient pas traduits en arabe et se demande pourquoi Nazim Hikmat n'a pas remporté le prix Nobel de littérature. Cet ancien vice président de l'Union des écrivains turcs déplore un manque de communication entre les poètes arabes et leurs homologues de la Turquie. Il aime le tilleul et Jaques Brel qu'il trouve poète et annonce que ses derniers essais sont consacrés à la musique classique, particulièrement aux opéras de Willibald Gluck. Il essaie de trouver les liens entre ces opéras et ceux écrits par J.J Rousseau et Voltaire. Il a appris la langue française au lycée catholique Saint Joseph, mais il a été congédié dans les premières années. Mon père était triste, mais moi j'étais soulagé de terreurs des français, dit Tanyol avec un sourire espiègle. Tugrul Tanyol est né en 1953 à Istanbul. Il est l'auteur de plusieurs recueils de poèmes, notamment Tenez le jour par la main, Les labyrinthes d'août (Prix Behçet Necatigil), L'image du phénix dans l'eau, et Palais froid de la nymphe infidèle. Auteur de plusieurs essais et critiques littéraires, il est membre du jury Prix Cemal Sureya, du jury Balkanika 1997 et du jury pour le grand prix de poésie du ministère de culture 1998. Il est aussi l'un des fondateurs et le directeur du Festival International de Poésie à Istanbul.