Le dossier de l'immigration clandestine a été au cœur d'une réunion de haut niveau, organisée jeudi à Rabat, entre le corps diplomatique africain et des ministres marocains. L'occasion de s'expliquer sur le refoulement de migrants subsahariens des régions du Nord du royaume vers des villes de l'intérieur. Le gouvernement marocain a évoqué, jeudi, devant les ambassadeurs des pays africains à Rabat, l'épineuse question relative aux transferts massifs de migrants en situation irrégulière des régions du nord du Maroc vers les villes du sud du pays. Des sources présentes à la réunion ont confirmé à l'agence espagnole EFE que les ministres des Affaires étrangères et de la coopération, Naser Bourita et de l'Intérieur, Abdelouafi Laftit, ainsi que le ministre délégué chargé des Marocains résidant à l'étranger et des affaires de la migration, Abdelkrim Benatiq, ont pris part à la rencontre. Celle-ci aurait également connu la participation du président du Conseil national des droits de l'Homme (CNDH), Dris Yazami. «La réunion visait à expliquer la récente vague d'arrestation de migrants subsahariens par les forces de sécurité marocaines des régions du nord (Tanger et Al Hoceïma), où ils attendent le bon moment pour immigrer clandestinement vers l'Espagne, que ce soit par mer ou en escaladant les clôtures qui entourent Ceuta et Melilla», poursuit l'agence espagnole. Les ministres marocains ont indiqué que ces arrestations «ne remettent pas en cause et ne sont pas contradictoires» avec la politique de régularisation des migrants au Maroc, lancée en 2013 et ayant déjà permi la régularisation de plus de 50 000 personnes. Un rapatriement de migrants vers leurs pays serait envisagé Rien que dans la région de Tanger, ces transferts ont concerné entre 1 500 et 1 800 migrants en situation administrative irrégulière, tout en restant «conformes à la loi marocaine», confie Dris Yazami. Ce message a été transféré aux ambassadeurs africains qui, à leur tour, «ne voient pas d'objections», poursuit le président du CNDH. . Si ces migrants ont été réinstallés dans des villes plus au sud, comme Rabat, Casablanca, Béni Mellal ou Tiznit, le rapatriement ne serait pas écarté. «Une autre source gouvernementale ne cache pas que le plan serait de les renvoyer à leurs pays respectifs. A cette fin, chaque ambassade d'Afrique au Maroc a désigné un coordinateur qui sera chargé d'identifier ses ressortissants et de préparer ainsi les opérations de rapatriement.» EFE Des «opérations de rapatriement entièrement financées par le Maroc, dans le respect total de la loi et conformément aux droits de l'Homme», poursuit cette source officielle. Celle-ci insiste sur le fait que les réseaux d'immigration clandestine «sont très dynamiques et gagnent beaucoup d'argent». «Le gouvernement a le droit de se défendre en appliquant la loi, dans l'intérêt des migrants eux-mêmes». L'agence espagnole informe aussi qu'après la réunion d'explication avec le corps diplomatique africain, des représentants du gouvernement ont tenu une autre similaire avec les ambassadeurs de l'Union européenne pour «exposer les mêmes arguments et rappeler la demande marocaine à l'UE de participer plus activement dans cette lutte contre l'immigration clandestine». Expulsion des migrants d'Espagne : Rabat et Madrid ont-ils accordé leurs violons ? Jeudi, le porte-parole du gouvernement marocain, Mustapha El Khalfi, ne s'est pas contenté de se prononcer que sur la fermeture de la frontière douanière avec Melilla. Il a également évoqué l'immigration clandestine tout comme l'expulsion à chaud, par l'Espagne, de 116 migrants arrivés illégalement à Ceuta. «Cette mesure, prise indépendamment du cadre juridique, est un message fort aux réseaux clandestins d'immigration», a affirmé le ministre chargé des Relations avec le Parlement et la société civile, porte-parole du gouvernement, lors d'une conférence de presse à l'issue du Conseil du gouvernement du jeudi. Une déclaration qui contredit, en quelques sortes, la réaction du gouvernement espagnol, fait savoir jeudi soir le média espagnol El Diario. Celui-ci rappelle que le gouvernement espagnol a déclaré que l'Espagne «a activé un accord unilatéral avec le Maroc datant de 1992, qui a déjà été utilisé dans le passé». Espagne : Le ministre de l'Intérieur nie avoir payé Rabat pour l'expulsion des 116 migrants Pour le média, les autorités marocaines rejoignent toutefois les arguments présentés par l'exécutif espagnol. «Mercredi, ministre de l'Intérieur Fernando Grande-Marlaska a également utilisé le mot 'message' pour faire référence à l'expulsion de 116 personnes. «Le message est clair : Nous ne permettrons pas une immigration violente qui porte atteinte à nos forces de sécurité», a-t-il déclaré. Le 22 août dernier, un groupe de 116 migrants a réussi à escalader la double clôture de Ceuta avant d'être expulsé le lendemain par les autorités espagnoles l'ayant finalement livrés aux autorités marocaines dans le cadre d'une expulsion collective. Il y a quelques semaines, le Maroc a également lancé une large opération visant l'arrestation puis le refoulement vers des villes à l'intérieur du Maroc, de plusieurs migrants subsahariens. Une mesure ayant créé l'indignation chez les associations marocaines de migrants et des droits humains.