Dix ans après les fameux évènements racistes d'El Ejido, la situation des travailleurs immigrés, qu'ils soient légaux ou irréguliers, est toujours marquée par la précarité, selon les ONG de défense des droits de l'Homme et des immigrés en Espagne. (Par Jalila Ajaja) Dix ans après les graves événements racistes d'El Ejido, qui semblent avoir été relégués aux oubliettes, "la situation n'a pas changé pour le meilleur", s'insurge l'Association des Travailleurs Immigrés Marocains en Espagne (ATIME). "Si la convivialité entre immigrés et population autochtone s'est améliorée un tant soit peu, elle reste cependant très fragile", tient à avertir cette ONG de défense des droits des travailleurs immigrés marocains, qui dénonce le non accomplissement des accords signés et des promesses données après les émeutes raciales de la localité andalouse. Considérés comme l'une des émeutes à caractère racial les plus déplorables qui soient jamais survenues en Espagne, les événements d'El Ejido (Andalousie, province d'Almeria), en février 2000, se sont déclenchés après le meurtre de trois espagnols par des immigrés. Trois jours durant (du 5 au 7 février), une véritable chasse à l'immigré va avoir lieu dans cette localité andalouse, célèbre pour ses milliers d'hectares de serre implantés et entretenus grâce à la main d'œuvre immigrée notamment Marocaine. Les travailleurs immigrés vont être la cible de violences racistes sans précédent et des locaux d'ONG de défense des immigrés vont être saccagés. Le rôle de la police espagnole, qui avait refusé d'intervenir, avait été pointé du doigt. La vague raciste qui a secoué la localité espagnole d'El Ejido n'était fortuite. C'était le résultat d'une politique fondée sur la ségrégation envers les immigrés, en majorité Marocains, qui étaient acceptés et exploités comme main d'œuvre bon marché mais rejetés en tant que riverains et voisins. Dix ans après ces douloureux évènements, la situation est la même et "la politique menée localement a peu changé", affirme, de son côté, SOS Racisme. Bien qu'il s'agisse de l'un des évènements racistes les plus graves en Espagne, "personne n'a été condamné jusqu'à aujourd'hui et les conditions des personnes qui travaillent dans les serres sont toujours précaires", s'indigne l'ONG espagnole qui a saisi, l'occasion de la commémoration de ces évènements pour critiquer à nouveau et sévèrement la politique menée par l'Espagne en matière d'immigration. Fin 2009, l'Espagne a adopté sa quatrième réforme de la Loi sur l'Immigration, une Loi plus restrictive qui a été fortement décriée par les associations des immigrés et les défenseurs des droits de l'Homme, unanimes à souligner qu'elle "comporte des restrictions importantes des droits fondamentaux des immigrés". La nouvelle Loi, qui constitue un véritable revirement de la politique socialiste de l'actuel gouvernement espagnol, prévoit un durcissement en matière d'immigration illégale et de gestion de l'immigration. Parmi ces clauses décriées, l'extension de 40 à 60 jours de la période maximum de rétention des immigrés en situation irrégulière, ainsi que des restrictions des procédures de regroupement familial. Selon SOS Racisme, la nouvelle Loi sur l'Immigration, " qui n'a de nouveau que la forme et non pas le contenu ", continue d'être dans " son essence discriminatoire en encourageant le racisme institutionnel ". Cette nouvelle Loi, " propose de vieux remèdes à de nouvelles réalités " du panorama migratoire en Espagne, relève l'ONG de lutte contre le racisme et la discrimination. De son côté, ATIME, a saisi l'occasion de la commémoration des évènements d'El Ejido pour réaffirmer son refus d'utilisation de la question de l'Immigration pour des considérations électoralistes. " L'utilisation de l'Immigration à l'approche de chaque échéance électorale ne peut être tolérée ". Instrumentaliser cette question d'une extrême sensibilité pour remporter des voix électorales est à bannir en raison des répercussions dangereuses qui peuvent en découler surtout en ces temps de crise, a tenu à avertir l'ONG des Travailleurs immigrés Marocains.