L'adhésion attendue du Maroc au sein de l'Union Africaine va mettre fin à une anomalie qui a duré 32 ans. Trois décennies de retrait salutaire du Royaume, qui lui a évité d'assister à la dérive idéologique de la défunte OUA, un mal qui a également taraudé la nouvelle Organisation panafricaine. Il a fallu attendre la chute de l'un des parrains de cette descente aux enfers, le dictateur libyen Kadhafi, et le constat par la majorité des pays africains de la vanité des prises de position idéologiquement motivées, dont la stérilité n'a d'égal que la fragilité politique et économique du continent qu'elles ont logiquement entraîné. Le Maroc a patiemment tracé sa voie vers la démocratisation et le développement économique, grâce à la sagesse de feu Hassan II, qui a su amorcer à temps le virage nécessaire pour sortir le pays de la pente descendante sur laquelle il se trouvait, avant que SM Mohammed VI ne vienne amorcer le décollage du Royaume en procédant à des réformes en profondeur. Ce n'était ni évident, ni facile. Il a fallu remuer les méninges pour concevoir des stratégies efficientes et adaptées et retrousser les manches pour bâtir le Maroc du nouveau millénaire. Au terme de quoi, il est devenu un exemple encourageant pour les autres pays africains, jusqu'alors embourbés dans un pessimisme de mauvais aloi. « Yes, we can » (Oui, nous pouvons) n'était pas seulement alors un simple slogan, qui ne fut inventé que plus tard par le candidat aux élections américaines, le président actuellement sortant Obama, mais une réalité palpable à laquelle les peuples africains pouvaient se référer. Pendant ce temps, l'axe géopolitique bancal Alger-Abuja-Prétoria s'est constitué en contre-exemple pérorant et inopérant. Comme quoi la taille géographique, le poids démographique et l'abondance des richesses naturelles sont loin d'être des garanties de succès, le pragmatisme et l'huile de coude étant de bien meilleurs leviers de progrès. Il est fort instructif d'observer que le BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) émergent d'il y a quelques années n'est plus désormais que le RIC (Russie, Inde, Chine), la sélection naturelle par le tamis des bons choix économiques ne laissant dans la course que les politiquement compétents. Rien ne sert de dénoncer l'étreinte étouffante de l'impérialisme quand les directions politiques ne donnent pas à leurs peuples la liberté d'aller de l'avant et se complaisent, au contraire, à parasiter leurs efforts. Le leadership géopolitique s'acquiert par force d'attraction qu'est le modèle de réussite que tout un chacun peut constater de ses propres yeux, il ne peut être imposé par des discours grandiloquents, même teintés d'un progressisme mensonger, et encore moins par la pression et/ou la corruption. Le Maroc s'est forgé une image de marque en Afrique grâce au dynamisme de ses hommes d'affaires, libres d'entreprendre et motivés par une culture qui exalte, au lieu de dénigrer, la réussite matérielle, ainsi qu'une diplomatie royale très active sur le continent, qui a su, à la fois, les inciter à chercher de nouveaux horizons de profit au-delà du Sahara et les accompagner dans leurs démarches par l'établissement de partenariats interétatiques gagnant-gagnant. Le Maroc n'a jamais cherché à créer un axe géopolitique en Afrique, ni à s'opposer à quelque pays que ce soit. Exploitant intelligemment les concepts les plus évolués des temps actuels, il a plutôt étendu un réseau grandissant de partenaires égaux, qui collaborent pour améliorer le quotidien de leurs peuples. Le meilleur exemple en est la prochaine réunion des pays africains participant à la COP 22, où il sera question de défendre ensemble les intérêts du continent. L'objectif n'est pas de brailler face aux pays développés, dans une posture de victimes courroucées, subissant les effets d'un réchauffement climatique d'origine anthropique, dont les pays africains ne sont nullement responsables. Aussi vrai cela soit-il, se lamenter sur son sort est totalement improductif. Il s'agit plutôt d'arracher, par la diplomatie et l'argumentation rationnelle, les indispensables financements pour sauver la situation de plus d'un milliard deux cent millions d'Africains, qui, sinon, iront voir, par vagues de migrations successives et ininterrompues, là où l'herbe est plus verte. Voilà en quoi, entre autres, le Maroc peut se montrer utile en rejoignant les rangs des pays de l'Union Africaine. Il ne revendique pas seulement un droit d'appartenance, par ailleurs naturel, il est porteur d'un apport qu'il met au service de la communauté africaine.