La troisième chaîne marocaine du Nord Médi 1 a présenté le mercredi 15 octobre au soir une émission sous forme d'un documentaire époustoufflant; dédié à la fille du monde rural au sujet de sa scolarisation et les handicaps qui se dressent sur le chemin de son école. La chaîne a choisi comme terrain de tournage la très envoûtante localité montagneuse de Asni, dans la région de Marrakech, au pied du célébre Toubkal. Ce fut alors une belle occasion de mener les téléspectateurs vers un voyage virtuel envoûtant et emblématique, grâce à un décor naturel pittoresque et des paysages verdoyants à couper le souffle. Elle a choisi également comme cible la maison de la fille rurale, qui lui est dédiée afin de lui permettre d'échapper à son destin qui plane sur son avenir à travers le mariage précoce d'une part et de lui offrir une chance de tenter elle aussi sa chance afin de forger une personnalité à l'instar de sa sœur citadine. Le décor du tournage est d'une rare beauté et les acteurs choisis pour ce tournage ne sont autres que les filles du village, leurs maîtresses à la maison de la fille et leurs institutrices. C'est un documentaire qui a connu un grand succès à tous les points de vue, dans la mesure où tous les objectifs assignés à son scénario sont atteints avec plus ou moins de difficultés liées au terrain accidenté et au contexte du tournage. Les téléspectateurs qui ont eu la chance de suivre le déroulement de ce documentaire ont régalé leurs yeux via des images inédites et des paysages pris au vif et filmés dans le tréfond de l'imposant Haut Atlas. Ils se sont trouvés accrochés à leurs écrans; tellement le jeu en valait la chandelle. Le scénario choisi à cette fin fut lui aussi une réussite parfaite dans la mesure où il a atteint les objectifs qui lui furent assignés. L'un de ces objectifs est sûrement celui-là même qui nous a permis tous de faire la différence criante entre le discours officiel afférent à la scolarisation de la fille dans le monde rural d'une part et le discours officieux, celui-là même emprunté par la narration du documentaire, et qui montre et démontre -preuves à l'appui- combien sommes-nous très loin encore du but et à quel point le gouvernement a échoué dans le volet le plus crucial relatif à la lutte contre les perditions scolaires. Les moments forts de ce documentaire fussent nombreux, mais quelques uns se sont détachés du lot pour s'imposer grâce à la force de leur matière à conviction d'une part et la pertinence de leur message d'autre part. Citons les un à un pour nous imprégner de leur leçon et de leur évidence. Le premier moment fort est illustré par cette fillette venue chez la directrice du foyer de la jeune fille rurale à Asni pour la prier et la conjurer afin de lui autoriser à se disposer d'un lit au foyer, avec le but -difficile à atteindre par ailleurs- d'échapper à son sort malheureux, incarné par ce jeune homme du village, venu demander sa main à ses parents pour l'épouser. Un moment fort en sentiments, en affectivités et en symboles, qui nous a contraint tous à méditer afin de militer en sa faveur. Ce qui est étrange dans cette scène dramatique est que la fillette en larmes semblait quémander et mendigoter un droit qui lui revient en droit, car cela va contre l'esprit même de la politique de l'Etat qui, depuis plusieurs décades, nous martelait les oreilles par une soi disante stratégie volontariste qui visait une résolution radicale et une solution finale du fléau ô combien cruel et injuste de la privation de la fille rurale du cycle d'enseignement secondaire et supérieur. La deuxième scène ayant constitué le deuxième moment fort du documentaire est celui là incarné par l'une des maîtresses du foyer de la fille qui, après avoir tenté vainement de joindre des filles par téléphone à cause de la faible couverture du réseau télécom, a décidé d'entamer une descente à l'enfer, car ces filles résident au tréfond d'une vallée, mais cette vallée est encerclée par des montagnes de très haute altitude, ce qui allait contraindre la maîtresse à monter d'abord la pente longue de plusieurs kilomètres, avant d'entamer une descente de trois kilomètres à peu près, puis traverser la rivière, puis ensuite monter une autre pente de plusieurs centaines de mètres, avant de frapper à la porte de la première fillette. La maîtresse assez âgée a du souffrir énormément et les spectateurs étaient impuissants à lui apporter le moindre secours, se contentant d'avoir de la compassion pour elle. Mais fallait–il s'interroger pourquoi cette femme assez âgée a pris tous les risques potentiels et effectifs d'aller défier le majestueux Haut Atlas pour aller rejoindre contre vents et marées les quelques fillettes enclavées au fond d'une vallée capricieuse ? C'est pour leur annoncer l'approche de L'EXAMEN DE TEST (tenez-vous bien messieurs dames) qu'elles devraient passer et auquel elles sont assujetties afin de pouvoir gagner une place au foyer !!!!! Ne trouvez-vous pas cher lecteur qu'il y a quelque chose qui sonne mal dans cette faire ? Mais bien sûr, quelque chose sonne le glas et sent la nausée, car ces filles devraient être affranchies de cette corvée et devraient par contre disposer directement d'un droit qui leur revient en droit et en toute logique et en toute libérté. Sinon, comment seraient–elles en mesure d'échapper à un sort scellé d'avance et comment le gouvernement peut-il prétendre avoir la ferme décision de terminer une fois pour toutes avec le fléau de la perdition scolaire ? Le mérite de ce ducumentaire est d'avoir apporté un démenti catégorique à une certaine idée de la politique à laquelle manque le mordant, la virilité, l'audace, la fermeté et la capacité bienveillante et avenante. Une politique qui prétend disposer d'une stratégie à long terme, mais qui donne en même temps toutes les preuves possibles de son impuissance. L'autre mérite du documentaire est d'avoir amené les téléspectateurs à constater que seule la solidarité qui règne parmi les habitants et les encadrants permet aux jeunes filles rurales de cette localité à tenir le coup et aller de l'avant, malgré l'atrocité des obstacles. D'ailleurs, une scène du tournage a montré des institutrices accepter volontiers donner des cours préparatifs nocturnes à l'examen de test pour aider les fillettes à avoir toutes les chances de leur côté, afin d'arracher une place au foyer, alors que le bon sens impose au gouvernement d'opérer purement et simplement une exrtension du foyer, afin qu'il s'élargisse à toutes les filles du village sans la moindre exception. Car ce bon sens nous enseigne que l'éradication de la perdition passe par le devoir de donner à ces belles filles bien éduquées et très modestes une chance de l'emporter sur leur malheur. Les quelques prises de vues consacrées à la maison de la jeune fille n'ont pas permis aux téléspectateurs de jeter un regard sur le dortoir, le réfectoire et la salle d'études. Il semble que le staff du tournage a oublié de filmer la maison de l'intérieur, car de prime abord il s'agit bien d'une maison construite dans le règles d'art et qui semble avoir bénéficié d'une attention particulière. Cela s'explique par le choix de la période du tournage du documentaire qui a coïncidé juste avec l'ouverture du foyer après les vacances d'été. Les filles anciennes comme les nouvelles n'ont pas encore rejoint leurs salles d'études et c'est pourquoi l'équipe du tournage est allée chercher les filles dans leurs foyers. Donc la maison fut filmée sans la présence de ses locataires et c'est bien dommage. Mais cela n'affecte en rien la qualité intrinsèque du documentaire qui reste l'un des rares à mettre le doigt sur la plaie qui gonfle et qui pue et qui éclate et qui parle loyalement. Bravo à Médi 1 TV. Bravo à l'équipe du tournage de Médi 1 TV . Bravo aux actrices ayant meublé l'espace de ce documentaire épatant qui sont les fillettes du village, leurs familles, leurs maîtresses et leurs institutrices. Mais un non bravo catégorique au gouvernement qui est seul responsable de la production d'une fausse note qui a faussé toute la partition. Cette fausse note est incarnée par ce maudit examen de test pour choisir parmi plusieurs dizaines de filles celles qui méritent – via des moyennes de note au dessus de 8 sur dix – une place dans le foyer. Cette moyenne insaississable par la majorité écrasante des filles consacre un autre principe qui est celui de la sélection raciale, alors que ce qui est demandé au département chargé de l'Education est de lutter contre la perdition scolaire dans toutes ses formes et non pas opérer une sélection injuste et arbitraire car cette sélection va à l'encontre de la politique adoptée depuis l'indépendance et qui consiste à la scolarisation générale de tous les Marocains et les Marocaines.