La Gazette du Maroc présente une série de deux reportages portant sur le travail d'organisations non-gouvernementales marocaines vouées au développement local des communautés de l'Atlas. Une aide essentielle à des populations qui, malgré une richesse culturelle énorme et une chaleur humaine sans pareille, font partie de la frange la plus pauvre de la planète. Ces populations vivent en effet, en marge de la modernité et ne récoltent que quelques miettes du développement que connaît le reste du Maroc. Au pied du jbel Toubkal, accroché à flanc de montagne, se trouve le village d'Agguerssioual. Pour la majorité des 30 familles de ce village, qui vivent principalement de l'élevage et de la culture de noix, leur revenu est misérable. La vente d'une vache rapporte environ de 3.500 à 4.500Dh, le douar en redonne 2.000 et les travailleurs émigrés versent environ 1.500 Dh par année.Pour la majorité des villageois, le revenu annuel représente finalement moins de la moitié du salaire minimum garanti (SMIG). En comparaison avec le SMIG, soit 1.800Dh par mois, un "salaire" qui en réalité n'arrive même pas à couvrir les besoins minimes d'une famille, les habitants d'Agguerssioual eux, avec un revenu de moins de 2000 Dh par an, font partie du quart de la population la plus pauvre de la planète, soit ceux qui vivent avec 1$ et moins par jour. Pour les plus aisés du village, en plus des revenus de base, la famille la plus riche du village, grâce aux pommiers et aux cerisiers qu'elle possède, arrive à s'en sortir un peu mieux. C'est dans ce contexte de paupérisation que l'Association marocaine de recherche et d'action pour le développement social et humain (AMRASH), fondée en 1988, a décidé d'œuvrer à Agguerssioual. L'une des raisons qui ont aussi poussé l'association à s'intéresser à ce village s'explique entre autres par le travail de prospection qu'AMRASH a fait. On nous avait signalé Agguerssioual comme étant un village dynamique. Il y avait une assemblée qui se réunissait pour toutes questions d'intérêt public ", soutient Leïla Tazi, présidente-fondatrice de l'association. Dans un travail de collaboration et d'accompagnement, le premier projet qu'a appuyé AMRASH fut la fabrication de lanternes solaires en 2000. Répondant aux besoins d'électricité des villageois, Brahim Idhali, président de la jamaâ d'Agguerssioual et membre fondateur de l'association locale, a par la suite entrepris la construction, en compagnie d'Abdellah Idhammou et d'Aït Rachid, de la Maison de l'énergie et de l'environnement. Cette entreprise verte qui se spécialise dans la fabrication, la commercialisation et le service après-vente d'installations d'énergie solaire «a débuté avec un don de 17.000 Dh d'AMRASH. En plus, elle nous a fourni les contacts nécessaires auprès d'organisations internationales et nationales", explique Idhali. Malgré le développement de cette micro-entreprise responsable, elle offre un produit qui bute sur l'incapacité de répondre aux exigences que réclament les villageois, aux exigences de la vie moderne, à l'image des plaisirs dont jouissent les habitants des grands centres urbains. " L'énergie solaire n'est pas assez puissante ", affirme le président de l'association. Brahim Aït El Haj. Un habitant du village, abonde en ce sens : " Je n'aime pas ce système. Il ne génère pas assez d'énergie, surtout quand le taux d'ensoleillement est bas. Heureusement, ces temps-ci il y a beaucoup de soleil ". L'électricité solaire n'est qu'une mesure temporaire, une solution accessoire en attendant que le programme national d'électrification, qui a pour objectif d'électrifier l'ensemble du territoire marocain d'ici 2007, touche Agguerssioual. Difficile autonomisation/B Après quelques années d'accompagnement, ayant servi de catalyseur et d'accompagnateur aux fins des projets de développement de la communauté, AMRASH aimerait bien se retirer d'Agguerssioual afin de céder entièrement la place aux habitants du village pour qu'il y ait pleine et entière autonomisation. "L'intérêt d'Amrash pour ce village était au départ de donner un coup de pouce financier, l'impulsion nécessaire aux réalisations. Car pour nous, ce village est très riche. Riche en ressources humaines organisées, ou en tout cas qui étaient organisées", lance Leïla Tazi visiblement dérangée par ce qu'elle constate. Partie de Rabat, la présidente de l'Association vient d'arriver au village. Pédiatre, ex-enseignante et chercheur à la Faculté de médecine de Casablanca, et consultante pour l'Organisation mondiale de la santé, la fondatrice d'AMRASH est exaspérée par ce qu'elle constate. D'entrée de jeu elle fait part des problèmes d'autonomisation et de déresponsabilisation que rencontre l'association d'Agguerssioual qu'AMRASH parraine. " La question de déresponsabilisation s'est toujours posée et nous avons voulu essayer de minimiser les effets pervers de la dépendance et du manque d'initiative. C'est pour cela que nous n'avons jamais financé à 100% quoi que ce soit. Quand on voit qu'une initiative a été prise, nous l'accompagnons. A titre d'exemple, tout a démarré ici par un atelier de couture et de tricots que voulaient les jeunes filles. C'était le groupe le plus dynamique qui avait un projet précis et qui s'est organisé pour monter son atelier. Nous avons négocié avec elles pour justement apporter le moins possible. Elles nous disaient “apportez, apportez ”, mais nous leur avons dit : “ça prend un groupe qui doit s'engager. Il faut une organisation, des horaires. Vous devez vous apprendre ce que vous savez”. Il y avait des capacités locales, poursuit la présidente d'AMRASH. Elles voulaient qu'on construise, nous n'avons pas construit. Par la suite nous leur avons dit de trouver une maison, un local. Elles ont trouvé une maison d'émigrés qui était vide. Donc ce que nous avons apporté, c'est une personne avec une formation supérieure, un peu de tissu et une première machine. L'atelier a démarré puis sont nés d'autres désirs, d'autres projets. Nous, nous proposions des idées afin qu'elles puissent parler des choses dont elles avaient besoin, ce qu'elles souhaitent et, par la suite, nous les poussions à réfléchir aux possibilités de réalisation". Juxtaposé aux problèmes d'autonomisation et de déresponsabilisation des habitants du village, se trouve aussi celui du manque de débouchés et de la difficulté de commercialisation des produits artisanaux. Selon la présidente d'AMRASH, le problème proviendrait du manque de marchés, de la concurrence. "Pendant des années elles ont produit de magnifiques pulls pour le marché local et l'association leur a suggéré l'idée qu'elles pourraient fabriquer un produit qui ne soit pas concurrencé. Mais nous leur avons aussi dit que nous ne commercialiserions pas pour eux ". Le projet est toujours là, en attente qu'il soit saisi. A défaut de pouvoir concurrencer les produits similaires d'autres solutions devront être étudiées. Innover et promouvoir la richesse culturelle locale Quelles solutions envisage-t-on afin de briser ce cercle vicieux ? " Comme ils ne peuvent pas se battre sur le terrain des grands, ils doivent innover et promouvoir la richesse culturelle locale. Sinon ils seront entraînés dans le système capitaliste et ils ne pourront jamais y survivre", avance la présidente d'AMRASH. Dans un tel contexte, le marché qu'offre celui du commerce équitable, un créneau commercial en plein essor au niveau mondial, serait-il envisagé ? " Le commerce équitable serait bienvenu, mais peut-être pas dans tous les domaines. Il faut avoir un produit qui intéresse un certain marché. Et le produit qui peut intéresser c'est un produit fait à la main, surtout les tricots avec un style particulier, les tapis, les bijoux traditionnels et les peintures ". Mais l'étape suivante qui consistait à dépasser le cadre du marché local, un marché qui a atteint un niveau de saturation assez rapide, ne sera restée qu'au stade de projet. "Ils n'y ont pas cru, ils n'ont pas su prendre le virage pour d'autres produits à vendre localement ou à des touristes. Et encore là, il n'y a pas tant de touristes que ça", constate-t-elle. "Ce n'est pas évident pour eux, car ils vivent dans une situation de pauvreté très importante. Donc l'investissement en argent, en temps et en matériaux est très lourd à supporter, ça coûte cher. On bute toujours sur les bénéfices qui ne sont pas suffisants et sur une difficile commercialisation". Depuis un an, l'atelier de tricot et de couture est vide. A Agguerssioual, tout est en place pour favoriser le tourisme écologique. A titre d'exemple, des gîtes rustiques et pittoresques ont été construits. Une petite boutique a été installée dans l'une des pièces des habitations destinées aux touristes. En fait, Agguerssioual a tous les atouts pour devenir une destination touristique des plus appréciées, une étape incontournable sur la route d'Asni. D'autant plus que le créneau du tourisme écologique est de plus en plus populaire auprès des Européens et des Nord-Américains. Idhali reste tout de même pessimiste. "Nous avons les touristes qui passent par ici, mais c'est seulement pour trois mois". Ainsi, quelles sont donc les solutions d'avenir qui sont envisagées pour que le village puisse sortir de ce marasme ? La question reste sans réponse. Le président du village, malgré sa jeunesse et son dynamisme, semble dépassé par la situation qui afflige les membres de sa communauté. Quels sont les projets d'ici les dix ou quinze prochaines années ? "Nous n'en n'avons pas", soupire l'homme, sous le regard attentif et songeur de Leïla Tazi. Education "Il y a 100% de scolarisation primaire, filles et garçons confondus" se plait à le rappeler la présidente d'AMRASH. Mais l'éducation post-primaire, qui n'est pas obligatoire, pose de sérieux problèmes. Un nombre important de décrocheurs s'accumule. A ce sujet, la présidente d'AMRASH demande au président d'Agguerrssioual si certains élèves qui avaient abandonné les cours sont retournés sur les bancs d'école. "Hanane va-t-elle toujours à l'école, elle n'a pas abandonné ? Et Hassan lui ?". L'éducation, clé d'accès à l'épanouissement individuel et collectif, est essentielle. Mais pour ces citoyens, à l'image de millions de Marocains et Marocaines, le savoir et la connaissance sont un luxe que l'on ne peut se payer. Sur une population de plus de 200 habitants, 4 seulement ont un niveau baccalauréat et 2 un niveau universitaire. Pour une communauté comme Agguerssioual où 75% de la population est âgée entre 20 et 40 ans, c'est le développement, l'avenir même du village qui est en jeu. Il est 8h00. Brahim, Hassan et Mohamed, âgés d'une douzaine d'années, s'apprêtent à aller à l'école. A la main, chacun a une cruche qu'il devra remplir au retour des classes. "L'école c'est très bien . Il faut aller à l'école car après on peut avoir un métier. On apprend beaucoup de choses" dit le plus âgé des trois. Les 3 amis disent aussi vouloir aller au lycée et à l'université un jour. Mais malheureusement, à l'image de la majorité des adolescents du village, ces trois enfants risquent fort bien d'être rattrapés par la dure réalité et de ne pas pouvoir poursuivre leur rêve. Plus loin, trois autres élèves, âgés entre 6 et 8 ans, s'apprêtent eux aussi à partir pour l'école. "Savez-vous ce que vous voulez faire plus tard ?", leur ai-je demandé, m'attendant à une réponse du genre "policier, pompier ou docteur". Mais Saïd, Mustapha et Yassine, ne le savent pas. A l'image des grands du village, ces enfants imitent ce qu'ils perçoivent. A l'image de ceux du village qui sont partis, ces trois enfants risquent d'être parmi les prochains haraga qui auront voulu fuir la difficile réalité qui les afflige. Avec plus de 250.000 diplômés universitaires au chômage au Maroc, il n'est guère difficile de comprendre le peu d'importance que ces communautés accordent aux études. "90% des familles s'attendent à ce que leurs enfants fréquentent l'école primaire et c'est tout", résume le président de la jamaâ. Le décrochage, ici comme ailleurs au Maroc, est à la fois le résultat et le triste reflet des conditions socio-économiques et des priorités politiques qu'a vécues jadis le pays. Les pouvoirs publics ne font rien pour améliorer la situation. L'infrastructure et la logistique y sont absentes. Pour se rendre au collège d'Asni, qui se trouve à plusieurs kilomètres du village, les parents doivent débourser 90 Dh par semaine. Pour ce qui est du lycée, qui se trouve à Marrakech, la problématique se pose avec encore plus d'acuité. Aït Rachid Brahim a 47 ans et il est père de famille. Sa fille de 20 ans, la plus âgée, n'a jamais été à l'école, tout comme celle de 18 ans. "L'école était trop loin, elle était à Imlil. On ne laisse pas les petits enfants , surtout les filles, partir aussi loin", explique le père. Khadija, sa fille de 13 ans, voudrait bien aller au collège d'Asni mais elle ne peut pas car "il y a un problème de logement et c'est trop cher. Comme le transport qui coûte aussi très cher !", s'indigne l'homme qui reconnaît ne pas pouvoir exaucer le souhait de ses filles. "Nous avons déjà pensé, entre les différentes jamaâ, d'avoir des autobus qui feraient la navette, mais il y a un manque de moyens" déplore Brahim Idhali."Jusqu'à maintenant nous avons demandé au président de la commune, Zaarour Al Hussein, des autobus pour le transport scolaire, mais on n'a toujours rien. On nous dit oui on va voir, mais on attend toujours", déplore-t-il. Si on réussit à avoir le transport, c'est 15 villages de la vallée d'Imlil qui en bénéficieront". Mais il y a seulement 3 villages qui ont fait la demande de transport". L'idée que les 15 villages s'unissent et qu'ils fassent front commun auprès du président de la commune permettrait-il de faire bouger les choses en faveur de l'implantation d'un système de transport scolaire ? "Oui, c'est vrai, mais nous n'avons pas encore fait ça", répond songeur le président. Résultat d'une culture politique et d'une mentalité qui tend aujourd'hui à disparaître, le manque de communication et d'agenda politique commun entre les différentes jamaâ est flagrant, tout comme le manque de volonté des dirigeants politiques, tous niveaux confondus. Là où l'Etat n'est pas Afin de lutter contre l'analphabétisme, l'association d'Agguerssioual et AMRASH ont mis sur place un projet d'alphabétisation. Il consiste à apprendre à lire et à écrire aux enfants de 13 ans et plus, tout comme aux femmes et hommes qui désirent étudier. A titre d'exemple, dit Leïla Tazi, "nous avons démarré avec différents groupes : des groupes de jeunes filles, de filles plus âgées, de jeunes hommes, nous avons aussi essayé avec des femmes adultes. Mais seules les jeunes filles et femmes entre 13 et 30 ans ont finalement bénéficié du programme d'alphabétisation pendant quatre ans". Depuis six ou sept ans, la société civile marocaine a joué un rôle dans les projets de développement des douars, et ce, grâce à une conjoncture particulière, dont l'une des plus importantes étant l'évolution de la mentalité des décideurs. "La société civile a dit aux pouvoirs publics de renforcer la capacité des gens, de leur faire confiance, de leur donner la place qui leur revient aux fins de la poursuite des projets de développement. Ils vous diront ce qu'ils souhaitent et ils réaliseront les projets à moindre coût, et ce, par la mobilisation", comme le précise Leïla Tazi. Certes, l'Etat, accompagné de certaines organisations internationales spécialisées dans le développement et d'une multitude d'associations locales, fournit certains efforts en vue du développement d'infrastructures de base dans les coins les plus reculés du Maroc. Un constat est toutefois bien clair : les ONG répondent aujourd'hui aux besoins essentiels auxquels l'Etat n'a pas su répondre jusqu'à présent. Education, santé, électrification et accès à l'eau potable, pour ne nommer que ces besoins primaires auxquels plusieurs communautés n'ont toujours pas accès, sont aujourd'hui pris en charge par des associations de développement et par les communautés, celles-là mêmes qui sont parmi les plus pauvres. "Si nous faisons ce que nous faisons, c'est que nous estimons que les pouvoirs publics n'ont pas fait ce qu'ils avaient à faire". Heureusement, comme le souligne Leïla Tazi, "que l'Etat commence à avoir des projets en montagne et non seulement dans les villes. C'est un travail extrêmement embryonnaire de démocratie participative". AMRASH, comme plusieurs autres associations marocaines, a pu démontrer aux décideurs que le développement de ces communautés éloignées était possible et qu'elles devaient être prises beaucoup plus en considération qu'elles ne l'ont été jusqu'à présent. Des discours aux actions, l'Etat commence à prendre en considération l'importance que représente le développement de ces régions montagneuses, parmi les plus pauvres du Maroc. Jusqu'à tout récemment encore, une certaine méfiance des pouvoirs publics, nationaux et régionaux, pesait sur le travail des associations. La culture makhzenienne tend aujourd'hui à se dissiper au profit d'un travail de collaboration entre l'Etat et la société civile, et ce, au profit des citoyens marocains. Les citoyens et les associations ne peuvent toutefois crier victoire. L'autonomisation et la démocratisation de la gestion de la communauté sont encore au stade embryonnaire, l'institutionnalisation des pratiques antérieures étant profondément enracinée. "Cela fait partie de notre bataille", soutient Leïla Tazi. Un travail ardu d'autant plus qu'il s'accompagne d'une autre lutte : l'indépendance face aux tentatives de cooptation de l'Etat, d'ONG étrangères, ou encore des associations marocaines. La plupart des habitants et des familles qui quittent Agguerssioual, tout comme ailleurs dans les villages marocains où sévit l'exode rural, le font de façon définitive. “Mais mon cas est particulier", assure le président du village qui avait tenté sa chance à Marrakech il y a de cela quelques années. "Avec la possibilité de mettre sur pied l'association avec AMRASH, je suis revenu ici car il y avait du travail et je pouvais travailler pour le bien de la communauté", soutient Brahim Idhali. "Depuis 1994 quatre familles sont parties pour la grande ville. Avec la pauvreté qu'il y a ici, c'est difficile", lance Brahim, visiblement triste et désespéré par l'exode rural qui afflige le village. Selon le président, cet exode a commencé au cours de la deuxième moitié des années soixante-dix du siècle dernier. Seulement depuis 1999, ce ne sont pas moins de 6 familles qui ont quitté le village, "dont 4 , précise-t-il, qui sont parties en raison de l'accroissement de la pauvreté. Depuis 1975, les gens s'appauvrissent", dénonce Brahim. Perspectives d'avenir Mais contrairement au président de la Jamâa qui a décidé de revenir à son village natal après avoir tenté sa chance dans la grande ville, les habitants du village ont compris que leurs enfants ne rêvent que d'une chose : celle d'une vie meilleure. En Espagne peut-être ? A défaut de recevoir l'aide et l'infrastructure nécessaire que devrait normalement leur fournir l'Etat, AMRASH tente, tant bien que mal, de préserver l'héritage culturel des habitants du Haut-Atlas et de faire en sorte qu'ils puissent s'épanouir pleinement. Alors que l'Etat ne s'intéresse que de très loin et de façon sporadique à cette population et que les habitants des centres urbains sont déconnectés des besoins de celles-ci, des associations, à l'image d'AMRASH, s'en soucient. Malheureusement, cette association ne peut que panser les plaies en attendant que ceux à qui incombe la responsabilité du bien-être de ces populations se décident à agir. "L'Etat n'étant pas là, nous étions prêts, comme nous nous appelons recherche-action, à démontrer aux pouvoirs publics qu'il peut y avoir un développement accéléré en dynamisant au moment où il le faut, comme il le faut ". Tout ce que demandent ces villageois c'est d'être mieux logés et d'avoir un peu plus de confort. D'avoir l'eau, l'électricité, que leurs enfants trouvent des dispensaires où se soigner et qu'ils puissent faire des études. "Ça c'est une pauvreté dont ils ne veulent plus. Mais s'ils n'ont pas l'air de tant entreprendre, c'est qu'il y a cette culture de contentement". Pour la présidente d'AMRASH, qui observe et qui participe au développement de cette population depuis plusieurs années, une telle attitude s'expliquerait par une caractéristique culturelle qui amène les gens à exclure tout ce qui est consommation futile, accessoire et superficielle. Une vision idéaliste qui, bien que basée sur des principes et des valeurs sensés, entre toutefois en contradiction avec certaines réalités du terrain. A voir ses frères et ses sœurs, ses cousins et ses cousines qui, ayant émigré vers des lieux où l'on jouit de plus de confort, envoient de l'argent et des biens matériels à l'occasion, il est toutefois bien difficile de se satisfaire de si peu. Ils aimeraient bien avoir la télévision, une voiture, ou pour les adolescents qui n'ont pas encore quitté le village, la dernière paire de Nike. "Mais après tout, ils n'en crèvent pas", lance Leïla Tazi.Alors que la majorité des 216 habitants du village, en particulier les jeunes, voudraient quitter Agguerssioual pour la grande ville, pour l'étranger, la présidente d'Amrash, elle, aimerait bien venir prendre sa retraite ici, loin des centres urbains, de la course folle au temps qu'impose le rythme du travail, loin de cette société où règne, en roi et en maître, le consumérisme et le matérialisme. "C'est un coin de paradis ici !". Population de Bouhrazen : 200 familles/1200 hab. Salaire moyen : 2000DH/Hab/an soit 12 à 14.000 DH / famille / an, dont 30% du revenu proviennent des membres de la famille émigrés. Haut-Atlas central : Plateau entre le piémont et la haute montagne, climat aride, zone d'agriculture et d'élevage. Production agricole : amandes, olives, orge, blé dur, blé tendre, fourrage, légumineuses, caroube et miel. Elevage : Petits ruminants ; caprins, ovins Caractéristiques particulières de l'environnement : 40% des unités fourragères proviennent d'un par cours forestier dégradé, culture agraire traditionnelle,stress hydrique, accentuation du dépérissement du milieu forestier, baisse de la fertilité des sols, amenuisement de la superficie des exploitations agricoles.