Formé au cinéma en temps réel au fil des tournages, Foued Mansour est un réalisateur à suivre. Après le succès de «La raison de l'autre» nominé aux César en 2010, il signe «Un homme debout» présenté en compétition nationale au 33e Festival du court-métrage de Clermont-Ferrand. Comment êtes-vous venu au cinéma ? J'avais le goût de la lecture et de la littérature, doublé de l'envie de parler de la société dans laquelle je vis, je voulais également en dénoncer les failles. A l'issue de mes études d'histoire, j'ai intégré une école de cinéma à Paris, l'ESRA. Le cursus représentait trois années d'enseignement, mais au bout d'un an et demi, j'ai quitté cette école car le programme ne m'intéressait pas. J'ai alors rejoint les plateaux de tournage où j'ai plus appris à propos du cinéma ! J'ai occupé tour à tour tous les postes : j'ai débuté en déchargeant des camions, j'ai ensuite travaillé en régie, avec l'idée de me rapprocher de la caméra. Je continuais à écrire en parallèle. Au bout ce cinq ans, un ami comédien m'a présenté mon futur producteur, Xavier Frequant (« C'est à voir »), issu du documentaire et qui souhaitait passer à d'autres projets. Nous avons grandi ensemble, puisqu'il a produit mes trois courts-métrages, «Un homme debout» (2010), «La raison de l'autre» (2009) et «Yvan le prévisible», premier film dont le scénario l'avait séduit. Que vous a inspiré la projection de «Un homme debout», votre nouveau court-métrage présenté en compétition nationale au 33e Festival du court-métrage de Clermont-Ferrand ? Une émotion particulière. Cette projection m'a fait peur, c'était angoissant. Les comédiens, dont Samuel Jouy qui incarne le rôle principal, découvraient de plus, le film pour la première fois. La salle était bondée, j'étais content que ça prenne fin. J'ai ensuite été soulagé, car le public a bien réagi d'autant qu'il s'agit d'un public exigeant, capable de huer ce qui lui déplait. Et Samuel Jouy a été félicité pour son interprétation. Comment est née l'idée de «Un homme debout», au propos plutôt inattendu ? J'avais envie d'aborder le thème de la rédemption et du pardon au milieu de la vindicte populaire. Comment peut-on désigner et considérer un homme coupable, au nom de la force du groupe, en prêtant le flanc au pouvoir dicté par la masse sans laisser de place au discernement et à la distanciation? Je voulais évoquer l'incapacité d'une frange de ce village à pardonner, animée par la loi du talion. C'est un film sur la deuxième chance, proche du cinéma de Yves Boisset dans «Dupont la joie» à la fin des années 70. Pourtant, le personnage que vous mettez en scène résiste et se relève. Même après avoir subi de violents coups, il revient encore à la charge… Cet homme estime qu'il a suffisamment payé le prix de sa faute après quatre années de prison. Il n'est pas récidiviste, son erreur a bouleversé son destin mais il ne culpabilise pas même s'il est rejeté de tous. Il veut retrouver sa place. D'où le titre, «Un homme debout» ? Oui, car c'est aussi une histoire qui parle de la dignité d'un homme. La dernière chose qui reste à quelqu'un lorsqu'il est au fond du trou, c'est sa dignité et le respect qu'il a de lui-même. C'est un sentiment universel, on vit tous à travers le regard de l'autre. Ceux qui en veulent à cet homme ne peuvent pas lui enlever son amour-propre, en dépit de ce qu'il a commis. C'est cette part de l'humain qu'il m'importait d'explorer. Je me suis inspiré d'une histoire vraie : un fait divers parlait d'un homme qui avait commis un crime sordide en violant et tuant une fillette. Le père de l'enfant a entretenu une correspondance avec l'assassin de sa fille au point de devenir presque ami avec lui… Parlez-nous de votre prochain film, «La dernière caravane». Ce sera un huis-clos qui se situera dans le monde du travail aux prises avec la crise, à la manière d'un western afin de traiter un sujet social sous le prisme formel et spectaculaire du cinéma. J'ai envie de jouer avec les genres. «Un homme debout» traite de la dernière chose qui reste à quelqu'un lorsqu'il est au fond du trou, sa dignité et le respect qu'il a de lui-même.