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Reflexion : Reflexion : Le code de la famille ou le déclin symbolique de la famille patriarcale
Publié dans L'opinion le 14 - 02 - 2014

Cela fait maintenant dix ans que le Code de la famille est entré en vigueur. Sa promulgation fut non seulement une énorme avancée sur le plan juridique, mais aussi un grand bond symbolique en ce sens qu'il représente, à notre entendement, un pas décisif vers la mise en place de ce que l'on peut appeler la famille participative. En effet, nombreuses sont les dispositions du code qui viennent heurter de plein fouet la conception patriarcale de la cellule familiale dont la survivance avait longtemps été assurée par le code du statut personnel.
Cette rupture emblématique se dégage, en premier lieu, de la lecture de l'article quatre du Code de la famille qui définit le mariage comme étant un pacte qui a pour but la fondation d'une famille stable sous la direction des deux époux. Formule qui annonce, sans laisser aucune place au doute, la mort légale de cette unité domestique où l'époux avait le statut juridique de «maître absolu» et où l'épouse ne jouissait que d'un statut marginal marqué par l'absence de tout pouvoir décisionnel ainsi que par l'obligation faite à cette dernière d'obéir à son mari au nom de la fameuse prééminence masculine.
La même volonté d'en finir avec l'idée de l'époux chef de famille est réitérée par le législateur qui a tenu à rappeler dans l'article 51 du code de la famille, relatif aux droits et devoirs réciproques entre conjoints, que l'épouse a pour obligation de prendre en charge, conjointement avec l'époux, la responsabilité de la gestion des affaires du foyer et de la protection des enfants. Une cogestion dont le signe distinctif devrait être, selon le même article, la concertation dans toutes les décisions relatives à la gestion des affaires de la famille, des enfants et du planning familial.
En deuxième lieu, il convient de remarquer que, contrairement au code du statut personnel, le code de la famille prône une nouvelle conception des obligations qui naissent du mariage. Ainsi par exemple, la fidélité n'est plus une obligation qui repose uniquement sur l'épouse mais elle constitue désormais un devoir bilatéral que les deux époux sont tenus d'honorer (article 51 du CF). Une nouveauté d'une grande charge symbolique à laquelle s'ajoute, par ailleurs, la suppression du devoir d'obéissance que l'ancienne législation considérait comme un droit du mari à l'égard de sa femme qui, de ce point de vue, n'était rien qu'une éternelle mineure incapable d'avoir des opinions et qui devait, par conséquent, se soumettre complètement aux diktats infaillibles de son conjoint.
Par ailleurs, la réforme de 2004 fut, en outre, l'occasion de la remise en cause d'autres privilèges masculins. Il en est ainsi de la tutelle matrimoniale (wilaya) qui est devenue, d'après l'article 24, un droit appartenant à la femme qu'elle peut, si elle est majeure, exercer selon son choix et son intérêt en contractant, elle-même, son mariage ou en déléguant ce pouvoir à son père ou à l'un de ses proches. Il s'en suit que la femme n'est plus cet objet qui peut être donné en mariage par un tuteur de sexe masculin mais elle est bel et bien une personne à part entière ayant la faculté de conclure, en toute autonomie, une relation matrimoniale avec le conjoint de son choix. Notons ici que sous l'ancien code, seule la femme majeure orpheline de père avait, suite à la réforme de 1993, une telle possibilité.
Un autre exemple de ces privilèges masculins remis en cause par le code de la famille nous est donné à travers les modifications introduites en matière de divorce. D'abord, en soumettant le pouvoir dont dispose l'époux de rompre unilatéralement le contrat de mariage à une autorisation préalable du juge qui veille particulièrement au respect des droits de l'épouse et ceux des enfants. A cet égard, il y a lieu de noter que le code de la famille, du moins dans sa version française, ne parle plus de répudiation mais d'un divorce sous contrôle judiciaire. En suite, le législateur a institué une nouvelle procédure de divorce judiciaire appelée divorce pour raison de discorde (chiquaq). Une procédure qui permet à chaque femme qui ne désire plus rester dans les liens d'un mariage de demander au juge compétant de dissoudre le contrat conjugal sans qu'elle ait besoin d'apporter la preuve d'un quelconque préjudice. Une innovation d'une importance capitale car elle a mis fin, non uniquement sur le plan symbolique mais de manière concrète, à un arbitraire qui donnait à un homme, en refusant de prononcer le Talaq, la possibilité de faire de son épouse, parfois jusqu'à la fin de l'existence de celle-ci, l'otage d'une relation matrimoniale qu'elle ne supporte plus. Il s'agit, en d'autres termes, de la suppression d'un pouvoir injustifié qui avait, dans d'innombrables cas, transformé un pacte qui devait reposer sur l'affection mutuelle à une sorte d'esclavagisme contractuel ayant porté, pendant longtemps, atteinte à l'humanité de milliers de femmes.
Enfin, on ne peut effectuer une énumération des innovations du code de la famille qui nous paraissent de nature à édifier une famille participative sans évoquer les nouvelles dispositions régissant les relations pécuniaires entre les deux époux. A ce propos, deux d'entre ces dispositions retiendrons particulièrement notre attention. La première, est celle inscrite dans l'article 199 du CF qui prévoit que la mère aisée doit assumer la pension alimentaire, lorsque le père est, totalement ou partiellement, incapable de subvenir à l'entretien de ses enfants. Une obligation supplémentaire qui vient s'ajouter aux devoirs incombant aux femmes, spécialement celles ayant des enfants, mais qui ne représente, à notre sens, rien d'autre que la conséquence naturelle et logique du principe de coresponsabilité qui implique évidemment que les deux partenaires contribuent, dans la mesure du possible, aux différentes charges familiales. Cependant, il y a lieu de signaler que l'obligation d'entretien reposant sur la mère, aux termes de l'article précité, est exceptionnelle car elle n'entre en jeu qu'en cas d'insolvabilité du père qui, lui, demeure le débiteur principal de l'obligation.
L'autre disposition, elle, est celle prévue par l'article 49 du CF qui, tout en réaffirmant que les deux époux disposent chacun d'un patrimoine propre, donne, néanmoins, aux deux parties la possibilité de se mettre d'accord, dans un document distinct de l'acte de mariage, sur les conditions de fructification et de répartition des biens qu'ils auront acquis pendant leur vie commune. Là aussi, l'évolution est de taille, dans la mesure où elle permettra aux couples d'expérimenter un mécanisme juridique qui tient en considération les efforts de chacune des deux parties dans l'accroissement du patrimoine familial.
De ce qui précède, il en découle clairement que la réforme du code de la famille avait principalement conduit au remplacement du modèle familial, ayant prédominé pendant des siècles dans la société marocaine, par un autre où la femme occupe désormais, à coté de son mari, le rang de codirigeante avec des droits et des devoirs bilatéraux entre les deux parties. Evidemment, le schéma proposé par le législateur prendrait des années avant de conquérir tous les esprits car le modèle familial classique faisant du mari le chef légitime du foyer conjugal et de l'épouse une simple adjointe qui doit se soumettre à ses sentences reste le modèle qui est toujours inscrit dans les structures mentales. Des structures qui, étant le produit d'une longue socialisation qui s'était, elle même, réalisée au sein de familles du type classique, ne se transformeront indubitablement que par un travail de déstructuration qui, lui, requiert, par essence, du temps avant de produire ses effets.
Cela dit, il n'en reste pas moins qu'en inscrivant le schéma domestique souhaité au sein de la loi elle-même, le législateur marocain a énormément concouru à l'accélération du processus de mutation de la structure familiale. Et si ce recours à la loi suscite de grandes espérances en l'avenir de la famille marocaine c'est que le droit, comme le remarque Pierre Bourdieu, est la forme par excellence du pouvoir symbolique de nomination et de classement qui crée les choses nommées. Un pouvoir dont il n'est pas trop de dire qu'il fait le monde social, mais à condition de ne pas oublier, bien entendu, qu'il est fait par lui.


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