Cela remonte aux années 80 quand le cinéaste Hamid Bennani décida d'organiser un festival de cinéma. C'en fut vraiment un sous l'intitulé du "Festival International Ciné-Jeunesse" que devait abriter la wilaya de Rabat sous le gouvernerat de feu Omar Benchemsi. Bennani et Benchemsi sont tous les deux originaires de Meknès ce qui va faciliter la compréhension pour l'organisation d'un festival à la hauteur historique et citadine de la capitale. On opta pour le plein air permettant au plus grand nombre de spectateurs de suivre les projections nocturnes. Le Centre Cinématographique Marocain apporta sa contribution en dotant le festival d'un matériel sophistiqué destiné spécialement au plein air avec une image et un son parfaits. C'était la première fois qu'on faisait de si grandes acquisitions en particulier un écran mesurant 21mx7m destiné aux longues portées. Parallèlement aux projections officielles, car il y avait bien d'autres annexes, mais sans les ridicules compétitions d'aujourd'huides, des ateliers sont organisés dont un va attirer particulièrement l'attention, celui du scénarion animé par deux grandes figures de l'écriture scénaristique: le Français Jean-Claude Carrière et l'Egyptien Salah Abou Seif. Un groupe de cinéphiles s'est montré particulièrement attentif et enthousiasmé de se trouver en face de ces personnes charismatiques du cinéma. Certains sont devenus célèbres sur la place publique marocaine notamment Bachir Kamari, critique littéraire et cinématographique, écrivain, scénariste et professeur universitaire. Mohamed Noureddine Afaya, également professeur universitaire, philosophe, essayiste, critique et ex-membre de la HACA. Daoud Aoulad Sayed, professeur universitaire, scénariste, photographe et réalisateur d'une bonne dizaine de films, courts et longs métrages. Ce fut une véritable initiation à l'écriture du scénario enseignée selon deux méthodes différentes car les animateurs-professeurs appartenaient à deux écoles de cinéma presque opposées. Carrière a marqué plusieurs décennies de l'histoire du cinéma, en tant que scénariste ayant travaillé pour les grands noms de ce monde, américains, français, espagnols et allemands confondus. Son nom et lié à un cinéma de qualité car les scénarios, combien nombreux, qu'il a écrits, sont de haute teneur artistique et d'une extrème richesse humaine et civilisationnelle. Avec lui nous avons appris la méthodologie de l'écriture en insistant sur la nature du sujet, d'origine interne ou externe, sur le développement de l'intrigue, la construction des personnages et le travail déterminant sur la chute. L'approche est purement scientifique ce qui va faciliter l'assimilation des principales notions. Quant aux leçons dispensées par Abou Seif, elles étaient loin de toute pédagogie scientifique. L'animateur en question ne note presque rien sauf les noms de quelques amis méconnus. Tout tient dans son discours éternel dont il ne se lasse jamais? Fin parleur, il ponctue la leçon par d'innombrables anecdotes autour de sa personne et ses films, mais également en relation avec d'autres cinéastes égyptiens connus de tous dont la seule évocation nous excitaient à outrance. Pour les cinéphiles que nous sommes, presque tous lauréats de la Fédération des ciné-clubs, largement familiarisés aux produits égyptiens et à leurs auteurs, on avait plus de sympathie pour Abou Seif qu'à son homologue français, ignorant à cet instant, certes naivement, que l'écriture de scénario est plus une question de méthode que de bavardage. Il nous a fallu peut etre des années pour comprendre la portée scientifique de l'écriture de scénario qui fait actuellement défaut à nos films. Tout le monde n'a pas eu la chance d'étudier un jour chez Jean-Claude Carrière.